Qui est Teddy Quinlivan, première égérie trans de la maison Chanel ?

teddy quinlivan
À 25 ans, Theodora "Teddy" Quinlivan devient le premier mannequin trans à travailler pour Chanel. Elle prête son visage à la nouvelle campagne beauté de la maison, "Chanel Pick Me Up". Présentation d'une icône engagée qui veut faire bouger la mode.

Dans la mode comme dans le reste des industries culturelles, la question de la représentation est devenue incontournable. Dans notre monde polarisé où se confrontent des pensées réactionnaires et un discours plus inclusif, de nouvelles voix parviennent à se faire entendre. Des femmes, des personnes racisées ou issues de la communauté LGBTQ ou ne correspondant pas aux standards de beauté qui ont prévalu durant des années peuvent, notamment grâce aux réseaux sociaux, prendre la parole et parler de leur vécu, élargissant ainsi le périmètre de ce qu’on imagine être "la norme".

Parmi elles, il y a Teddy Quinlivan, mannequin américaine de 25 ans, qui, après l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis, a fait son coming-out Trans.

Un parcours jalonné de victoires

"Depuis ma transition à l'âge de 16 ans, je vis comme une femme cisgenre", confiait-elle en septembre 2017 à CNN Style. "J'ai eu beaucoup de chance, car j'ai gagné à la loterie génétique. Mon corps est fin, ma voix n'est pas trop grave et mon visage a des traits féminins. Ce privilège m'a donné la confiance pour marcher dans la rue en tant que femme, travailler dans le milieu de la mode, faire des rencontres parce que les gens pensaient que j'étais 'une fille normale'".

Révélée par Nicolas Ghesquière, le directeur artistique de la maison Louis Vuitton, lors de son défilé pour le printemps-été 2016, elle a depuis été égérie des campagnes MSGM, Marc Jacobs beauté ou encore Maison Margiela et est apparue en cover de nombreux magazines. 

Vidéo du jour

Lundi 26 août 2019, c'était au tour de Chanel d'annoncer sa collaboration avec la mannequin, nouvelle égérie beauté de la maison. "Toute ma vie a été un combat, écrit-elle dans un long post Instagram. De mon harcèlement constant à l'école, par des enfants qui menaçaient de me tuer et me racontaient en détail comment ils allaient le faire, à mon propre père qui me frappait et me traitait de 'tapette', en passant par les retours de bâton reçus après que j'ai ouvertement dévoilé avoir été sexuellement agressée dans l'industrie du mannequinat... Cette victoire me fait dire que toutes ces merdes en valaient la peine (...) Je suis la première personne ouvertement trans à travailler pour la maison Chanel et je suis très fière de représenter ma communauté. Le monde vous rejettera, crachera sur vous et vous dira que vous ne valez rien. C’est votre travail d’avoir la force de vous lever et de continuer à vous battre, parce que si vous abandonnez, vous ne ferez jamais l'expérience des larmes du triomphe. Merci à tous ceux qui ont fait de ce rêve une réalité !"

 Trans, mais pas que !

"L'industrie de la mode a une puissance et une force de frappe rares. Elle est parfois la source du changement social. Elle décide ce qui est de bon goût, ce qui est cool, ce qui est important, à travers la pub, les couvertures de magazines, les spots télévisés", écrivait-elle dans une lettre ouverte pour le magazine i-D après sa mise en avant dans l’industrie. Malgré tout, Teddy Quinlivan n’hésite pas, dans cette même lettre, à mettre les acteurs de l’industrie, leurs consommateurs et les personnes trans en garde : "Nous devons veiller et faire attention à ce que la cause trans et les trans eux-mêmes ne deviennent pas une nouvelle tendance à exploiter. La ligne rouge est très fine : les marques se doivent de célébrer la communauté trans de la manière la plus appropriée et authentique possible. Et les personnalités trans, elles aussi, doivent être très prudentes et regardantes sur les gens avec qui elles sont prêtes à travailler".

En effet, comment faire en sorte que cette ouverture, progressive, ne se résume pas à une simple tendance passagère ? Comment permettre à chacun de trouver sa place, au-delà de la simple apparence ou apparition ? Pour Teddy Quinlivan, l'enjeu est là. La célébration d’une communauté n’est pas suffisante. Pour entériner le changement à l'oeuvre dans le milieu, elle doit être soutenue par un système qui s’enquiert de pratiques de recrutement équitables, pousse les marques et les médias à traiter les personnes trans comme des individus uniques et pas de simples porte-parole de leur communauté.

Et la mannequin de souligner : "Si je devais envoyer un message aux jeunes personnes trans qui me lisent, je leur dirais que le mot 'normal' n'a pas qu'une seule signification. C'est à vous de le définir. Vous n'êtes pas seules dans votre situation, à lutter. Levez-vous, soyez fières de vous et battez-vous pour votre liberté. Prouvez au monde qu'il a tort. Et surtout, aimez-vous ! C'est le plus dur à faire, mais s'aimer soi-même, c'est le début de la liberté".

Quand les mannequins prennent la parole

Parmi les autres mannequins prêtes à se faire entendre, on peut également citer Cameron Russell, qui milite pour une mode plus éthique, Tess Holliday, ou encore Ashley Graham qui contribuent à mettre en avant la diversité des corps sur les podiums mais aussi Adwoa Aboah qui, avec sa plateforme Gurl Talk, encourage à parler des problèmes de santé mentale. Halima Aden, mannequin voilée, et Naomi Campbell, depuis ses débuts, luttent quant à elles pour donner plus de visibilité aux mannequins noires et racisées. 

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