Témoignage : "Je n'arrivais pas à perdre du poids à cause de mon inconscient"

Par Véronique Houguet
perte de poids inconscient
Malgré une détermination sans faille et des menus équilibrés, on ne décolle pas ou on craque. L'inconscient dit non. Maigrir ce n'est pas qu'une histoire de balance et d'aiguille, ça se passe autant dans la tête.

Maigrir n'est pas qu'une affaire de diététique et de kilos en moins sur la balance. C'est une confrontation intime avec soi-même. Car on maigrit pour se plaire, on maigrit pour aimer et être aimée. Pour se réapproprier son histoire en redessinant son corps. Pour se libérer de jougs archaïques aussi. On maigrit pour exister.

De fait, dégommer vraiment les kilos rebelles représente une métamorphose psycho-émotionnelle complexe, une plongée dans sa psyché. Il faut trouver les clés pour dompter ses démons puis les exorciser. C'est le prix pour devenir mince dans sa tête, comme en témoigne Elisabeth, 50 ans, sans tabous ni faux-semblants.

"À la puberté, mon corps est devenu mon cauchemar, car la cible de moqueries"

"Le problème était en moi : je ne m'aimais pas. Je torturais mon corps pour ressembler à l'image que je m'imposais d'être, croyant que pour être aimée et acceptée, je me devais d'être mince.

Je ne vivais qu'à travers le regard des autres, je me conformais à leurs désirs, mais je n'existais pas en tant que personne.

Cela remonte à loin... Gamine, j'étais la seule ronde de la famille et, à la puberté, mon corps est devenu mon cauchemar, car la cible de moqueries. Une profonde blessure. C'est ainsi que j'ai fait mon premier régime et, jusqu'à 26 ans, je me suis tout infligé : 400 calories par jour à base de fromage blanc-haricots verts-courgettes-salade, régimes 100 % protéines naturelles, sachets hyperprotéinés, soupe au chou.

Je maigrissais : 45 kilos pour 1,57 m, au plus bas, mais inévitablement je craquais et je me ruais sur la nourriture pour compenser les privations. Je reprenais plus que je n'avais perdu ­ je suis montée jusqu'à 110 kilos ­, du coup, je me serrais un peu plus la vis.

"Lorsque je maigrissais un peu, ce n'était jamais assez"

À mes yeux, devenir mince signifiait que j'allais enfin être heureuse, que ma vie serait plus simple et plus belle. Une femme qui réussissait l'était forcément.

Mon rêve était d'être androgyne. Pour moi, c'était la féminité. En fait, j'avais un gros souci avec la mienne. Je jalousais les hommes, car notre société les privilégie, tout est plus facile pour eux, ils ont moins d'efforts à fournir pour être appréciés. Je ressentais une injustice insoutenable, comme s'ils prenaient ma place.

En mincissant, j'effaçais l'injustice.

Résultat : lorsque je maigrissais un peu, ce n'était jamais assez. Je me maltraitais verbalement. À 26 ans, un médecin m'a prescrit des médicaments coupe-faim (extraits thyroïdiens, isoméride). Une fois qu'ils ont été interdits, j'ai repris 40 kilos en un mois et donc les régimes.

"Je me suis torturée pour devenir une autre"

En 2012, à bout, j'ai envisagé une gastroplastie.

`Vous n'êtes ni assez grosse ni malade. La seule personne qui peut quelque chose pour vous, c'est vous', m'ont opposé les médecins. Ce fut le premier déclic dans ma tête.

J'ai contacté un nutritionniste et vu deux psys à l'hôpital. Pour la première fois de ma vie, je m'occupais de moi... J'ai commencé à concevoir qu'être androgyne n'était pas ma physiologie. Deuxième déclic avec la méthode linecoaching, où on suit ses sensations de faim et de satiété pour maigrir.

J'avais peur de grossir en mangeant de tout, mais j'ai vu que je perdais doucement, sans rien faire pour.

Tandis que je prenais conscience de la saveur des mets, je prenais aussi conscience de moi, de qui je suis vraiment. Je me suis torturée pour devenir une autre, mais finalement, c'est en me laissant vivre, en mangeant sans me restreindre et sans culpabilité que j'ai maigri.

Aujourd'hui, j'ai retrouvé l'estime de moi. J'ai des formes féminines là où il faut et je me plais à 60 kilos, mon corps et mon esprit sont en phase. Fini l'obsession de me peser : une fois par mois suffit. Je fais de l'exercice physique et je vais apprendre à cuisiner. Le plaisir est entré dans ma vie, et pas seulement culinaire, car comme je détestais mon corps, il était anesthésié, je n'éprouvais rien intimement. Je suis née à moi-même."

Article initialement paru dans Marie Claire en 2014.

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