Que dire (et ne pas dire) à une personne qui vient de rompre

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Une rupture est un moment douloureux où il est recommandé d’être entouré.e. Mais il est parfois difficile de savoir comment réagir et que dire à la personne qui vit un chagrin d’amour. Éclairages avec les témoignages de trois jeunes femmes et l'expertise de la psychologue Véronique Kohn.

Vous venez de rompre, vous traversez un chagrin soudain, parfois dévastateur et cherchez du réconfort auprès de vos ami.e.s, de votre famille, de vos collègues ou même de personnes plus lointaines, comme un.e professionnel.le de la psyché.

Vous êtes donc à la recherche de réconfort, souhaitez entendre des paroles rassurantes. Pourtant, tout le monde ne sait pas toujours bien réagir face à la tristesse liée à un cœur brisé. Les mots peuvent manquer et les maladresses se multiplier.

La psychologue spécialiste des relations amoureuses, Véronique Kohn, invite à adopter un mot d’ordre dans ce cas-là : la bienveillance. Une bienveillance qui s’applique à condition de rester à sa place, sans donner son point de vue sur la situation vécue.

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Être empathique et ne pas juger la relation de l'autre

"La personne qui vient de rompre est un peu dans une zone d’effondrement, de chaos, de turbulence. Il faut faire appel à son empathie et accueillir la parole de l’autre", débute-t-elle.

Cela vaut même pour les personnes qui sont à l’origine de la rupture. "Ce n’est pas miraculeux, il y a quand même perte, le deuil de la relation", appuie la psychologue. Alors soyez dans la compassion plutôt que dans l'évaluation de la relation de l'autre.

Il y a quelques mois, Clara*, 28 ans, a quitté son compagnon avec qui elle était depuis cinq ans et demi. Elle a été marquée par deux types de réactions déplacées. D’abord, des personnes étant "totalement dans la compassion pour lui". "Comme si le fait de quitter la personne enlevait la douleur que je pouvais ressentir..."

D’autres se sont "mis à critiquer mon ancien copain et sa relation en disant ‘ah, mais je savais que ça n’allait pas’". Ces réactions sont venues de personnes proches d’elle, tandis qu’elle aurait préféré qu'ils "restent à leur place, soient neutres, écoutent et soient là pour [elle] sans forcément donner le fond de leur pensée".

Une attitude fortement conseillée par l’experte : "il faut tenir la main de la personne le temps qu’elle décharge sa tristesse. On crée un espace pour que l’autre décharge le trop-plein d’émotions".

Ne pas chercher à influencer l'autre

Les remarques déplacées sont absolument à éviter. Véronique Kohn parle d’ "interventions en mode sauveur".

"Elles ne sont pas efficaces. On ne va pas, avec notre point de vue, donner notre avis sur la rupture". "Si une personne a une faible estime d’elle-même, elle va être prête à écouter la première personne venue la sauver. Elle va donc être dans le biais d’attribution : elle va croire que ce que dit l’autre personne est bon pour elle. Et c’est malsain".

Clara l’admet : ces remarques ont, dans un premier temps, "dégradé [sa] vision de la relation". Il lui a "fallu prendre du recul" avant de garder sa vision initiale et positive de ce qu’elle avait vécu avec son ex. "Dans ces moments de fragilité, les personnes sont influençables", ajoute l’experte.

Véronique Kohn tient à nuancer ces situations expliquant qu’il arrive que certaines personnes portent un regard assez négatif sur la relation de sa/son ami.e, tout simplement parce que ce.tte dernier.e n’a fait que se plaindre. "Forcément, si notre ami.e se plaint constamment de sa relation quand on la/le voit, et qu’elle/il ne met jamais en avant les bons moments – s’il y en a -, on va évidemment lui dire ‘bon débarras’ !".

Elle conseille plutôt de "faire acte de présence" : "On ne va pas essayer de sauver, ni de rassurer, ni de donner des conseils". Si les mots vos manquent, vous pouvez "reformuler" les paroles que vient de prononcer la personne triste. Par exemple, si l'individu vous dit  "Ça va finir par aller mieux", répondez "tout va s’améliorer, tu verras, tu iras mieux de jour en jour".

Ne jamais dévaluer la peine de l'autre

Dans certains cas, le pire peut aussi venir de personnes qui n’ont pourtant pas à exprimer leur opinion. Stella, 26 ans, est encore très marquée par la réaction de sa médecin généraliste.

Juste avant Noël, en 2022, son petit ami la quitte après quatre ans de relation, marquant la fin de sa première histoire d’amour. Elle vit difficilement les fêtes de fin d’année. Mais c’est un mois après qu’elle entre dans la phase de "deuil de la relation".

Alors étudiante en alternance, elle se retrouve dans l’incapacité d’aller en cours et au travail. La jeune femme se tourne vers la médecin de famille, qu’elle connaît depuis presque toujours. En pleurs, elle lui explique qu’elle ne peut pas affronter le travail et qu’il lui faut un arrêt maladie. La réponse de la praticienne est cinglante : "tu te rends compte de l’état dans lequel tu te mets pour un mec. Tu es plus forte que ça".

"J’ai ressenti de la haine, de la colère, elle a dédramatisé mon chagrin alors que j’avais l’impression que j’allais mourir de tristesse", se souvient-elle. Déjà très touchée par cette remarque, elle en subit un second choc lorsqu’elle appelle sa chargée d’études pour lui partager son absence. "Elle m’a dit : ‘Mais tu loupes les cours pour un mec !’".

"Les gens estimaient que je n’avais pas à me mettre en arrêt maladie pour si peu, alors que je me suis rarement sentie aussi mal de toute ma vie", éclaire-t-elle. Elle garde depuis une "rancœur" envers la médecin de famille et a maintenu, pendant un an, des "rapports compliqués" avec sa responsable d’études. Aujourd'hui, elle estime qu’elles ont "profité de leur statut au moment où [elle] étai[t] fragile". Au contraire, ses proches, "[sa] sœur et [sa] tante", l’ont particulièrement aidée à traverser cette épreuve.

Si ces deux personnes sont allées au-delà de leur position en dévaluant la peine de leur patiente ou élève, Véronique Kohn insiste quant à la souffrance réelle que traverse une personne après une rupture : "un chagrin d’amour peut être extrêmement dévastateur". "Chacun est différent, n’a pas les mêmes croyances et les mêmes conditionnements. Pour autant, il ne faut pas minimiser le chagrin de l’autre".

Éviter de faire ressentir de la culpabilité

Pour Alison*, au contraire, les phrases les plus difficiles ont été prononcées par ses proches : sa mère et son père. Après avoir quitté son compagnon avec qui elle vivait, la femme de 28 ans a un peu attendu avant d’informer ses parents qui appréciaient beaucoup son ex-conjoint. "Ils m’ont dit ‘on ne te comprend pas, pourquoi tu as fait ça ? , ‘il était vraiment bien, on l’aimait bien, nous’".

En mentionnant la rupture, elle finit par pleurer, face à l’incompréhension de son père qui lui reproche sa réaction alors que c’est elle qui a pris la décision de rompre. Un épisode qui a amené à de la "culpabilité" et a "drastiquement nuit aux relations avec [ses] parents".

"Il y a des personnes très raides, qui manquent d’empathie. Quelqu’un qui est dur pour lui va être dur pour nous, il va être dans son ‘sois fort’", analyse Véronique Kohn. Même si une personne a fait le choix de rompre, il est important de ne surtout pas lui faire ressentir de la culpabilité".

Comment bien s'entourer pendant une rupture ? 

Alors, quelles précautions prendre après une rupture pour éviter d’entendre des commentaires négatifs ?

"Faire un tri des personnes à qui l’on s’adresse, avoir une liste de gens de confiance". Il ne faut pas non plus hésiter à formuler ses besoins aux personnes se trouvant en face de soi et à poser ses limites. "C’est à moi de faire savoir ce dont j’ai besoin et ce que je ne veux pas".

Mais puisque tout le monde reste "humain", sachez que personne n’est à l’abri de remarques blessantes, car "personne n’est parfait", avance Véronique Kohn. 

Et que faire des banalités ("Un de perdu, dix de retrouvés !", "Tu mérites mieux"), parfois lancées par les proches pour redonner le sourire à la personne triste ? Tout dépend de qui les prononce et dans quel contexte.

* Certains prénoms ont été modifiés.

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