C'est un spleen qui prend à la gorge à l’aube de la trentaine, une période de doutes digne d’une tirade dramatique tirée des Pensées de Pascal. Qui suis-je ? Où vais-je ?

Sorti.es de l’adolescence depuis peu et pas tout à fait arrivé.es à l’âge adulte, les 25-35 ans vivent de plus en plus une période d’incertitudes, saupoudrée d’une pression sociale sous-jacente.

Le psychologue et coach, Boris Charpentier*, fait le point sur ce mal-être générationnel.

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Crise du quart de vie : qu’est-ce que c’est ?

Même si la dénomination peut paraître simple, Boris Charpentier précise que dans la littérature scientifique, on distingue deux typologies autour de la crise du quart de vie. “Il y a d’un côté la phase de locked-in, et d’un autre celle de locked-out. Le moment de locked-out correspond à la période où l’individu se sent incapable d’accéder à la vie d’adulte. Il a la volonté de réussir, mais il fait face à une barrière insurmontable qui provoque instabilité et baisse de l’estime de soi.”

Le spécialiste ajoute que ce premier passage à vide concerne majoritairement les 21-25 ans qui font leurs premiers pas dans l’âge adulte. “Et d’une autre part, il y a donc le locked-in, période à laquelle les 25-35 ans sont alors confrontés. Le terme vient de la sensation d’être emprisonné dans sa condition d’adulte, la frustration est à son comble.”

Une maladie mise sous silence

Durant les cinquante dernières années, les évolutions sociales ont été nombreuses et ce, sur tous les plans : habitation, emploi, mariage, éducation… C’est pourquoi Boris Charpentier explique que “l’impact pris par la première décennie dans l’âge adulte a totalement changé. On met bien plus de temps que nos parents à passer chaque étape, et on s’en veut de ne pas rentrer dans l’âge adulte comme eux. Mais la problématique à laquelle cette génération est confrontée reste trop ignorée.

Le psychologue explique qu’il y a “trop peu d’études sur ce sujet, on en est encore aux balbutiements scientifiquement parlant.” Les personnes touchées ont elles-mêmes du mal à mettre les mots sur ce qu’elles ressentent, ce qui rend le dialogue sur ce sujet un peu compliqué". 

Se remettre en question pour s’en sortir

Que ce soit en période de locked-in comme de locked-out, l'expert souligne que “le plus important est de s’interroger sur le sens que l’on veut donner à son existence. Qu’est-ce qui importe le plus ? L’argent, le couple, les voyages ? Il ne faut pas avoir peur de se poser les bonnes questions et de prendre des risques par la suite, quitte à faire des erreurs.” Cette phase de remise en question ne doit pas être considérée comme un échec, mais plutôt comme un rebond. En faisant en sorte de “définir son avenir de manière positive” comme le précise le spécialiste, “on peut visualiser le futur différemment, et le construire par étapes.”

Au-delà d’une crise, ce moment de doute peut conduire à prendre des décisions radicales comme quitter son emploi, ou même son conjoint. Mais Boris Charpentier précise qu’il peut être évité en s’y prenant assez tôt. C’est en établissant clairement ses choix de vie le plus vite possible que l’on va s’éviter cette crise. Et le

moment le plus propice resterait durant la scolarité, pour éviter que nos doutes bloquent nos aspirations de demain.

Crise du quart de vie : une maladie du 21e siècle

La science l’a prouvé : 86% des 25-35 ans se sent sous pression au sujet de leur vie privée, et deux tiers d’entre eux se disent directement touchés par cette crise du quart de vie. Mais ce mal-être qui se répand au sein de la génération Y n’existe que depuis peu. 

Entre le sentiment de "devoir" suivre les pas des aînés (en se mariant par exemple avant 30 ans, ndlr) et celui de vouloir se réaliser avant tout, la génération Y perd pied face à une montagne d’obligations. Le fait de comparer sa vie à celle de ses propres parents au même âge crée une sorte de malaise. Mais généralement, on oublie que les époques sont vraiment différentes, tant au niveau social que technologique. Les sentiments liés à l'avènement des réseaux sociaux, les changements du milieu professionnel et les rapports au sein des couples et des moeurs ont tout bouleversé.

Reste à prendre du recul pour se libérer de cette pression 2.0.  

*Boris Charpentier, psychologue et coach à Paris