Selon un sondage IFOP mené en octobre 2021 pour la fondation AÉSIO, 74% des Français estiment que le bien-être mental est un enjeu de santé prioritaire.

19% jugent leur état de santé mentale moyen ou mauvais et 28%, que la crise sanitaire a aggravé les choses. Prennent-ils soin de leur psychisme pour autant ? 32% disent avoir toujours quelque chose de plus important à faire, 31% avancent qu’ils manquent de temps et 24% qu’ils n’ont pas le réflexe.

C’est grave, Docteur ? "Les consultations psy sont de plus en plus saturées ; certains troubles anxieux ou situations de détresse émotionnelle intense nécessitent de consulter un professionnel de santé", confirme le docteur David Gourion, auteur d’Anti-Stress, la méthode simple pour soigner l’anxiété et la dépression (Marabout).

"Toutefois, l’avancée des neurosciences et celle des thérapies comportementales et cognitives, autorisent l’espoir". D’après le médecin psychiatre et docteur en neurosciences, de nombreuses personnes déprimées entretiennent la croyance que rien ne peut les aider.

"Or, non seulement elles ne sont pas seules, mais elles disposent de nouveaux outils simples et efficaces", se réjouit le soignant. Il s’agit à la fois de dédramatiser les choses et d’expérimenter ces techniques accessibles. "Chacun.e choisira ensuite les siennes car il n’y pas de recette magique qui marche sur tout le monde", évoque David Gourion.

Stress, anxiété ou angoisse ?

Première étape pour apprivoiser notre santé psychique : clarifier les notions de stress, d’anxiété, d’angoisse. Nous cohabitons tou.te.s avec ces émotions désagréables qui conjuguent à différents degrés des symptômes physiques (accélération du rythme cardiaque, respiration contrariée, tensions, sueurs, tremblements, étourdissements, mains moites) et des pensées anxieuses (inquiétudes, ruminations, obsessions, doutes, craintes).

Le stress est un "état réactionnel de l'organisme soumis à une agression brusque" nous dit le Larousse. Nervosité, sentiment d’être sous tension permanente… quand il est subi de manière chronique, il fait le lit de l'anxiété, un état dominé par un sentiment d’insécurité diffus, inexplicable.

Un cran au-dessus, l’angoisse déclenche un vécu douloureux, une impression de gouffre sans fond. Elle s’exprime régulièrement sous forme de crises.

Programmer son cerveau pour réguler le stress 

Seconde étape : David Gourion invite à installer de nouvelles manières de réguler le stress. "Notre cerveau est une machine à créer des pensées, comme notre peau produit de la transpiration. La question n’est pas d’éradiquer celles qui sont négatives – elles sont naturelles -, mais d’améliorer le processus de leur régulation", avance le psychiatre.

"La vraie différence entre l’anxieux et le non anxieux, c’est la façon de traiter les pensées négatives". Le premier reste focalisé dessus, les transforme en ruminations. L’autre fait preuve de plus de fluidité face à elles. Il les laissera passer comme un nuage dans le ciel de son paysage mental.

Elles seront équilibrées dans le flux constant des pensées, notamment les positives. La bonne stratégie pour fluidifier ce "flow" : installer un programme de réduction du stress à notre mesure, en testant les outils pour identifier ceux qui marchent le mieux sur nous. Respiration, neurosciences, méditation, activité physique, phytothérapie… Hop, hop, hop !

Nos techniques pour diminuer son anxiété ?

  • Respiration SOS : 4-7-8

En une trentaine d'années, plus de 13 000 études scientifiques ont montré l’efficacité de la cohérence cardiaque, ou la respiration selon la méthode du 365 (3 fois par jour, 6 respirations par minute, pendant 5 minutes).

Bon à savoir : la fréquence idéale varie d'une personne à l'autre ; elle se situe généralement entre 3 et 7 respirations par minute lors de cet exercice (la fréquence respiratoire moyenne inconsciente, sans concentration particulière oscille entre 12 et 20 bprm, ndlr). Des applications pour smartphone comme The Breathing App ou HRV4Biofeedback aident à découvrir notre rythme.

Il existe des dizaines d’exercices de méditation axés sur la respiration, avec des effets qui diffèrent selon notre objectif. Cette technique proposée par le Dr Steven Laureys dans son carnet d’exercices de méditation Méditer avec le Dr Laureys (Odile Jacob) est très puissante pour mieux dormir, maîtriser l'anxiété et contrôler d'éventuelles crises de panique.

Choisissez un endroit apaisant et installez-vous dans une posture assise confortable. Inspirez calmement pendant 4 temps tout en sentant votre diaphragme se détendre et votre ventre se gonfler. Gardez le dos bien droit. Posez une main sur le ventre et l'autre sur la poitrine pour bien sentir vos mouvements respiratoires.

Retenez votre respiration pendant 7 temps. Vos pensées s'égarent ou les émotions affluent ? C’est normal! Restez centré.es sur votre souffle et votre décompte.

Expirez calmement et lentement en comptant jusqu'à 8. Répéter le cycle 7 fois où réglez votre minuteur sur 4 min.

Le conseil du Dr Laureys : soyez indulgent.e envers vous si vous n'y parvenez pas du premier coup. L'exercice devient facile avec la pratique. Il peut aussi être réalisé sans bloquer ni retenir le souffle après l'inspiration. Il suffit alors de suivre la cadence 4-6 ou 5-7, plus accessibles.

  • Tenir un journal thérapeutique

Une étude publiée en 2016 (A.Farooqui) montre que la thérapie par l'écriture est efficace sur le stress post-traumatique, l'anxiété, la dépression, le trouble obsessionnel-compulsif, le chagrin et la perte, les problèmes relationnels ou encore la faible estime de soi.

Nayla Chidiac, docteur en psychopathologie et fondatrice des ateliers d’écriture thérapeutique à l’hôpital Ste-Anne, conseille de pratiquer l’écriture dite expressive 15 minutes par jour, deux fois par semaine. On augmentera ensuite la fréquence "jusqu’à ce que l’écriture devienne un besoin".

Pour maximiser les effets, cadrez en amont votre activité :

- Fixez-vous un objectif : écrire chaque jour pendant un certain temps.
- Décidez à l'avance quand et où vous écrirez chaque jour.
- Posez des mots sur ce qui vous donne envie d'écrire en premier lieu, cela pourrait être votre première entrée dans votre journal

Ensuite, suivez ces 5 étapes :

- Sur quoi voulez-vous écrire ? Nommez-le.
- Réfléchissez dessus, fermez les yeux, respirez à fond et concentrez-vous.
- Examinez vos pensées et vos sentiments, commencez à écrire.
- Prenez le temps pour vous-même : écrivez 5 à 15 min d'affilée.
- Arrêter intelligemment en relisant ce que vous avez écrit et en réfléchissant sur une ou deux phrases.

Dans son ouvrage Les bienfaits de l’écriture, les bienfaits des mots (Odile Jacob), la psychologue clinicienne propose plusieurs protocoles inspirants pour pratiquer chez soi.

Notre préféré : choisissez un morceau de musique sans parole que vous aimez, et en l’écoutant, dessinez un vase, remplissez-le de mots, sans chercher de cohérence. Objectif : déterminer nos préoccupations du moment, savoir ce qui nous occupe l’esprit. À renouveler dès que l’on se sent submergé.e !

  • Fixez des rendez-vous avec vos soucis

En s’appuyant sur les découvertes les plus récentes en neurosciences et sur sa solide expérience clinique, le Dr David Gourion a mis en place une méthode simple pour soigner l’anxiété et la déprime, qu’il expose dans l’ouvrage Anti-Stress, la méthode simple pour soigner l’anxiété et la dépression (Ed. Marabout). L’un des rouages clés : les biais cognitifs. Ces bugs de raisonnements inconscients qui aggravent l’anxiété sont au cœur des recherches des thérapies cognitives et comportementales (TCC).

Déconstruire leur dynamique aide à nous libérer des pénibles ruminations qui nourrissent le stress. "Imaginez que l’un des jeunes stagiaires de votre équipe vous appelle à 1h du matin pour vous dire qu’il y a un problème avec l’agrafeuse. Vous le recadreriez probablement gentiment sur l’horaire, puis fixeriez un rendez-vous le lendemain pour gérer le souci", illustre le psychiatre.

En réalité, nos pensées se comportent parfois comme ce jeune stagiaire. Parce que nous n’avons pas de recul dessus, que nous avons tendance à fusionner avec elles, nous les traitons en flux continu au lieu de les déléguer dans le temps. Prendre conscience que nous ne sommes pas obligés d’y répondre au temps est une étape majeure. On ne contrôle pas ses pensées mais on peut y mettre un peu d’ordre.

Son conseil : Inutile de chasser les soucis dans l’espoir de les oublier, par exemple en buvant de l’alcool ou en regardant des séries jusqu’au bout de la nuit. Cette stratégie d’évitement aboutit à un retour automatique de la préoccupation. Donnez-leur plutôt un rendez-vous à un moment que vous choisissez ! L’idée est de faire face aux problèmes, mais en décidant où et quand. Et idéalement à un moment où vous avez la possibilité d’agir. Retrouver de l’efficacité diminuera l’anxiété.

Ces boosters physiques, hormonaux et cérébraux sont vos meilleurs alliés pour faire face au stress. Selon Caroline Gayet, diététicienne nutritionniste spécialisée en phytothérapie et en aromathérapie, on choisira sa plante en fonction de nôtre âge :

  • L’éleuthérocoque, plante de l’endurance physique et du tonus intellectuel, augmentera concentration, mémoire et vigilance des ados et étudiants dans les années d’examens.
  • La rhodiola est l’alliée des trentenaires et quadras en pleine effervescence professionnelle et familiale. Elle donne peps et bonne humeur tout en améliorant la production de la fameuse dopamine, le neurotransmetteur qui agit sur l’envie d’avoir envie, la motivation, l’enthousiasme, la joie de vivre.
  • La maca péruvienne soutiendra les femmes en péri ménopause, période de stress physiologique majeur.
  • À partir de 50 ans, l’experte préconise le ginseng rouge coréen, qui travaille sur les quatre sphères essentielles : immunitaire, physique – il freine la fonte musculaire, intellectuel.

Et pour booster votre moral, conjuguez la magie adaptogène avec l’effet bonne humeur du Griffonia et du Safran (un antidépresseur naturel). Caroline Gayet, qui publie ce printemps Mon Carnet d'herboriste au fil des saisons (Ed. Leduc) conseille des cures combinées de trois semaines par mois pendant trois mois.

  • Verrouillez vos trois séances de sport par semaine

L'activité cardio d'intensité modérée pratiquée de manière régulière est aussi efficace que les anxiolytiques et les antidépresseurs. C’est ce que montre la célèbre étude publiée en 2000 par la Duke University School of Medecine.

Le contexte : des patients dépressifs sont répartis en trois groupes. Le premier groupe doit pratiquer vélo ou jogging pendant 30 minutes, 3 fois par semaine ; le second groupe suit un traitement par antidépresseurs classiques tandis que le troisième combine les deux traitements. Au bout de quatre mois, les chercheurs relèvent que l'activité physique a exactement la même efficacité que les antidépresseurs. Par ailleurs, six mois plus tard, le taux de rechute est significativement moins élevé dans le groupe "activité physique" que dans le groupe "antidépresseurs".

Le professeur de psychiatrie (Pitié-Salpêtrière) Bruno Millet Ilharreguy, auteur de l’ouvrage Les désordres du cerveau émotionnel (Odile Jacob) souligne par ailleurs que le sport aide à mieux supporter le stress : en entraînant le corps à supporter des fréquences de fonctionnement en surrégime, nous nous habituons à faire face à des situations de conflit ou à des impressions de danger.

"La pratique sportive permet également d'éliminer la tension accumulée au travail ou dans une situation affective déstabilisante", complète le spécialiste. Une bonne raison de s’acheter de nouvelles baskets. 

Cultiver la positivité pour contrer l'anxiété

  • Multipliez et amplifiez les moments feel good

Selon la chercheuse en psychologie positive Barbara L. Fredrickson, nous avons besoin de trois fois plus d’émotions positives que de négatives pour être heureux et en bonne santé.

Voilà qui tombe bien : d'après une étude menée dans différentes cultures et publiée en 2007 dans le Journal of Personality and Social Psychology, nous vivons en moyenne 3 fois plus d'événements heureux que malheureux.

Le hic ? Le cerveau est configuré pour capter et retenir plus facilement les événements négatifs. Sarah Allart, spécialiste en psychologie positive et en gestion émotionnelle, invite à dépasser ce biais de la négativité de manière proactive. Selon l’auteure de I Feel Good, 5 étapes pour activer le pouvoir des émotions positives (Ed. Larousse), la première clé est d'en avoir conscience.

"Se questionner déjà sur tout ce qui va bien permet de changer d'état d'esprit et de faire une sorte de reset", explique-t-elle. "Vous passez du mode négatif au mode positif en quelques secondes seulement".

Ses conseils : cultivez les petits plaisirs et les rituels qui nourrissent le gratitude. Exemple : listez ce qui va bien dans votre vie ; offrez-vous une "douche bienfaisante" pendant laquelle vous bichonnerez chaque partie de votre corps en lui demandant comment elle va ; plongez-vous, les yeux fermés, dans des souvenirs heureux ; amplifiez intérieurement les sensations des moments plaisirs. Savourez !

  • Passez du temps dans la nature

Une étude menée à Londres en 2015 souligne que les habitants des rues les plus arborées de la capitale consomme moins d'antidépresseurs.

Être exposé chaque jour à des plantes réduirait le stress, la colère, l'anxiété et la fatigue de 40% en 3 mois. Une bonne raison d'aller marcher en forêt pour profiter des super-pouvoirs des arbres ou de faire rentrer la nature chez soi en cultivant de belles plantes d’intérieur.

  • Cloisonnez vie perso et vie pro

Des chercheurs finlandais ont prouvé que les personnes qui mélangent régulièrement vie pro et perso (47% des actifs) ainsi que les bourreaux de travail (21% des actifs) qui n'hésitent pas à ramener leurs dossiers à la maison sont en moins bonne santé et physique et émotionnelle que les individus qui cloisonnent strictement vit pro et perso (18% des actifs) (International Journal of Stress, 2016).

Bien séparer ces deux sphères a un effet calmant, renforce la confiance en soi, améliore les relations, rend plus efficace. Le Conseil de l'experte en psychologie positive Sarah Allart : mettez en place un sas de décompression à la sortie du travail via une petite marche ou une méditation dans les transports.