Pourquoi on distingue les orgasmes clitoridiens et les orgasmes vaginaux ?

orgasme pamplemousse
Après avoir longtemps distingué deux orgasmes féminins - le clitoridien et le vaginal - certains spécialistes optent pour un seul et même pourvoyeur de plaisir : le clitoris. Ce qui a le don d’exaspérer d’autres expert(e)s qui défendent un plaisir féminin pluriel.

“Moi, je suis carrément vaginale. Mon clitoris ne fonctionne pas”. Cette phrase sort directement de la bouche de Myriam*, 36 ans, célibataire depuis plusieurs années qui tente de se réapproprier sa sexualité, après plusieurs années en couple avec un partenaire un brin égoïste. Pour Myriam, comme pour de nombreuses autres personnes, il y a deux types de femmes : celles qui prennent du plaisir quand un pénis ou un objet frictionne les parois de leur vagin aka les adeptes de l’orgasme vaginal, et celles qui atteignent l’orgasme quand on joue avec leur clitoris, soit les clitoridiennes. “Il y a aussi celles qui sont les deux à la fois, mais ce sont des superwomen”, glousse Myriam.

La dichotomie orgasmique

Mais cette dichotomie du plaisir féminin n’a rien de scientifique, bien au contraire. C’est même la résultante d’une méconnaissance globale de l’anatomie sexuelle de la femme, mêlée à l’héritage d’une vision phallocentrée et patriarcale de la sexualité hétéro. On notera par exemple qu’après été maintes fois dessiné au XVIIe siècle sur des croquis anatomiques, le clitoris a été effacé des ouvrages médicaux. Après un véritable déni de clitoris, celui-ci connaît un regain d’intérêt quand l’urologue australienne Helen O’Connel le photographie in vivo en 1998, puis en 2016, avec la première reproduction 3D de l’organe.

Et si l‘on peut se réjouir de certains effets de l’avènement du clitoris, on déplore en parallèle les raccourcis qu’il engendre. Ainsi, le pullulement des images de l’anatomie féminine sur les réseaux sociaux par exemple, montre en partie une avancée sociétale importante, mais de l’autre, véhicule l’idée que le plaisir féminin ne passerait que par le clitoris, en stimulation externe ou interne. Le vagin ne serait donc plus qu’une cavité ordinaire dénué de toute sensibilité.  

 

Pour Ovidie, réalisatrice de documentaires féministes et auteure, ces messages qui expliquent que "l'orgasme vaginal n'existe pas" posent problème, “parce que cela vient nier l'existence de ce que vivent et ressentent beaucoup de femmes, et encore une fois ça les infantilise en voulant prétendument les libérer”, explique-t-elle. Sans compter que - comme elle l’écrit dans “Libres!” (Ed. Delcourt) - “une norme en chasse une autre : avant nous ne devions jouir que par la pénétration, aujourd’hui nous ne jouissons que grâce au clitoris, je ne vois pas beaucoup de différence si ce n’est que, certes, des travaux sur la prédominance du plaisir clitoridien comme le rapport de Shere Hite de 1976 ont permis de démocratiser des pratiques non-reproductives. Accordons-lui au moins cela”.

L’orgasme féminin, un bouillonnement de plaisir

Pour Marie Bareaud, sexothérapeute nantaise**, le fait de réduire l’orgasme féminin uniquement aux pouvoirs du clitoris est une nouvelle fois, une manière de “séparer” les plaisirs. Une notion aberrante, selon elle, quand on revient au sens premier du terme “orgasme”. “Pour rappel, le mot provient directement du terme grec, “organ” qui signifie littéralement bouillonnement ardent”, rappelle-t-elle. Avant de préciser qu’anatomiquement, “les ailes du clitoris viennent toucher - ou presque - la vulve et l’entrée du vagin”. De ce fait, et en s’appuyant sur les travaux de la gynécologue et obstétricienne française Odile Buisson avec le chirurgien Pierre Foldès, qui avaient fait une échographie pendant une pénétration, Marie Bareaud explique que “la stimulation du vagin, stimule en même temps le clitoris et vice versa”.

La sexothérapeute va encore plus loin en expliquant que cette théorie préconçue influe directement sur le ressenti des femmes. “Le fait de dissocier les plaisirs intellectuellement pousse les femmes à se couper de leur ressenti”, explique-t-elle, avant de préciser que de réduire le plaisir féminin aux deux seuls entités vaginales et clitoridiennes est absurde. “Certaines femmes ressentent un plaisir intense par stimulation de l’utérus”, ajoute-t-elle par exemple. D’autres atteindront l’orgasme par stimulation de l’anus ou des tétons...

L’orgasme féminin n’est ni donc ni que vaginal ou que clitoridien, l’orgasme est pluriel. Il dépend évidemment de chaque femme, de ses ressentis et de la connaissance qu’elle a de son propre corps. Et aussi - un peu - de la personne qui va s’employer à lui procurer cet orgasme, mais là n’est pas la question. La question, c’est surtout qu’il faut sans aucun doute arrêter de mettre les femmes - et leurs orgasmes - dans des cases.  

*Le prénom changé pour préserver l’anonymat de l’intéressée, et mon amitié avec elle.

**www.mariebareaud.com

[Dossier] L'orgasme ou le summum de l’excitation - 17 articles à consulter

La Newsletter Égo

Bien-être, santé, sexualité... votre rendez-vous pour rester en forme.