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« Diane von Furstenberg. Woman in Charge », sur Disney+ : noirceurs et succès d’une créatrice de mode

Un long portrait de la femme d’affaires d’origine belge installée aux Etats-Unis revient sur une carrière et une vie de jet-setteuse qui cachent un poignant drame familial.

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Publié le 06 juillet 2024 à 14h00

Temps de Lecture 3 min.

Diane von Fürstenberg dans le documentaire « Diane von Furstenberg. Woman in Charge », de Sharmeen Obaid-Chinoy et Trish Dalton.

DISNEY+ – À LA DEMANDE – DOCUMENTAIRE

Le documentaire que consacrent Sharmeen Obaid-Chinoy et Trish Dalton à la créatrice de mode Diane von Fürstenberg (née en 1946) commence un peu comme Joan Rivers. A Piece of Work (2010), le portrait de la comique américaine (1933-2014) par Ricki Stern et Anne Sundberg : les deux femmes, qui avaient le même âge au moment des tournages de leurs films respectifs, se montrent d’abord au naturel, avant de se maquiller.

Lire la chronique (en 2014) : Dans le bureau de… Diane von Fürstenberg

Le « plâtrage » est conséquent pour Joan Rivers, en dépit (ou à cause ?) de ses nombreuses opérations de chirurgie esthétique (dont elle fit l’un des ingrédients-clés de sa légendaire autodérision) ; quelques minutes seulement pour « DVF » (son acronyme et son surnom), qui ne veut « rien effacer de sa vie » : « Les femmes ont des choses plus importantes à faire », dira un jour celle que l’on associe volontiers, par le biais d’un vêtement iconique, à leur libération.

Car la jeune Belge Diane Halfin, mariée en 1969 au prince Egon von Fürstenberg, un aristocrate allemand de la jet-set internationale, connu pour ses frasques bisexuelles – on le surnommait « First-in-Bed » –, et installée dans la foulée à New York, où elle vit toujours, se constitua vite un nom, une fortune et un statut de femme à poigne grâce à la wrap dress, appelée « robe portefeuille » en France, qu’elle conçut d’abord comme un deux-pièces inspiré par le cache-cœur des ballerines.

Une robe simple et pratique

En 1973, alors qu’elle voit à la télévision la fille de Richard Nixon porter l’un de ses modèles, haut et bas coordonnés, elle comprend qu’elle peut en faire une robe. Ce déclic transforme un succès en une réussite colossale : « DVF » fabrique 25 000 robes par semaine, qui se vendent à un prix abordable – 86 dollars de l’époque, quand le New York Magazine, qui fit alors le portrait du power couple qu’elle formait avec son mari, coûtait 75 cents.

Cette robe portefeuille simple et pratique, que les femmes de toutes conditions voudront porter, deviendra son emblème, comme le cardigan à boutons-pressions, présenté en 1979, sera celui d’Agnès B., quand bien même toutes deux ont produit d’autres vêtements au cours de leur carrière. Un autre détail les relie : elles ouvriront leurs boutiques dans des quartiers de boucherie, bien avant que ceux-ci ne deviennent des lieux « branchés ».

Comme toute success story, celle de Diane von Fürstenberg, dont la vie sentimentale et sexuelle fut trépidante, passe par un revers de fortune : à force d’être surproduite dans des imprimés à la variété infinie, la robe portefeuille finira par étouffer sous son succès et par échouer dans les rayons de soldes. « DVF » fait banqueroute et perd le contrôle de sa marque.

Mais la créatrice a toujours mis en avant le mantra qu’elle porte sur une chaîne de cou : « In charge », c’est-à-dire « responsable ». Elle se reconstruit, récupère le contrôle de ses affaires et se montre sur QVC, une chaîne de téléachat moquée par le milieu chic de la mode. Première émission : elle vend 1,4 million de tenues en deux heures. Sa carrière est relancée.

Traumatisme d’Auschwitz

Le portrait de la créatrice de vêtements est affiné par de nombreux témoignages, dont ceux des riches et célèbres – comme Oprah Winfrey (qui dut économiser à ses débuts pour une wrap dress) ou Hillary Clinton. Mais derrière le portrait de cette femme qui connut le succès le plus tonitruant s’en trouve un autre : celui de sa mère, qui conçut sa fille dix-huit mois après être revenue, ne pesant que 20 kilos, du camp d’extermination d’Auschwitz.

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L’un des moments les plus émouvants du film est celui où « DVF » raconte la grave crise de panique que vécut sa mère lorsqu’elle retourna en Allemagne, bien longtemps après sa captivité à Auschwitz. Cette dernière avait pourtant appris à sa fille, encore enfant, que « la peur est hors de question » ; mais le traumatisme était évidemment toujours là, faussement dormant.

Diane von Fürstenberg, qui vécut l’expérience d’un cancer et celle de la disparition, des suites du sida, de son ex-mari, Egon von Fürstenberg, avec qui elle était restée en bons termes après leur divorce, dit penser à la mort tous les jours, mais sans la craindre. Et le film se termine dans le parc de la propriété qu’elle partage avec son époux, Barry Diller, ancien patron des studios de la Paramount et de la Fox, dans un espace clos par un muret de pierres qu’elle présente comme son cimetière personnel : « Vous verrez, vous viendrez me rendre visite ! », lance-t-elle aux réalisatrices avec un sourire ravageur.

Diane von Fürstenberg. Woman in Charge, documentaire de Sharmeen Obaid-Chinoy et Trish Dalton (EU, 2024, 97 min). Disponible à la demande sur Disney+.

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