Vous aidez une personne à porter sa valise dans les escaliers du métro, vous faites un sourire à un.e individu.e qui semble passer une moins bonne journée que vous ou vous remontez un café à votre collègue en allant chercher le vôtre.

Si ces actions sont vite oubliées dans le tourbillon de la journée, pour celui ou celle qui a bénéficié de votre attention, ces actes de gentillesse ont un retentissement bien plus important que vous ne l'imaginez.

C’est en tout cas ce qu’argue une nouvelle étude, publiée dans le Journal of Experimental Psychology en août 2022. 

Les personnes qui accomplissent un acte de gentillesse aléatoirement ont tendance à sous-estimer à quel point le destinataire l'appréciera”, écrivent-ils, aux prémices de leurs conclusions. 

Un biais de négativité qui nous fait oublier qu’être attentionné à des bienfaits chez l'autre

Et le fait de ne pas se rendre compte de l’impact positif d’un comportement, même des plus subtils, sur la journée de l’autre, fait que nous sommes moins enclins à perpétuer ces petites attentions et donc à faire attention à ceux qui nous entourent. 

Pour le vérifier, les chercheurs américains ont fait participer leur échantillon à huit courtes expériences “dont la conception et les participants variaient.” Parmi elles : “accomplir des actes réfléchis de leur choix, comme ramener un camarade de classe à la maison, préparer des biscuits ou acheter un café à quelqu'un”. 

Après chaque expérience, les participants ont été invités à évaluer, sur une échelle de 0 à 10 à quel point l'acte de gentillesse avait été apprécié par le destinataire, et la répercussion qu’elle avait eu sur son humeur. 

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“Les personnes sous-estimaient systématiquement à quel point leurs petites attentions étaient réellement appréciées”, note Amit Kumar, Professeur de psychologie à l'Université du Texas à Austin et co-auteur de l’étude. "Ne pas connaître son impact positif peut empêcher les gens de s'engager dans ce genre d'actes de gentillesse dans la vie quotidienne", y regrette-t-il. 

“Nous avons ce biais de négativité en matière de connexion sociale. Nous ne pensons tout simplement pas que l'impact positif de nos comportements soit aussi positif qu'il ne l'est”, explique Marisa Franco, psychologue et auteure, auprès du New York Times

Des attentions qui réduisent stress et anxiété

L’idée des chercheur.ses était également de comprendre plus concrètement les effets de ces actes de gentillesse, chez le destinataire, mais également chez la personne qui en est à l'origine.

"Les gens ont tendance à penser que ce qu'ils donnent est peu, peut-être que c'est relativement sans conséquence. Mais les destinataires sont moins susceptibles de penser dans ce sens. Ils considèrent que le geste est beaucoup plus significatif car ils pensent également au fait que quelqu'un a fait quelque chose de gentil pour eux”, explicite l’étude. 

Auprès du quotidien américain, Pr Kumar rappelle que des études antérieures ont montré qu'un “comportement prosocial - essentiellement, aider volontairement les autres - peut aider à réduire le niveau de stress quotidien, et que de simples actes de connexion, comme envoyer des SMS à un ami, signifient plus que ce que beaucoup d'entre nous pensent”. 

Et au delà de faire du bien au moral de l’autre, ces petites actions sont aussi bénéfiques pour celui ou celle qui en est à l’origine.

“Dans la dépression et de l'anxiété on retrouve des sentiments d'impuissance et de désespoir. Pratiquer des actes de gentillesse nous fait nous sentir utiles, optimistes, efficaces et renforce l'estime de soi”, expliquait, en 2020, la psychologue Hoorie Siddique auprès de Very Well Mind

“Notre cerveau est connecté à notre corps. Dans ces situations, il existe des preuves scientifiques d'une augmentation de l'ocytocine, ce qui a des bénéfices sur notre santé physique, comme une tension artérielle basse et la dilatation des vaisseaux sanguins, ce qui améliore finalement notre santé cardiovasculaire”, complétait, de son côté, la thérapeute Rachel Slick.

Nous sommes moins gentils, par peur d'être jugés

Si les chercheur.ses espèrent que leurs travaux aideront les personnes à embrasser la gentillesse, ils notent que nombreux sont ceux qui pensent qu’en faire la preuve n’est pas forcément positif. 

"Les gens désirent la gentillesse mais se sentent souvent gênés par l'idée d'être gentils. Le stress peut également empêcher les gens d'être gentils avec les autres, à cause de la petite voix de jugement dans la tête des gens qui les amène à se demander si leur geste ou leur cadeau sera mal interprété, ou s'il incitera le destinataire à rendre la pareille. Lorsque l'impulsion de gentillesse surgit, nous y pensons totalement trop", regrette Tara Cousineau, psychologue clinicienne, au micro du New York Times.

Alors, si vous n'avez pas déjà l'habitude d'accomplir des actes de gentilles aléatoirement la spécialiste conseille de d'abord réfléchir à ce que vous aimez faire. "Il ne s'agit pas de vous dire: 'je dois apprendre à faire des cookies pour être gentil et les donner ensuite', mais plus de 'comment puis-je user de mes atouts pour le bien des autres ?", conseille-t-elle.