On a parcouru le chemin, on a tenu la distance, mais en enchaînant les détours… On n’est pas beaucoup plus avancés qu’une demi heure avant. Ce scénario, je le connais. Je fais partie des grandes oubliées du sens de l’orientation. Mon cauchemar récurrent ? Me perdre dans un supermarché et ne jamais réussir à trouver la sortie.

La bonne fée de l’orientation a-t-elle tout simplement oublié de se pencher sur mon berceau ? Suis-je condamnée à demander mon chemin à des touristes dans mon propre quartier ? Apparemment, non. Le sens de l’orientation serait en partie inné… mais on pourrait le développer.

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Qu’est-ce le sens de l’orientation ?

Par définition, le sens de l’orientation désigne l’aptitude qui permet de trouver son chemin ou de se diriger d’un point de l’espace à un autre. Jusqu’ici, c’est plutôt raisonnable. Au-delà du “simple” fait de lire un plan ou de savoir utiliser une boussole (autrement dit, pour moi : toute une aventure), le sens de l’orientation désigne la capacité à traiter différentes informations. 

Celles-ci allant de l’analyse de l’environnement extérieur (repères, gestion de l’espace) à la connaissance de notre propre corps (déplacements, vitesse). C’est la mise en corrélation de ces différents paramètres qui permettent à l’être humain d’appréhender son sens de l’orientation. 

Compte tenu de ces éléments, je pense avoir environ 50 % des capacités nécessaires pour m’orienter dans l’espace - ce qui explique mes fréquents accrochages avec les tables basses et autres pièces de mobilier. Pas incroyable, mais pas désespéré. 

La zone du cerveau de l’orientation isolée

Des chercheurs de l’Université Norvégienne de Sciences et Technologie ont déterminé - grâce à une étude dont les résultats ont été publiés en 2015 - que, physiologiquement, le “sens de l’orientation” se trouvait dans l’hippocampe, une “zone du cerveau liée aux points cardinaux et à la logique spatiale”. 

Pour ce faire, ils avaient demandé à 18 hommes et 18 femmes de s’orienter dans un labyrinthe virtuel et ce sont les hommes - plus prompts à utiliser leur hippocampe selon les chercheurs - qui avaient mieux réussi ledit test. 

Maintenant que je sais que mon inaptitude à trouver la médiathèque de ma ville (je doute sérieusement de son existence) est due à une partie bien précise du cerveau : je rationalise. Si Neville Londubat a réussi à détruire un horcruxe, je peux réussir à améliorer mon sens de l’orientation.

Peut-on travailler et améliorer son sens de l’orientation ?

Ayant grandi dans un village d’une centaine d’habitants - animaux de compagnie inclus -, je me déplaçais principalement en voiture : pas franchement besoin d’avoir le sens de l’orientation pour ça. Pour aller à l’école ? C’était simple : “On suit la route des aiguilles de pin et on tourne à gauche du petit rocher plat, à côté de l’arbre”. Ceci expliquant l’atrophie évidente de mon hippocampe. 

Peut être que je n’ai donc jamais réellement appris à m’orienter sans aide magique de mon smartphone. Pour me réapproprier ce talent de scout, il va falloir sortir de ma zone de confort. Bye bye utilisation quasi systématique du GPS. Je me prends en main, j'arrête de compter sur les autres pour m’escorter d’un point A à un point B, et je me lance des défis. 

Premier défi : rentrer chez moi, en cassant mes habitudes. Il est en effet recommandé d’utiliser des chemins différents pour rentrer chez soi. On peut aussi participer à des jeux de piste et des courses d’orientation. Et surtout : il est important de se donner le droit et le temps de se tromper. 

Car après tout, ce n’est pas si dramatique de se perdre, tant qu’on est pas au milieu du Grand Canyon à 3 h du matin, sans eau et sans réseau. 

Le sens de l’orientation a-t-il un sexe ?

Parmi les idées reçues qui entourent le “sens de l’orientation”, celle qui ressort le plus est qu’il serait l’apanage des hommes. Et la dernière étude menée par les chercheurs norvégiens abordée plus haut va clairement dans ce sens. Vous avez l’impression d’entendre un dicton sur “les femmes au volant” ? Nous n’en sommes pas si loin.

Les scientifiques ont longtemps pensé que la testostérone était la clé de l’orientation (rien que ça). Mais cette croyance vieille d’une cinquantaine d’année n’est plus d’actualité. En 2015, Catherine Vidal, neurobiologiste à l'Institut Pasteur assurait dans Sciences et Avenir2 que le sens de l’orientation est aussi dû à notre éducation, notre contexte social, bref : nos expériences. 

La morale de cette histoire ? C’est en cherchant son chemin régulièrement qu’on développe son sens de l'orientation. Et croyez moi, si je ne suis pas un cas désespéré : vous ne l’êtes pas non plus. C’est donc, gonflée à bloc, que j’irai à mon dîner de ce soir sans utiliser mon GPS. Moi, la route, mon hippocampe et Céline Dion dans les oreilles me rassurant : “J’irais où tu iras.”

Etude en neurosciences de l'Université College London publiée dans la revue scientifique britannique Current Biology
Article publié dans Sciences et Avenir en 2015, "Non, les hommes n'ont pas un meilleur sens de l'orientation que les femmes".