C'est un comportement que les chercheurs en psychologie Jacqueline Patmore et Barry Farber qualifient de "contre-productif". Auteur.es d'une étude mesurant la place du mensonge en thérapie, leurs conclusions ont été publiées dans la revue Taylor & Francis Online, le 28 septembre 2022

Les scientifiques ont en effet noté une tendance à cacher des choses à son psy - notamment les problèmes d'alimentation et d'image corporelle - et ont cherché à connaître les causes et les effets de la non divulgation de ces derniers. 

"La plupart des répondants ne percevaient pas que leur non divulgation affectait négativement leur thérapie", révèlent-ils, au début de leur étude. 

Les troubles du comportements alimentaires et les problèmes d'image corporelle "majoritairement cachés"

Pour observer le phénomène, les deux chercheurs ont constitué un échantillon de 45 personnes "qui avaient des troubles du comportement alimentaire ou d'image corporelle, mais qui avaient menti ou dissimulé ces difficultés pendant la thérapie", précise la thérapeute Alli Spotts-De Lazzer pour Psychology Today

A noter que ces personnes avaient été suivies en parcours "long", durant en moyenne un an, à raison de trois séances par mois. 

"Ils ont fourni des informations sur leurs motivations et les conséquences perçues de leur malhonnêteté à propos de ces problèmes", explicitent les scientifiques. 

Résultats, Jacqueline Patmore et Barry Farber ont pu identifier les "raisons" à ces mensonges : la honte, mais aussi le "désir de parler d'autres difficultés cliniques"

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La honte comme barrière à la vérité 

"La honte s'est avérée être la raison de non-divulgation la plus souvent invoquée, en particulier la honte du corps, la honte du comportement pathologique et la honte du jugement anticipé du thérapeute", confirme l'étude. 

Mais les conclusions font également référence à une angoisse concernant des "interventions non-souhaitées, telles que le retour en milieu hospitalier, l'arrêt d'un traitement ou la résolution d'une pathologie alimentaire, via un suivi nutritionniste". "Ces interventions non désirées ont tendance à donner l'impression d'être contrôlée ou rejetée par la personne qui les reçoit", explicite Alli Spotts-De Lazzer. 

Aussi, parmi les raisons évoquées par les patient.es, le "désir de parler d'autres difficultés cliniques". En effet, l'étude rapporte que 69% des personnes interrogées souffraient également de dépression, ou d'anxiété pour 53% d'entre elles.

Ce besoin de parler de problèmes autres que l'alimentation et l'image corporelle résiderait aussi, selon la spécialiste de Psychology Today, dans l'idée que si ces troubles dépressifs et/ou anxieux sont adressés et soulagés, ils entraîneraient automatiquement la fin des problématiques liées au corps. 

Des mensonges inconscients vus comme inoffensifs 

Ainsi, les scientifiques arguent que, dans la plupart des cas, les personnes "n'abordaient pas" les problèmes, plutôt que "mentaient" à leur sujet.

"La plupart des répondants ne percevaient pas que leur non-divulgation affectait négativement leur thérapie", notamment parce que les troubles de l'alimentation ou rapportant à l'image du corps sont vus comme moins graves et plus honteux.  

"Bien que mentir ou omettre des choses en thérapie puisse sembler contre-productif, il y a généralement de bonnes raisons à cela. Les gens ont l'impression d'être en échec en raison de leur incapacité réelle ou perçue à s'adapter à des normes universelles (corps minces). Ils se culpabilisent souvent. Il n'est pas étonnant que les problèmes d'alimentation et d'image corporelle soient évités ou mentis dans la salle de thérapie", commente Alli Spotts-De Lazzer.