Célibataires, elles ont choisi de faire un bébé toute seule

Par Anne-Laure Pineau
mère solo célibataire choix
Dans une société qui a tendance à stigmatiser les mères célibataires, certaines femmes décident tout de même de faire des bébés toutes seules. Même si la loi est avec elles, désormais, leur combat reste ardu dans un pays où le modèle familial dominant est le couple de parents.

En septembre 2021, maniant bien l’art de l’anticipation, le collectif des mères isolées interpellait les futur.e.s candidat.e.s à l’élection présidentielle sur la situation de précarité des femmes élevant seules leurs enfants.

Dans une tribune parue dans Libération, il rappelait des données de l’INSEE datant de 2020 : une famille sur 4 est monoparentale et dans plus de 80% des cas, les enfants sont à la charge des femmes, bien plus exposées à la précarité que les pères célibataires (22% des enfants en famille monoparentale avec leur père sont pauvres en 2018, contre 45 % pour les enfants vivant avec leur mère).

Vidéo du jour

Celles qui se considèrent comme "les grandes oubliées de la République" souffrent en effet d’un déficit d’image et d’un paternalisme sociétal. En février 2021, les mères célibataires avaient été exclues de l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, finalement votée en juillet 2021 : "Même s’il s’agit d’une monoparentalité choisie et non subie, l’accès de la PMA aux femmes seules soulève de nombreuses interrogations au regard de la plus grande vulnérabilité dans laquelle est placée une personne seule dans l’éducation d’un enfant", estimait alors le sénateur Dominique de Legge (LR).

Mère-solo, une vie complète

Heureusement, certaines femmes ont décidé de prendre la parole ces derniers mois. Fières de leurs choix, elles apportent un son de cloche positif et joyeux à ce brouhaha patriarcal.

Dans son livre Si je veux, paru chez Grasset, la journaliste Johanna Luyssen livre un témoignage à la fois drôle et poignant sur son choix d’avoir fait un enfant seule. Un choix d’abord par défaut, mais qui est devenu chemin vers l’émancipation totale envers sa construction personnelle, la société patriarcale et les tragédies familiales.

“La maternité sans homme est une possibilité parmi d’autres. (...) Nous pouvons créer d’autres modèles”, écrit-elle pour encourager les personnes voulant faire famille envers et contre tous les modèles écrasants.

Je fais mes choix, je gère nos vies seules et ma charge mentale n’implique pas de gérer un homme en plus du reste.

Son livre, c’est un coup de pied dans la fourmilière : “la société est hypocrite avec les mères célibataires : elles sont à la fois des victimes que l’on plaint, et des épouvantails ; elles sont celles qu’il ne faut surtout pas devenir”, nous dit-elle.

La posture de la journaliste n’est pas de l’ordre de l’angélisme, elle raconte une vie pas toute rose : la difficulté des démarches, ses rapports avec les hommes, les donneurs potentiels, les amants évanescents. Mais elle raconte aussi qu’elle ne la changerait pour rien au monde : “je fais mes choix, je gère nos vies seules et ma charge mentale n’implique pas de gérer un homme en plus du reste”.

Avec son témoignage, disponible en librairie, Johanna Luyssen veut mettre la société face à la réalité : oui, en 2022, les femmes peuvent faire des choix sans l’aval ou l’accompagnement (souvent défaillant) des hommes. “La société veut que ça reste silencieux et moi je veux faire du bruit. Qu’on ne nous parle pas d’anomalie, d’étape en attendant de se caser, nous ne sommes pas en stand-by, nos vies sont déjà complètes”.

Une famille choisie, un village et un enfant

Aline Mayard avance aussi main dans la main avec son bébé. Bouleverser les modèles dominant n’est pas nouveau pour cette militante de la visibilité asexuelle et non-binaire qui témoigne régulièrement sur les réseaux sociaux.

Après avoir pensé à la co-parentalité, un modèle avec deux parents célibataires, elle a finalement penché pour la PMA en Espagne.

Célibataire dans l’âme, Aline veut être parent depuis toujours. “Quand j’avais 22 ou 23 ans, j’avais rencontré en auberge de jeunesse une femme prof avec sa fille de 7 ans, elles voyageaient ensembles. Je me suis vue en elles, je me suis dis, tu peux le faire : cette femme ne se doute pas de ce qu’elle m’a fait”. 

Nous ne sommes jamais considérées dans les livres de maternité, dans les formulaires de crèche, les cours de yoga prénatal, dans les parcours médicaux ou administratifs.

Même si elle a la chance d’être privilégiée socialement, elle a dû déconstruire beaucoup d’appréhensions héritées du discours dominant. “Tout le monde dit qu’être parent seul c’est dire adieu à la liberté, c’est forcément la galère, c’est vrai pour beaucoup. Mais j’ai vu aussi des personnes qui se débrouillent bien dans leur vie”.

Aline s’est construit autours d’elle un réseau d’amis-nounous qu’elle n’hésite pas à solliciter : “j’ai des lits parapluie partout, j’ai forcément plus de place à donner à mes amis et ma famille, qui ont répondu à mes questions m’ont soutenu.e pour ma PMA, ont été là pour ma fausse couche. C’est important aussi de montrer qu’on ne peut pas tout faire toute seule” . 

Quatre mois après la naissance de son enfant, Aline est plus que jamais droite dans ses bottes : “nous ne sommes jamais considérées dans les livres de maternité, dans les formulaires de crèche, les cours de yoga prénatal, dans les parcours médicaux ou administratifs. Nous n’avons aucune représentation positive dans les médias. La société ne fait rien pour que l’on vive bien notre choix”.

Mais Aline Mayard, comme Johanna Luyssen et leurs compagnes de route, n’est pas du genre à baisser les bras : “aujourd’hui je suis tellement à l’aise avec mon choix que rien ne peut me toucher”.

[Dossier] Avoir un enfant ou pas : un choix de vie trop longtemps commenté - 6 articles à consulter

La Newsletter Égo

Bien-être, santé, sexualité... votre rendez-vous pour rester en forme.

Les avis des internautes

Tous les avis

De anonyme
Perso, je l'ai fait à Barelone. Mon fils est magnifique, le quotidien pas plus difficile que pour mes amis en duo. Il est très facile de juger, j'en ai entendu de toutes les couleurs enceinte; à présent, voyant ma toute petite famille, pas mal de personnes ont changées d'avis. D'ailleurs, je compte le refaire et ce toujours en solo, mon fils aura un/e vrai/e petit/e frère/soeur. J'ai réservé le sperme du même donneur. Entre nous, certains duos autour de moi n'ont pu donner un vrai frère ou soeur à leur enfant car ils s'étaient séparés entre temps. Au moins mes enfants ne subitont pas de divorce/séparation. Alors aux biens pensants: qu'est-ce qui est mieux? N'avoir qu'un seul géniteur ou les voir se déchirer? La réponse est qu'il n'y a pas de solution parfaite ou plutôt chacun a sa solution parfaite.
De anonyme
Je comprends que c'est juste une opinion subjective, mais... Ça irrite quoi! Merci bien pour donner tous les clichés ici. "Vieille fille", "plus de 37 ans", "personne ne leur à pas dite clairement"... Comme si les femmes célibataires sont les créatures intellectuellement inférieures à celles qui sont dans un couple. Certaines ont choisi l'escalier professionnel, certaines ont des mauvaises histoires d'amour. Tout peut arriver dans notre vie. Mais ce n'est pas la raison de rester seule ou malheureuse. Si la science actuelle permet d'avoir l'enfant à une femme célibataire c'est bien! Il existe plusieurs raisons pour le favoriser. Tout premièrement pour augmenter le niveau des femmes heureuses, simplement. L'autre raison bien globale est de stoper le vieillissement de la population en Europe. Bien sur, il existe plusieurs spécificités psychologiques d'élever son enfant en solo... Mais soyons honnêtes, les couples classiques ont besoin d'aide non moins que les femmes célibataires. Donc je pense que les femmes célibataires doivent avoir le droit au fiv et fiv don. Malheureusement aujourd'hui en France s'est interdit. Les solos girls et couples lesbiennes partent à l'étranger. Les centres pma de Belgique, Espagne, Ukraine accueillent ces clientes en grand nombre. Il n'y a pas longtemps, les médias ont été bouleversé par le scandale des quadruplés accouchés par une Allemande de 65 ans. C'est énorme, mais en Ukraine il n'y a pas de la limite d'âge pour fiv.
De anonyme
Ben moi je trouve ca bien car pour ma part si j ai personne c est a cause de la jalousie des femmes et copains de mes exs. Je sais au moins qu elles finiront seules un jour ou qu elles doivent etre mal aimees..car j en ai vu passer des hommes qui m ont confie ne pas etre heureux et chercher ailleues ce que ces femmes la leur offre pas. Donc avoir des enfants malgres toute leur tentative pour faire de ma vie un enfer de solitude a coup de ragot et decredibilisation malsaine sera pour moi un vrai bonheur..merci la science pour cela.