"Je ne pouvais pas avoir d'enfant, et pourtant..."

Par Alix Leduc
femme enceinte collage
Ces femmes ont tout tenté pour avoir des enfants, en refusant les lois de la nature qui empêchaient leur désir de maternité. Et elles l'ont fait. Témoignages.

Parfois la Nature rentre en conflit avec le désir profond d'être mère. Récits de femmes qui ont tout fait pour devenir maman.  

Sylvie, 42 ans, mère après six FIV : "J'avais besoin d'avoir des enfants pour me sentir entière"

C’est une spécialiste de la fertilité qui m’a annoncé, à 36 ans, ma "ménopause précoce" et m’a asséné sans une once de compassion : "Vous n’aurez jamais d’enfant". Puis elle a évoqué les deux possibilités qui me restaient : l’adoption et le don d’ovocytes, dont je n’avais jamais entendu parler. Je me suis effondrée, submergée d’un seul coup par mon désir d’enfant. Ma vie perdait tout son sens si je ne pouvais pas être mère.

Avec mon compagnon, on s’est d’abord tournés vers l’adoption. Mais, très vite, cela m’a semblé être une punition ! Trop long, trop cher et trop intrusif… Lors de l’interrogatoire psy, je n’avais pas du tout envie d’évoquer la mort de ma mère, je ne voyais pas le rapport avec mon projet de devenir maman. Et puis, surtout, c’est là que j’ai eu un déclic : j’avais besoin de porter cet enfant pour me sentir mère. J’ai pris mon premier rendez-vous au Cecos1 de Montpellier. J’avais déjà 38 ans. On m’a demandé de venir avec une donneuse d’ovocytes car, sinon, l’attente était de quatre ans. Mais dans mon entourage, personne ne correspondait au profil : être déjà mère, âgée de moins de 37 ans et avoir un statut sérologique satisfaisant.

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On m’a alors conseillé d’aller à l’étranger. Il ne fallait plus perdre de temps. J’ai fait ma première FIV à 39 ans, à Barcelone. Je suis tombée enceinte mais j’ai fait une fausse couche à neuf semaines. Je n’ai pas voulu de curetage, j’ai eu besoin de le sentir partir, ce bébé… On était anéantis, mais rien ne pouvait plus m’arrêter. Les deux FIV suivantes ont également échoué. J’étais mal, très mal. Mon conjoint était triste, bien sûr, mais pas autant. C’est un parcours qui isole.

Nous sommes partis en République Tchèque, dans une clinique où le don d’ovocytes coûte 3900 € et où tout se déroule en une semaine. Les deux premières tentatives se sont soldées par des échecs. J’ai pris un traitement pour améliorer ma mauvaise vascularisation. Des doses de cheval car, à l’étranger, les cliniques mettent toutes les chances de leur côté. J’étais mal dans mon corps. J’avais la peur au ventre en permanence, alors que j’avais bien conscience du côté irrationnel de cette peur. Il ne s’agissait tout de même pas d’une maladie grave… Avec mon conjoint, nous avons décidé que ce serait le dernier essai. Cela devenait trop douloureux. Et financièrement, on ne pouvait plus suivre. Cette dernière tentative a été la bonne : à 40 ans, j’étais enceinte d’un garçon et d’une fille ! Tous nos efforts étaient récompensés non par un, mais par deux miracles.

Aujourd’hui, je suis comblée. J’avais besoin d’avoir des enfants pour me sentir "entière". 

Charlotte, 30 ans, mère d’un garçon né par mère porteuse : "Je ne porterais jamais d’enfant"

Stérile. Le couperet est tombé alors que je n’avais que 18 ans : utérus quasi inexistant, je ne porterais jamais d’enfant. Je n’avais même pas eu le temps de ressentir un désir d’enfant que, déjà, on m’annonçait mon incapacité à en avoir. Je me demandais quelle femme je pouvais bien être et j’étais persuadée de ne pas valoir le coup d’être aimée… J’ai entamé une thérapie.

Quand, à 25 ans, j’ai rencontré mon amoureux, j’ai très vite décidé de tout lui dire. Il a été formidable et m’a répondu qu’on trouverait des solutions. En fait, il n’y en avait qu’une : la gestation pour autrui. Car ni l’un ni l’autre ne voulions adopter. On ne se sentait pas les épaules d’accueillir un enfant qui avait un passé. On désirait un enfant à nous, le voir naître, grandir. Un enfant qui nous ressemble. Dans mon malheur, j’avais la chance d’avoir des ovaires fonctionnels. Quand le corps vous interdit d’avoir un enfant, soit vous vous laissez manger, soit, au contraire, vous vous sentez plus fort que la nature. Et même la loi.  

Ce n’est pas une revanche sur la vie, c’est une victoire sur la maladie

En septembre 2009, on rencontrait notre "nounou", au Canada. Cette femme exceptionnelle qui allait porter notre enfant pendant neuf mois. Lorsque la première tentative a échoué, ça a été terrible. Avec mon ami, on ne s’est pas parlé pendant une semaine. On n’arrêtait pas de pleurer. Et moi, je culpabilisais, je me reprochais la mauvaise qualité de mes ovocytes… Je crois que je mélangeais tout, ma tristesse, ma culpabilité et l’énorme somme d’argent (45 000 € au final : actes médicaux, compensation de la nounou, voyages, frais juridiques…) qui était en jeu. Heureusement notre couple est solide, et nos proches nous ont bien soutenus. La seconde tentative a été la bonne.

Faire appel à une mère porteuse est une autre manière de porter un enfant. Je l’ai accompagné, en le voyant grandir dans le ventre de la nounou, en le sentant bouger, en lui parlant. C’est moi qui ai coupé le cordon lorsqu’il est venu au monde, un geste symbolique. Après l’accouchement, j’ai pleuré pendant des semaines tellement tout me paraissait beau. Ce n’est pas une revanche sur la vie, c’est une victoire sur la maladie. J’avais besoin d’aller plus loin que le diagnostic de stérilité. 

Mon fils a 2 mois aujourd'hui. Je le regarde, je l’écoute respirer : c’est un miracle. 

Mona, 44 ans, mère d’une fille grâce à un don de sperme anonyme : "J'ai voulu tout assumer seule"

J'avais toujours pensé que je reproduirais le schéma familial, façon famille Ricoré. Mais je voulais prendre le temps de savourer ma jeunesse. Sauf qu’à 41 ans, j’aurais donné n’importe quoi pour ne pas avoir perdu tant d’années et d’illusions dans des relations tordues. Je me suis réveillée en même temps que mon désir d’enfant. 

Écœurée des hommes, je me sentais aussi distante de mes copines, toutes mamans d’adolescents avec lesquels moi, la trois-fois-marraine, je les laissais enfin se dépatouiller. J’avais entendu parler de ces femmes célibataires qui partent se faire inséminer clandestinement à l’étranger. A 41 ans, je n’avais plus le temps, ni de me juger, ni d’en vouloir à mes ex. Moi qui suis d’un naturel très lent, je me suis révélée soudain très active, fonceuse et efficace. Après plusieurs nuits à surfer sur le Net et à échanger sur les chats spécialisés, j’ai opté pour une clinique à Bruxelles, où j’ai pris rendez-vous. Je ne me suis pas démontée devant les délais d’attente. Je n’ai parlé de mon projet à personne, je voulais tout assumer.

Ces allers-retours sordides, voyageuse anonyme portant un lourd secret… Mais c’était le prix à payer

Avec le recul, je réalise que j’agissais déjà comme une mère protectrice. Ce qui ne m’a pas empêchée de craquer aux échecs des trois premières inséminations ! J’ai très mal vécu ces mois de silence, de mensonges et, surtout, de solitude. Ces allers-retours sordides, voyageuse anonyme portant un lourd secret… Mais c’était le prix à payer.

Je suis tombée enceinte de ma fille à la quatrième insémination. Quand je l’ai appris, j’ai refusé d’exulter : à 42 ans, le risque de fausse couche est un trouble-fête de taille. Mais les jours passaient et rien de grave n’arrivait. Quand mon ventre a commencé à s’arrondir, j’ai raconté à mon cercle le plus proche mon parcours de maman solo. Pour les autres, j’ai inventé un amour de vacances qui avait mal tourné mais qui m’avait offert le plus beau des cadeaux. Du point de vue "médical", ma grossesse s’est très bien passée. Mais c’est vers le cinquième mois que toutes les questions taboues m’ont soudain assaillie.

Alors que ma fille tambourinait dans mon ventre, j’imaginais déjà les reproches qu’elle pourrait me faire.

Maintenant que ma fille est là, même s’il m’arrive encore de culpabiliser, je me rassure en me disant que je l’aime pour deux. 

1Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains.

[Dossier] Avoir un enfant ou pas : un choix de vie trop longtemps commenté - 6 articles à consulter

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Les avis des internautes

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De anonyme
merci, je pensais que personne ne nous comprenait, mais celles qui n'auront jamais d'enfant (peut etre moi) comment allons nous vivre une fois le vedict tombé, continuer pour lui et puis ??? cela n'enlève pas ces silences le soir, et nos larmes sur l'oreiller. vous avez raison toutes mais l'intérêt des enfants n'est il pas qu'ils soient heureux auprès de parents biologique ou par adoption !!! un enfant pourquoi ??? pour lui proposer autre chose que la prostitution en Inde, d'école au lieu de travailler dans des décharges... lors de voyages nous fument choquer de les voir aussi travailleurs mais parfois heureux et je le reconnais certains sont heureux auprès de leur mère et frère... c'est leur vie... mais pour ceux sans parents DONNONS leur cette chance auprès de NOUS qui ne pouvons en avoir naturellement.
De anonyme
Pourquoi blâmez-vous? Il y a des mères qui ne devraient pas avoir d'enfant et hélas en ont, ce n'est pas le cas pour elles.
De anonyme
Ce que je ne comprends pas, c'est le fait de se sentir "plus femme" parce qu'elles ont des enfants, être femme c'est beaucoup d'autres choses!
De anonyme
C'est vous qui n'êtes pas tolérents. Vous ne pouvez pas vous mettre à la place d'une femme qui a un désire énorme d'être maman et qui souffre de ne pouvoir donner la vie. Heureusement qu'aujourd'hui il y a la possiblité de porter son enfant grâce à des dons ! Et l'étranger est bien plus ouvert qu'en France (y a qu'à voir vos commentaires).Peut-être vous préférez les femmes qui font des enfants naturellement à tout va et qui les maltraites ou ne les éduque pas par la suite car elles n'ont pas la fibre maternelle et assez d'amour à donner !
Oui alors effectivement vous auriez besoin d'humanisme Mesdames !
De anonyme
Completement barrée pourquoi ?
Beaucoup de femmes ne se sentent plus femme si elles ne peuvent plus ou pas avoir d'enfant, et il y a des détresses terribles...
Ce n'était pas mon cas, "seulement" un projet de couple, les fiv en france (5) puis une en espagne a Grenade, réussie du premier coup ! j'ai une petite fille de 4 ans, formidable, qui est le soleil de ma vie et me donne le courage d'avance meme si je suis aujourd'hui dans une situation difficile.
Un peu de tolérance et d'humanisme, aller vers les autres pour les comprendre, comprendre que l'on peut être différent... parce que la vie ne nous a pas fait tous et toutes pareils.... c'est un minimum...
L'empathie, vous connaissez ?