Dans le monde merveilleux de la publicité, leur richesse en sels minéraux promet de diminuer les risques de carences. « Le siècle dernier, les eaux minérales étaient prescrites par les médecins, qui en conseillent encore aujourd’hui certaines en cure » explique le Dr Estrade, urologue spécialisé dans la récidive des calculs rénaux à l’hôpital d’Angoulême.

Une eau gagne cette appellation quand l’Académie de médecine juge qu’elle possède une quantité totale de minéraux – ce qu’on appelle le résidu sec - bénéfique.

Eau minérale : savoir décrypter les étiquettes

Longtemps considérées comme des "eaux médicaments", les eaux minérales doivent être consommées avec discernement. Selon le Dr Vincent Estrade, qui plaide pour une sensibilisation accrue à l’art de boire équilibré, il est donc essentiel de se pencher régulièrement sur quelques lignes de l’étiquette des bouteilles. À vos lunettes !

  • Le facteur Calcium (Ca)

Une eau est dite riche en calcium quand elle présente une concentration de ce composant supérieure à 120 mg par litre. Elle peut aider les femmes qui ne consomment pas assez de produits laitiers, notamment à des périodes cruciales comme la grossesse ou la ménopause. Elle peut notamment être salutaire dans les cas d’ostéoporose.

"On évalue les apports équilibrés en calcium entre 800 mg à 1 g par jour", précise le Dr Estrade. "Si vous aimez beaucoup les laitages, choisissez une eau pauvre en calcium. Et inversement."

  • Le facteur Sodium (Na)

Une eau dite riche en sodium (Na) en contient plus de 360 mg par litre. Elle facilite la digestion et le maintien d’une bonne hydratation du corps.

"Une alimentation trop salée entraîne une diminution des capacités des reins à réabsorber correctement le calcium présent dans l'urine. La quantité de calcium dans l'urine augmente. Le risque de calcul également", alerte l’urologue. Modérez votre consommation de sel en veillant à ne pas dépasser 8 g de sel par jour, nourriture et boisson confondues.

  • Le facteur bicarbonate de sodium (NaHCO3)

Une eau est considérée riche en bicarbonates quand elle en affiche plus de 600 mg de par litre. Très présent dans les eaux pétillantes, ce précieux composant permet de réduire l’acidité de l’organisme (donc recommandé chez les sportifs), améliore l’hydratation et diminue la fatigue musculaire.

Ces eaux peuvent aussi être bénéfiques pour les personnes qui souffrent de diabète ou d’un syndrome métabolique – cet état d’insulino-résistance qui précède le diabète.

En alcalinisant les urines (traduisez : leur ph devient neutre, entre 6,5 et 7), l’eau favorise également la dilution des calculs d’acide urique (environ 15% d’entre eux). Le bémol : ces eaux-là sont aussi riches en sel, ce qui risque d’induire des problèmes de tension artérielle et d’insuffisance cardiaque. On évite donc de les boire au long cours ! Une eau peut contenir jusqu’à 1,2 g de sel par litre… ça va vite.

  • Le facteur magnésium (Mg)

C’est probablement l’élément dont le grand public est le plus conscient. Une eau est dite "riche en magnésium" si elle en contient plus de 56 mg par litre. Réputé soulager la fatigue passagère et le stress, le graal de la bonne humeur et du bon transit n’est toutefois pas inoffensif. S’il aide à lutter contre la constipation, il peut aussi déclencher des diarrhées et des spasmes intestinaux, voire dérégler l’assimilation de précieux nutriments.

Panacher les eaux minérales pour un meilleur équilibre

En bref, les eaux minérales ne sont pas anodines et ne doivent pas être consommées les yeux fermés. Pour les utiliser à bon escient et éviter des troubles du fait d’une minéralisation mal équilibrée, la micro nutritionniste Valérie Espinasse conseille de les panacher, d’en changer souvent et bien sûr de boire abondamment.

Les personnes concernées par les calculs rénaux (10 à 12% de la population française) doivent choisir des eaux faiblement minéralisées, complète le Dr Estrade. Référent du comité Lithiase de l'Association française d'urologie, il leur recommande de boire suffisamment pour uriner un minimum de 2 L par 24h afin de diluer les urines et diminuer le risque de cristallisation.

Pour cette population à risque, mieux vaut éviter les eaux minérales, trop riches, au profit de l’eau de ville, que l’on peut alterner avec certaines eaux de source. "La réglementation impose que l’eau du robinet ne contienne pas plus de 150 mg de calcium et 15 mg de sel par litre. C’est une bonne garantie de neutralité. Elle est potable, équilibrée en fluor, sulfates, magnésium ou autres nitrates et très régulièrement contrôlée", argumente l’urologue.

Et l'eau de ville dans tout ça ?

"L’eau de ville est une excellente boisson au long cours", affirme le Dr Estrade. Le calcaire ? "Il entartre les canalisations mais pas l’organisme", rectifie le praticien.

Son petit goût chloré? "Il vient du fait qu’elle est nettoyée à l’origine, pour éliminer tout germe microbien, mais elle ne perd pas pour autant sa composition minérale et ionique."

Quant à la pollution des nappes phréatiques, le médecin pointe une problématique globale : les études révèlent de plus en plus la présence de pollution dans les eaux en bouteille, minérales et de source confondues. "Au sens toxique, l’eau du robinet est vérifiée très régulièrement, de manière proportionnelle au nombre d’habitants de la ville concernée". A fortiori, l’eau de Paris est la plus contrôlée en France.