Même durant votre pause déjeuner, vous ne pouvez vous empêcher de zieuter vos mails ou d'accélérer les coups de fourchette pour vous remettre au travail au plus vite ? Si un sentiment de culpabilité et des angoisses vous envahissent lorsque vous êtes loin de votre ordinateur, vous souffrez sûrement d'une paranoïa de la productivité

"Les collaborateurs passent du temps à 'prouver' qu’ils travaillent en envoyant des emails tard la nuit, en apparaissant dans des meetings pour simplement dire bonjour et au revoir, en changeant fréquemment leurs statuts Teams, en disant à tous sur quoi ils travaillent… Du temps perdu et contreproductif passé à prouver qu’on est bien présent et qu’on bosse", illustre IT for Business.

Paranoïa de la productivité, ou la culpabilité de ne jamais travailler assez

Depuis la pandémie de Covid-19, la productivité est devenue le maître-mot dans le monde professionnel : “les attentes dans les environnements de travail sont désormais très élevées", commente Kate Ibbotson, coach en productivité et psychothérapeute, à Stylist UK

Ce dont témoignent les résultats de l'enquête Microsoft Work Trend Index Pulse (2022), où l'on peut lire que "85% des managers se disent sceptiques quant à la productivité de leurs collaborateurs", notamment depuis la généralisation du travail hybride. 

Un sentiment qui nourrit la culpabilité des employé.es et qui se traduit par des comportements délétères à notre bien-être. "Il n'y a plus de place dans les emplois du temps pour permettre le repos", appuie l’experte en productivité Karen Eyre-White. 

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Pourquoi cette productivité obsessionnelle est-elle problématique ? 

Un désir de prouver qu’on travaille assez, qui devient contre-productif. "Ces signaux de productivité, comme regarder constamment notre boîte de réception ou répondre instantanément aux messages, ne nous aident pas vraiment à faire notre travail ; au lieu de cela, ils nous privent du temps nécessaire pour nous concentrer”, explique Karen Eyre-White. 

Car ce diktat de la productivité nous fait perdre confiance en nous et nous pousse à travailler jusqu'à l'épuisement. "Être productif demande du travail, de l'organisation, de la discipline et des habitudes quotidiennes, mais comme nous sommes humains et sujets à des changements d'énergie et de santé, il est inévitable que les choses ne se passent pas toujours comme prévu", rappelle Kate Ibbotson.

En nous punissant inconsciemment de ne pas travailler assez dur, de faire une pause de quelques minutes pour reposer notre esprit surchargé, nous agissons contre notre bien-être professionnel et personnel. Un cercle vicieux qui peut mener au burn out, qui touche 2,5 millions de salarié.es français.es, d'après un baromètre publié en 2022.

De l'importance de marquer des pauses dans sa journée de travail

Surtout que la science a montré, à de nombreuses reprises, que s’accorder des breaks, même de très courte durée, était bénéfique à notre santé mentale et à notre productivité. Une étude, publiée en août 2022 dans la revue Plos One, avait révélé que des micro-pauses de seulement 10 minutes étaient salvatrices. 

Les chercheurs avaient dévoilé “l'efficacité des micro-pauses pour améliorer le bien-être (vigueur et fatigue) et la performance” des salarié.es. “En particulier pour les tâches de bureau (tâches de routine) ou créatives (où une pensée divergente est nécessaire), prendre de courtes pauses aide les individus à mieux performer lors des tâches ultérieures”, avaient-ils souligné.

"Même si la culpabilité n’a pas d'influence directe sur le travail, elle en aura indirectement. Elle nous obligera à nous donner plus dans le travail, à travailler plus pour compenser. Et ces heures en plus vont nous fatiguer, nous rendre irritables puis abîmer nos relations avec les collègues et la hiérarchie, et donc nous rendre moins performant.es", avait alerté le psychologue du travail Sébastien Hof, auprès de Marie Claire