"Inceste, que justice soit faite", édifiant documentaire sur le long combat des victimes d'inceste

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Ce documentaire suit les affaires d'Emelyne, Céline, Christelle et Lily (dont le prénom a été modifié). Des années de souffrance, puis de tunnel judiciaire, où le mal n'est pas toujours reconnu.

Le documentaire Inceste, que justice soit faite, est rediffusé ce mardi 9 mars 2021 sur France 5, à 20h50, après une première diffusion en 2019.

Entre-temps, l'affaire Olivier Duhamel a ravivé le débat autour de l'inceste, de même que l'étude de l'association Face à l'inceste estimant qu'un Français sur dix était victime d'inceste, créant une vague de témoignages avec le mot-clé #MeTooInceste, et une réforme législative en cours sur le seuil de non-consentement à 18 ans.

À la rencontre de quatre victimes d'inceste

Audrey Gloaguen, la réalisatrice, est partie à la rencontre de quatre victimes d'inceste, aux âges très différents : la petite Lily, dont le prénom a été modifié pour garantir son anonymat, Emelyne, jeune pré-ado, et les adultes Christelle et Céline.

C'est comme si je lançais une bombe atomique à travers notre vie. 

L'inceste, une douleur et une sidération sans nom, dont il est souvent très difficile de parler, que ce soit à son entourage ou à la police. Émeline, violée par son grand-père par alliance, s'est tue pendant six ans : "C'est comme si je lançais une bombe atomique à travers notre vie", raconte l'adolescente, qui a réussi à faire face à son violeur au tribunal. Le procès s'est tenu aux assises, et non en correctionnelle, sur insistance de sa mère. L'homme a écopé de huit ans de prison. 

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Parole contre parole

Céline, de son côté, a mis trente ans à oser parler. Elle n'a pas été pleinement soutenue par sa famille. Âgée de 39 ans, elle a été violée par son père entre ses 4 et 7 ans. Quelques jours avant le tournage, sa plainte avait été classée sans suite. "On a l'impression d'être jugé. C'est sa parole contre la mienne. S'il y a un classement sans suite, c'est qu'on l'a cru, lui, et pas moi", regrette Céline, qui ne parvient pas à travailler. 

S'il y a un classement sans suite, c'est qu'on l'a cru, lui, et pas moi.

Dans l'un des moments les plus perturbants du documentaire, on apprend ainsi que la mère de Céline, même à ce jour, a encore "des doutes" sur ces accusations visant l'homme dont elle est séparée, mais qui reste son "grand amour, en dépit de tout". "Parfois, j'aurais préféré qu'elle ne dise rien", avoue-t-elle. 

Des procédures interminables

Le documentaire d'Audrey Gloaguen montre bien l'enfer de devoir non seulement vivre avec un traumatisme profond, mais aussi, en convaincre la justice, souvent sans preuves.

Christelle, violée par son père de ses 6 à 15 ans, a dû faire face à sept années de procédure. "Je ne sais pas si on peut être un jour reconstruite, mais j'ai l'intime conviction que la reconnaissance de la justice est un pilier important de cette construction", défend cette ancienne directrice financière du Conseil régional du Centre, dont l'affaire prend enfin un terme pendant le tournage.

La reconnaissance de la justice est un pilier important de cette construction.

On suit également, avec beaucoup d'appréhension, le combat mené par Maé au nom de sa fille Lily, abusée par un homme de leur famille. L'anxiété de la petite fille est très forte à l'idée de devoir raconter ce qu'elle a subi, et d'être interrogée par l'avocate de la partie adverse. 80% des poursuites pour inceste sont classées sans suite, faute de preuves.

Inceste, que justice soit faite, d'Audrey Gloaguen, France 5, mardi 9 mars, 20h50

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