Benoît Jacquot et Jacques Doillon ont été convoqués à la Brigade de protection de mineurs de Paris, dans la matinée du lundi 1er juillet 2024 et placés en garde à vue.

Les gardes à vue des réalisateurs, accusés de violences sexuelles par plusieurs actrices dont Judith Godrèche, se poursuivent ce mardi 2 juillet, indique Le Parisien.

"Atteinte à la présomption d'innocence" selon les avocates de Benoît Jacquot et Jacques Doillon

Les deux hommes, qui contestent ces accusations, se sont rendus à la Direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) à Paris, accompagnés de leurs avocates. Ces dernières dénoncent auprès de l'Agence France-Presse (AFP) des "atteintes à la présomption d'innocence" de leurs clients. Me Julia Minkowski, qui défend Benoît Jacquot, qualifie cette garde à vue de "critiquable". "Une audition libre aurait dû être décidée", estime-t-elle.

"Aucun des critères légaux ne saurait justifier cette mesure" de garde à vue "trente-six ans" après les faits dénoncés par Judith Godrèche, réagit Me Marie Dosé, avocate Jacques Doillon, qui ajoute que ce dernier "aurait dû être entendu dans le cadre d’une audition libre au vu de l’ancienneté des faits, de leur prescription acquise depuis plus de deux décennies, et de l’inéluctable classement sans suite qui clôturera cette enquête".

Judith Godrèche réagit à une possible confrontation

Selon des sources proches du dossier interrogées par l'AFP, ces gardes à vue pourraient permettre des confrontations entre les cinéastes et certaines de leurs accusatrices.

"Je ne sais pas si j’ai la force mais je l’aurai. Je l’aurai, je l’aurai." - Judith Godrèche

"Je pleure, écrit lundi 1er juillet Judith Godrèche en story Instagram (publication éphémère, désormais non disponible). Je ne sais pas si j’ai la force mais je l’aurai. Je l’aurai, je l’aurai", assure-t-elle.

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Rappel des accusations

La comédienne et réalisatrice de l'autofiction Icon of French cinema, dans lequel elle évoquait l'emprise de Benoît Jacquot, de 25 ans son aîné, exercé sur elle lorsqu'elle était mineure, et du court métrage sur les violences sexuelles Moi aussi, a déposé plainte le 6 février 2024 contre Benoît Jacquot pour "viols avec violences sur mineur de moins de 15 ans commis par personne ayant autorité, viol, violences par concubin et agression sexuelle sur mineur de plus de 15 ans par personne ayant autorité", déclenchant l'ouverture d'une enquête préliminaire.

Le visage du nouveau et retentissant #MeToo du cinéma français, a aussi porté plainte contre Jacques Doillon. Elle l'accuse de l'avoir agressée sexuellement en marge et sur le tournage-même de son film "Elle avait 15 ans". L'âge de Judith Godrèche à l'époque des faits qu'elle dénonce.

Les figures de la Nouvelle Vagues sont aussi, toutes deux, accusés par Isild Le Besco. 

Fin mai dernier, quelques semaines après la parution de son témoignage Dire vrai (Denoël), dans lequel elle évoque pour la première fois la relation d'emprise dont elle fut victime, l'actrice a déposé plainte contre le réalisateur Benoît Jacquot pour viol sur mineur de plus de quinze ans et viol, pour des faits qui auraient été commis entre 1998 et 2007. Isild Le Besco avait 16 ans lorsqu’ils se sont connus, lui, 52. 

L'actrice et scénariste Julia Roy a également déposé plainte contre le réalisateur pour agression sexuelle dans "un contexte de violences et de contrainte morale qui a duré plusieurs années", rappelle Le Parisien. Dans une dense enquête du journal Le Monde, publié le 8 février dernier, Vahina Giocante et Laurence Cordier dénonçaient aussi le comportement d’un homme qui a profité de sa position de pouvoir pour exercer sur elles une véritable emprise.

Toujours dans Le Monde, Anna Mouglalis et Isild le Besco témoignent à leur tour contre Jacques Doillon. La première décrit une agression sexuelle qui se serait déroulée en 2011 : "Il m'a embrassée de force et je l'ai repoussée."

La seconde confie que le réalisateur l’aurait évincé du film Carrément à l’ouest, en 2000. La comédienne, alors âgée de 18 ans, avait effectué plusieurs essais au domicile du réalisateur. "Mais lorsque j’ai refusé de coucher avec lui, il m’a retiré du projet, et a donné le rôle à sa fille (Lou Doillon, ndlr), affirme-t-elle. C’était assez subtil, dans le non-dit."