Alzheimer : les signes avant-coureurs qui doivent alerter

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Chaque année, on recense plus d'1 million de nouveaux malades d'Alzheimer en France. Selon les médecins, un dépistage précoce pourrait aider les patients à freiner l'évolution des symptômes. Voici les signes avant-coureurs qui doivent alerter.

Chaque année, près d'1 million de Français sont touchés par la maladie d'Alzheimer. En 2020, cela représentait 8% des plus de 65 ans, d'après la Fondation Vaincre Alzheimer. "Après 65 ans, elle concerne environ deux fois plus de femmes que d’hommes", ajoute le ministère de la Santé.

Insidieuse, cette maladie neurodégénérative est souvent - à tort - réduite à des troubles de la mémoire, si bien que les autres signes avant-coureurs peuvent être négligés par les proches du, ou de la malade. Jusqu'à retarder dangereusement le diagnostic.

Publiée le 23 février 2022 dans la revue scientifique The Lancet Digital Health, une étude franco-britannique de l’Institut du Cerveau a isolé dix pathologies fréquentes chez les malades d'Alzheimer, et concomitantes au développement de celle-ci.

Souvent "pour signer une maladie d'Alzheimer, il faut que les troubles de la fonction cognitives aient un retentissement dans l’autonomie de la personne. Mais si l'on veut permettre un diagnostic précoce, il faut s'inquiéter même si la personne est encore autonome", informe le Dr Véronique Vergès-Cousin, gériatre à la M2A centre et en consultation mémoire à l'hôpital Broca (Paris).

En effet : "Un problème de mémoire n’est pas forcément une maladie d’Alzheimer et une maladie d’Alzheimer n’est pas qu’un problème de mémoire".

D’après les scientifiques, considérer ces affections pourrait notamment permettre de prévenir le développement de la maladie jusqu’à 15 ans en amont. 

La perte de mémoire : l'un des troubles cognitifs

Causée par une association de lésions neuropathologiques cérébrales, la prévalence de la maladie d'Alzheimer augmente "exponentiellement entre 65 et 85 ans et double environ tous les 5 ans", note le ministère de la Santé.

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A partir d'un certain âge, les pertes de mémoire peuvent devenir fréquentes, et mal jugées par les patients et leurs proches. "Ce n'est pas parce qu’on est âgé qu’on perd la mémoire, ce n'est pas normal d'avoir des troubles de la mémoire avec des oublis importants et répétitifs. En effet le vieillissement physiologique entraîne peu de modifications des fonctions cognitives hormis un fléchissement des capacités attentionnelles, se persuader du contraire les empêche d'aller au diagnostic.", prévient la gériatre.

Et c'est d'ailleurs le premier signe relevé par les chercheurs de l'Institut du cerveau. Après avoir étudié le lien possible entre l’apparition de la maladie et 123 pathologies particulières, les chercheurs ont pu isoler 10 signes - dont la perte de mémoire - apparus jusqu’à 15 ans avant le diagnostic.

"Ce sont des oublis importants et répétés, pas simplement un trouble attentionnel. La personne commence par exemple à oublier de venir à ses rendez-vous. C'est d'ailleurs pour leur trouble de la mémoire que les personnes viennent consulter en premier lieu", détaille le Dr Verges-Cousin.

D'après elle, il ne s'agit d'ailleurs pas seulement de pertes de mémoire mais cette perte est associée à un ensemble de troubles des fonctions cognitives relevant aussi de la gestuelle, du langage, du visuo-spatial et ces troubles ont un retentissement sur l’autonomie du patient. C’est souvent sur l’autonomie dite  "instrumentale". "Je demande toujours aux patients depuis combien de temps ils n'ont pas payé leurs impôts » ou « si cela est plus difficile pour eux de gérer leurs factures".

Une maladie d'Alzheimer peut aussi se manifester par une difficulté à s'exprimer, régler des problèmes, juger d'une situation, perdre la notion des dates, des saisons et du temps qui passe, indique l'Alzheimer's Association. 

Les troubles comportementaux : parmi les premiers signes de la maladie

Parmi les autres pathologies identifiées dans l'étude du Lancet, “le trouble dépressif majeur” figurait en haut du classement, suivie par l’anxiété, l’exposition à un stress important. 

Selon la gériatre, ces troubles comportements peuvent être liés à la perte de capacité cognitives observées par les patients. "Les gens sentent qu'ils oublient alors ça les déprime et cette déprime entraine un manque d’attention qui majore les troubles de la mémoire. Une étude a montré que dans 50% des cas, la dépression survenait 2 ans avant le diagnostic et 6 mois pour l'anxiété"

Des troubles de l'humeur pouvant aussi résulter d’un repli social que l’on retrouve dans 40%, 3 ans avant la pose du diagnostic. Les personnes arrêtent des activités qu’elles aimaient faire (bridge, golf, cours de gym ou de danse …)

Dans les autres troubles du comportement, les malades peuvent montrer des signes de persécution, souvent appelé "crise de paranoïa" par les familles, pouvant mener à des conflits familiaux soudains", ajoute le Dr Vergès-Cousin. Une étude de 2007 a même démontré qu'une personne avec un degré élevé d'isolement avait un risque de maladie d'Alzheimer doublé par rapport à une personne avec un faible degré d'isolement.

Selon l'experte de la mémoire, il est nécessaire de traiter la dépression dès que les premiers signes apparaissent, afin de ne pas compliquer encore la vie du patient avec Alzheimer et altérer les résultats au moment du dépistage car la dépression peut donner des troubles attentionnels qui perturbent à tort les tests de mémoire.

Apnée du sommeil, perte d'audition, chutes, perte de poids ... d'autres signes avant-coureurs à considérer

Selon les chercheurs de l'étude franco-britannique, d'autres symptômes telles que la perte d’audition, la constipation, la spondylarthrose cervicale (dégénérescence des os du cou, ndlr), la fatigue (et les malaises), les chutes et les pertes de poids soudaines font figure de signes avant-coureur de la maladie d'Alzheimer.

Au sujet de la perte auditive, la gériatre précise : "Une perte d’audition entraîne un repli sur soi, ce qui favorise la dépression et diminue les interactions sociales. Cela peut donc apparaître comme un facteur aggravant ou précipitant". 

Quant à la fatigue, pouvant entraîner des malaises, elle pourrait aussi faire suite à des apnées du sommeil répétées, note la spécialiste. "Ces apnées entraînent des troubles de la mémoire. Cela peut être anticipé 10 à 15 ans avant le diagnostic".

Pour l'auteur principal de l’étude du Lancet, le post-doctorant Thomas Nedelec, les résultats de cette expérience sont d’autant plus intéressants qu’ils ont permis de “confirmer des associations connues comme les problèmes d’audition ou la dépression”, mais aussi d’attirer plus d’attention vers d’autres plus inédites telles que la spondylarthrose ou la constipation

Déceler les signes au plus tôt pour gagner en autonomie plus tard

D'évolution plus ou moins lente selon l'âge des malades, la maladie d'Alzheimer ne se guérit pas encore. D'après la gériatre, identifier les symptômes au plus tôt pourra permettre de maximiser l'autonomie jusqu'à ce que la maladie ait atteint son stade avancé.

"Comme il n'y a pas de traitement, les gens se demandent pourquoi aller se faire diagnostiquer. Alors que c'est le contraire : compte-tenu de l’absence de traitement curatif le diagnostic précoce est le seul moyen de ralentir l’évolution de la maladie, la perte d’autonomie et ainsi d’améliorer la qualité de vie des malades et de leurs proches", assure-t-elle.

En se focalisant sur chaque signe et en apportant une stimulation cognitive et un accompagnement du patient et de son entourage, la progression de la maladie pourrait potentiellement être ralentie

Selon les chiffres relayées par la Fondation Recherche Alzheimer, 40% des cas de maladies d’Alzheimer pourraient être évités grâce à une prévention adaptée et la prise en compte de certains facteurs de risque modifiables. 

Plus de 100 000 cas de démence recensés aux États-Unis auraient pu être évités, si on avait porté notre attention sur la qualité de la vue des patients”, pouvait-on lire dans une étude publiée juin 2022 dans la revue scientifique JAMA Neurology.

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