Entre 13 000 et 20 000 nouvelles personnes sont atteintes chaque année en France d’un cancer de la vessie, selon l’Association Française d’Urologie (AFU). Ces tumeurs peuvent être dévastatrices dès qu’elles s’infiltrent dans la paroi de la vessie ou émettent des métastases susceptibles de se répandre dans tout le corps, d’où l’importance d’un dépistage le plus précoce possible.

Quand le cancer est pris à temps, le taux de survie à cinq ans est en effet supérieur à 90 %, alors qu’il peut chuter sous la barre des 50 % lorsqu’il est détecté plus tard. En cas de doute, mieux vaut donc consulter rapidement, surtout si on est fumeur - ou ex-fumeur - dans la mesure où le tabagisme compte parmi les principaux facteurs de risque. 

Les signes d’alerte d'un cancer de la vessie

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La présence de sang visible dans les urines est le premier symptôme le plus fréquent. On le retrouve chez 80 à 90 % des patients. D’autres signaux, moins spécifiques, peuvent également être évocateurs d’un cancer de la vessie, comme des troubles de la miction (envie d’uriner très fréquente), des infections urinaires fréquentes ou des douleurs dans le bas ventre.

Ces signes d’alarme doivent être pris au sérieux car "plus un cancer de la vessie est repéré et traité tôt, mieux il se soigne", souligne le Pr Yann Neuzillet, chirurgien urologue à l’hôpital Foch (Suresnes) et secrétaire général de l’AFU. Les risques de séquelles - urinaires et sexuelles - seront également moindres et les chances de survie accrues.

Pourquoi les femmes sont-elles diagnostiquées avec retard ?

De fortes inégalités de genre persistent face au cancer de la vessie : la prise en charge des femmes est souvent plus tardive, faute d’avoir été dépistées à temps. Dès l’apparition des premiers symptômes, 78% de la gente masculine est vite orientée vers un urologue, contre seulement 55 % de la gente féminine, selon une étude américaine publiée dans le Journal of Urology.

Lorsqu’une femme évoque du sang dans ses urines, son médecin traitant pense presque toujours à une cystite. Il lui prescrit un ECBU (recherche de germes dans les urines) assorti si besoin d’un traitement antibiotique. Il en est de même du pharmacien qui lui délivre volontiers un antibiotique en dose unique. Résultat : 16 % des femmes atteintes d’un cancer vésical reçoivent au moins trois traitements antibiotiques pour infection urinaire avant de consulter un urologue, comparé à 4 % des hommes.

Les infections urinaires sont certes plus fréquentes chez les femmes en raison de leur anatomie (urètre plus court). Mais "ce n’est pas parce qu’on a du sang dans les urines qu’on a forcément une infection urinaire, affirme le Dr Géraldine Pignot, chirurgien urologue à l’Institut Paoli Calmettes de Marseille. De la même manière, ce n’est pas parce qu’on a une infection urinaire que l’on n’est pas atteint d’un cancer de la vessie". Il faut toujours éliminer le pire scénario.

En d’autres termes, "une femme qui présente du sang dans les urines doit réaliser un bilan urologique complet, même si elle fait des infections à répétition", estime le Dr Pignot. 

Cancer de la vessie : quels examens réaliser ?

Pour effectuer le diagnostic, l’urologue prescrit généralement une cytologie du frottis urinaire - réalisée en laboratoire sur des échantillons d’urine -, parfois une échographie et une cystoscopie (ou fibroscopie vésicale).

"La cystoscopie est un examen indispensable, mais il n’est pas idéal car invasif et onéreux, précise le Pr Neuzillet. Quant à la cytologie urinaire, on l’utilise faute de mieux car sa sensibilité est faible. Elle ne permet pas de repérer tous les cancers". Les lésions de bas grade (cancers débutants) peuvent passer inaperçues.

Pour pallier ce déficit, un test de diagnostic couplé à une intelligence artificielle permettant d’éviter les faux négatifs (Visiocyt®) a été développé, mais il n’est pas encore utilisé par tous les laboratoires. Une réelle avancée pour un diagnostic initial mais aussi et surtout pour le suivi régulier de patient.es traité.es.

De nouveaux traitements efficaces

La prise en charge débute systématiquement par l’ablation chirurgicale de la tumeur. Lors de cette intervention réalisée sous anesthésie régionale, la lésion est prélevée avec un petit fragment du muscle de la vessie. Les deux échantillons sont ensuite étudiés en laboratoire afin de préciser la nature et de déterminer la gravité du cancer (son grade et son stade).

Après la chirurgie, les cancers débutants non infiltrants (80% des cas) ne nécessitent pas d’autres traitements, mais ils doivent être surveillés étroitement - examens tous les 6 mois puis tous les ans - pour prendre de cours les récidives éventuelles. Ceux à plus haut risque réclament quant à eux des traitements plus poussés par chimiothérapie et/ou immunothérapie.

Les cancers métastasiques (5 % des cas) étaient il y a peu de temps encore très difficiles à soigner. L’espérance de vie des patient.es se comptaient en mois plutôt qu’en années. Mais la donne vient de changer grâce à l’essor des thérapies ciblées.

Une étude clinique présentée fin octobre 2023 lors du dernier congrès européen de cancérologie (Esmo) atteste que la combinaison d’une immunothérapie (le pembrolizumab) et d’une chimiothérapie couplée à un anticorps dirigé contre une protéine présente à la surface de la tumeur améliore grandement le pronostic et réduit de moitié le risque de décès. Près de 70 % des patient.es répondent au traitement. Une avancée majeure pour les personnes diagnostiquées trop tardivement.