Jeremy Allen White : entretien avec l'acteur de «The Bear», devenu incontournable à Hollywood

« Ma mère me tient au courant de ce qui se raconte sur Twitter, c’est plutôt rigolo. »
Haut et pantalon Ferragamo Boots Alessandro Vasini Montre Omega Bagues Bulgari  et David Yurman
Haut et pantalon Ferragamo Boots Alessandro Vasini Montre Omega Bagues Bulgari (main droite) et David Yurman (main gauche)Steven Klein pour Vanity Fair

« Oui chef. » Après dix ans passés à incarner Phillip Gallagher dans la série culte Shameless, ces deux petits mots ont hissé notre homme au faîte de la gloire. Son interprétation du chef cuisinier Carmy dans la série FX The Bear lui a en effet valu de rafler deux Golden Globes et un Prix de la critique. La saison deux, qui s’apprête à sortir, a aiguisé l’appétit des fans du monde entier. Depuis, l’acteur, qui apparaît sur la couverture de notre numéro consacré à la jeune garde d’Hollywood, a tourné le film de science-fiction Fingernails pour Apple TV, et incarnera prochainement le catcheur Kerry Von Erich dans le film The Iron Claw aux côtés de Zac Efron. 

Votre carrière ressemble un peu à celle du personnage de Carmy dans The Bear. Rien ne garantissait le succès de la série lors du tournage de la première saison, mais la deuxième suscite énormément d’attentes, tout comme le nouveau restaurant que s’apprête à ouvrir Carmy. Comment vous expliquez-vous ce phénomène ?
C’est très agréable, mais c’est vrai que j’aborde le tournage de la deuxième saison avec un peu plus d’appréhension, car les gens plaquent beaucoup d’interprétations sur notre série. Quand on lit trop de critiques, on a l’impression que ce qui n’était qu’une petite chose qu’on faisait entre nous est devenu un énorme machin. J’ai bon espoir qu’on puisse laisser de côté le bruit du monde pour se concentrer. 

Sur les réseaux sociaux, dès qu’une nouvelle image de vous paraît, que ce soit une photo du tournage de The Bear ou d’un shoot, il y a beaucoup de commentaires enthousiastes et elle se retrouve très vite détournée en mème. Qu’est-ce que ça vous fait ?
Je n’y prête pas trop d’attention. Ma mère me tient au courant de ce qui se raconte sur Twitter, c’est plutôt rigolo. Je suis acteur depuis que j’ai 18 ans. J’ai joué dans la série Shameless pendant 11 ans. On a eu beaucoup de succès, mais on me remarquait beaucoup moins qu’aujourd’hui. J'ai eu de la chance que cela se soit produit de façon si progressive, parce que ça m’a laissé le temps de prendre mes marques. Je n'envie pas les jeunes acteurs ou les personnes inexpérimentées qui se retrouvent du jour au lendemain sous les spotlights, ça peut-être une expérience assez vertigineuse. Ça aurait certainement été plus difficile pour moi si j’étais célibataire et que je n’avais pas d’enfants [l’acteur a deux filles, Ezer et Dolores, avec sa compagne Addison Timlin] ou plus simplement si j’étais plus jeune et crétin. Si on n’a pas des bases solides en dehors de sa carrière, on peut vivre une existence très solitaire. 

Haut et pantalon Ferragamo Boots Alessandro Vasini Montre Omega Bagues Bulgari (main droite) et David Yurman (main gauche)

PHOTOGRAPH BY STEVEN KLEIN; STYLED BY PATTI WILSON.

Ces réflexions jouent-elles un rôle dans votre approche des réseaux sociaux : est-ce que c’est déterminant dans ce que vous choisissez de rendre public ou, au contraire, de garder privé auprès de ceux qui vous suivent ?
Je n’ai pas une relation très réfléchie aux réseaux sociaux. C’est assez effrayant. Il m’est arrivé de partager des photos de mes filles avant de me dire « peut-être que je n’aurais pas dû » puis de me raviser en mode « mais en même temps je suis trop fier d’elles ». Ça fait des vagues comme ça, sans cesse. J’en suis arrivé à la conclusion que ces outils devraient être utilisés essentiellement pour soutenir mes amis et leurs projets incroyables, ou promouvoir mon travail. Au-delà de ça, je suis un peu perdu quant à l’image de moi-même que je suis censé renvoyer, donc je reste simple.

J’imagine qu’aller dîner au restaurant n’a plus exactement la même saveur depuis The Bear. Est-ce que vous y allez autant qu’avant et avec le même plaisir ? 
J’y vais à la même fréquence. Depuis la sortie de la série, je n’ai pas beaucoup eu le temps de poser mes valises chez moi. J’ai beaucoup mangé la nourriture du room service des hôtels où je descendais. Quand on tournait The Iron Claw à Baton Rouge (Louisiane), il y avait 10 restaurants à quelques pas de mon appartement. Je suis allé manger dans chacun d’entre eux, et tout le monde a été adorable avec moi. C’est même allé jusqu’au point où, si je n’allais pas manger chez l’un d’entre eux pendant un certain temps, le personnel appelait un autre restaurant pour leur dire : « Jeremy est venu chez vous trois fois, dites-lui de revenir un peu chez nous. » J’ai eu vraiment l’impression d’être choyé par les gens du métier. C’est plutôt facile d’obtenir une réservation et tout le monde me chouchoute. 

À la fois pour The Bear et pour Iron Claw vous avez dû apprendre à incarner des métiers très différents, avec un répertoire de gestes très précis. Est-ce que vous aimez la part de métamorphose et de mimétisme de votre travail ? 
Le but c’est de réussir à être crédible, tout en sortant de soi-même. Pour Iron Claw, on a tous suivi un régime alimentaire très riche et on s’est énormément entraînés. J’avais des extensions dans mes cheveux, et on portait ces tenues effroyablement moulantes tout le temps. On est en plein dans l’univers du catch. Donc quand on arrive et que le moteur tourne, on se sent assez extérieur à soi-même. Avec The Bear, c’est un peu différent. Ce qui m’a beaucoup aidé, c’était d’apprendre son savoir-faire. Je pensais tout le temps à mon personnage, et je me suis plongé dans son art. 

Qui sont vos héros du cinéma ? Est-ce que, suite à The Bear, vous avez reçu des éloges de figures particulièrement importantes pour vous ? 
Oui, j'ai reçu un email très gentil de Dustin Hoffman, qui est l’un de mes acteurs préférés de tous les temps. C’était un de ces moments où on se pince pour s’assurer qu’on ne rêve pas. Je suis en train d’essayer d’organiser une rencontre pour mon retour à Los Angeles. Ensuite, il y a Sean Penn, qui est également un de mes acteurs favoris et que j’ai rencontré à plusieurs reprises, sans pouvoir lui témoigner de mon admiration en bonne et due forme.

Comme votre personnage de Carmy, vous êtes tatoué. Si vous deviez faire un tatouage particulier pour symboliser cette année, à quoi ressemblerait-il ?
Honnêtement, je crois que les tatouages, c’est fini pour moi. J’ai passé tellement de temps au maquillage cette année à cause de ça. Si je devais me faire un tatouage, ce serait quelque chose en l’honneur de mon personnage de Philip Gallagher que j’ai incarné 11 ans. Une période à laquelle j’oublie trop souvent de déclarer ma flamme et qui mériterait bien un bout de peau. 

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Cet entretien a été édité et condensé pour plus de clarté.