À 21 ans, Marine Barnérias apprend qu'elle est atteinte d'une sclérose en plaques (SEP), une pathologie neurologique incurable qui touche le système nerveux central. Ses conséquences, à plus ou moins long terme : des engourdissements des membres, une mauvaise coordination des mouvements ou encore une perte de la vue. Des symptômes qui se manifestent par ce qu'on appelle des poussées, à l'intensité variable, qui peuvent apparaître sans prévenir.

Une annonce vécue comme un électrochoc par la jeune femme qui, au lieu de prendre les traitements recommandés par le corps médical, décide d'entamer un long voyage qui l'amène à parcourir trois pays dans lesquels elle souhaite apprendre à mieux se connaître, à s'écouter et à reprendre confiance en elle.

En 2017, elle publiait un livre, Seper Hero. Cinq ans plus tard, elle adapte celui-ci à l'écran avec "Rosy", un film-documentaire inspirant, diffusé dans les salles de cinéma depuis le 5 janvier 2022.

"Mon premier réflexe a été de taper ‘SEP’, sur Internet. Il ne faut jamais faire ça"

Avril 2015 : Marine est étudiante en école de commerce à Marseille. Jeune femme très investie dans le milieu associatif de son école, elle est en charge de l’organisation d’un événement sportif.

Véritable boule d'énergie, elle court partout, sans s'arrêter une seconde. Mais au cours de la journée, ses yeux la lâchent. Happée par la ferveur collective, elle n’écoute pas les signaux que lui envoie son corps : "À ce moment je ne m’écoutais pas du tout. Je n’étais pas dans l’esprit analytique." À la fin de la journée elle est épuisée et sa vue continue de baisser. "Le lendemain je me réveille et c’est encore pire. Ensuite, tout a été crescendo", se remémore-t-elle. 

Crédit : Marine Barnérias

Vidéo du jour

Inquiète, la jeune femme consulte un ophtalmologue qui lui ordonne de se rendre le plus vite possible aux urgences. Après des examens, elle est hospitalisée, sans même savoir pourquoi. "Je ne comprenais pas ce qui se passait. Je me posais pleins de questions et je sentais l’anxiété qui montait. J’étais super loin. Je ne m’attendais pas à me retrouver à l'hôpital. Je suis passée par deux atmosphères contraires en quelques instants : il y avait les couleurs, le mouvement et là je me retrouvais dans un endroit où tout était blanc, il n’y avait plus rien."

Mon premier réflexe a été de taper ce mot, 'SEP', sur Internet. Il ne faut jamais, mais vraiment jamais faire ça.

Le diagnostic tombe : c’est une sclérose en plaques. Marine vient de faire sa première poussée. "L’annonce a été très violente et c’était très compliqué psychologiquement. Mon premier réflexe a été de taper ce mot, ‘SEP’, sur Internet. Et il ne faut jamais, mais vraiment jamais faire ça : aller sur les réseaux sociaux, lire les témoignages ou aller sur les sites des associations. On y voit le pire et on se dit ‘C’est comme ça que je vais devenir ?’ À partir de là, on rentre dans un tsunami de mauvaises comparaisons", regrette Marine.

Un traitement ? Non merci

On lui propose alors des traitements. Beaucoup. Mais la jeune femme ne se retrouve pas du tout dans le discours des neurologues et déplore un lien patient-médecin "inexistant" : "Il y a un vrai échange à avoir et je ne l’ai pas eu. La manière dont on m’a présenté les choses n’a pas été adaptée. J’étais dans le rejet de la maladie, donc dans le rejet d’un traitement aussi", analyse-t-elle.

J’étais dans le rejet de la maladie, donc dans le rejet d’un traitement aussi.

"Avant de prendre une ‘chose extérieure’ à moi je me suis posée la question de savoir si j’étais bien avec moi-même. J’étais intimement convaincue qu’il fallait que je règle certaines choses et que mon premier traitement serait celui-là : être bien avec moi", poursuit la jeune femme. 

Crédit : Seper Hero / Facebook

Seper Hero : partir à l'aventure pour se (re)trouver

Après une deuxième poussée, trois mots lui viennent à l’esprit : "Corps", "Esprit",  "Âme". Trois mots qui vont être à la base de son projet baptisé "Seper Hero". C’est alors le début d’un périple initiatique pour partir à la découverte d’elle-même.

Crédit : Seper Hero / Facebook

Marine décide de partir en Nouvelle-Zélande pour redécouvrir son corps, en Birmanie pour nourrir son esprit par la méditation et en Mongolie pour partir à la rencontre de son âme. "Il s’agissait de trois pays dans lesquels je rêvais d’aller et qui correspondaient chacun à un thème pour moi", précise-t-elle.  

Simplement équipée d'un sac à dos, d'une tente et de bonnes chaussures de marche, Marine part à l'aventure. Un parcours fait de rencontres, mais aussi de moments de solitude qui la poussent à trouver des réponses aux nombreuses questions qu'elle se pose.

Sa meilleure alliée ? La nature. "Elle a été l’un des piliers de mon traitement et m’a procuré des émotions comme jamais je n’ai eu. Je pense qu’elle a tout pour nous aider. Elle nous parle, nous guide, nous met sur de puissants chemins", nous confie t-elle.

"Rosy", un surnom donné à la maladie pour en finir avec la peur

Au cours de son voyage en Nouvelle-Zélande, la jeune aventurière décide de donner un surnom à sa maladie. Une façon pour elle d’en finir avec le mot SEP qui lui colle à la peau : "Il me paralysait de l’intérieur et m’empêchait d’avancer."

Il me paralysait de l’intérieur et m’empêchait d’avancer.

Elle décide donc de l’appeler "Rosy": "Ça a été un tournant psychologique et ce surnom lui donnait un nouveau sens. Je commençais à trouver ma maladie stylée (rires). On repartait sur de nouvelles aventures ensemble et à ce moment-là j’étais en phase d’acceptation."

Accepter la "colocation" avec la sclérose en plaques

Ces dernières années, la "sclérosy" de Marine ne s’est pas manifestée. "Aujourd’hui je pète la forme ! La maladie est là, elle fait partie de moi, mais on fait une bonne colocation."

Crédit : Seper Hero / Facebook

L’après ? Elle n’y pense pas et souhaite juste vivre le moment présent, sans jamais rien s’interdire : "Je m’écoute tout le temps pour tout ce que j’ai envie de faire. Un intrus est entré dans ma vie mais c’est lui qui doit s’adapter à moi et pas l’inverse. Ce serait lui donner trop d’importance que de m’empêcher de faire ce qui me plaît." 

Cultiver la fureur de vivre

Grâce à ses voyages, sa vision de la vie a changé. "Ce voyage a planté une graine qu’il faut que je continue à arroser. Désormais, je me dis que tout est possible et je continue d’apprendre. On a tous une énergie et une force monstrueuse en chacun de nous. 

Ce voyage a planté une graine qu’il faut que je continue à arroser. 

Je ne suis pas extraordinaire. Avant j’avais peur, mais il faut réussir à dompter cette peur avec des activités ou par le biais de rencontres qui nous donnent confiance. Cette force qu'on oublie, nous la portons tous en nous. Il faut juste la réveiller."

Découvrir les 40 premières pages du livre ici.