Note de l'auteure : 

Pour la première fois, je signe un article sous un pseudo. Par respect pour mon mari, mes enfants, mes parents... Peut-être pour moi aussi, car en relevant ce défi, j’ai dépassé mes propres limites. Faire l’amour avec une femme ? Il y a longtemps que j’y pensais, comme beaucoup d’entre nous peut-être. Comment ça fait ? Est-ce vraiment différent d’avec un homme ? De là à passer à l’acte... L’alibi d’un article pour Marie Claire, c’était parfait. Mais d’abord, il fallait trouver la femme, et ce ne fut pas simple. Je la voulais belle, enfin à mon goût, et comme mes deux meilleures amies sont plutôt jolies, c’est vers elles que je me suis tout naturellement tournée. « Dis, ça te dirait de passer la nuit avec moi ? C’est pour Marie Claire... » La première a éclaté de rire. Et la seconde, qui avait déjà essayé, a pensé que coucher avec moi gâcherait à tout jamais notre amitié. Alors j’ai dû oser.

Vidéo du jour

Ma première nuit avec une nuit : tout mon corps tressaille

  • Jeudi 22 heures

Un vigile m’ouvre la porte et me fait signe d’entrer. L’endroit est sombre, pas très grand. Je m’installe seule à une table. Champagne ! Autour de moi, tout le monde est en bande. Dans l’ensemble, presque des caricatures, sans âge. Curieusement, je ne suis pas mal à l’aise. Des femmes me dévisagent, mais elles m’indiffèrent. Pire, elles m’effraient. Trop viriles. Trop négligées...

  • Minuit

Toujours parlé à personne. Je suis sur le point de renoncer, quand soudain, au bar, une apparition : une très jolie fille, la trentaine, cheveux mi-longs et sauvages, la peau très blanche, une grande bouche très rouge, des yeux clairs maquillés en noir, un sourire gigantesque. Un corps de princesse dans un look déjanté. Soudain, je ne me sens plus étrangère. Je ne sais pas si c’est l’effet du champagne mais mon ventre se serre. Je me lance (des copains gays m’ont conseillé d’agir « cash »). La fille est installée au bar, je m’approche. Elle se tourne vers moi et me sourit. Frontale, j’attaque : « Je m’appelle Luna, et je te trouve très jolie. » Elle rit des yeux, vraiment délicieuse : « Moi, c’est Elsa. T’es pas mal non plus, mais je suis prise. D’ailleurs ma nana ne va pas tarder à arriver, et elle est très jalouse. Dommage... » Je lui glisse que j’aimerais bien la revoir : « Je te donne mon numéro ? » Je lui tends un bout de papier avec mon numéro de téléphone, sur lequel je griffonne : « Je ne connais pas ce monde des femmes. Tu es la seule qui peut me le faire découvrir. Ton couple ne sera pas en péril. Passons une nuit ensemble, tu me plais. » Elle plante ses yeux dans les miens. « A plus tard... »

  • Deux heures plus tard

Effectivement, alors que j’ai regagné mon lit et ma « real life », mon portable vibre. Un SMS : « Toi aussi, tu me plais. Suis libre demain soir. Tu as mon numéro, fais-en bon usage. » J’aime le style de cette fille. Toujours pas peur... Le lendemain, je vais droit à l’essentiel : « Ce soir, hôtel Murano ? 22 heures ? » Elle répond d’accord. Presque trop simple... Il me reste quelques heures pour me faire belle, et trouver un alibi pour passer la nuit dehors. Je ne vais quand même pas expliquer à mon homme que je pars coucher avec une femme...

  • Vendredi 21 heures

Seule au bar du Murano, je m’enivre en douceur. Je préfère être dans un état second... Je porte une jupe, des bas, ma peau est douce et parfumée, je me sens belle mais bizarre. Comment savoir si je lui plairai ? Difficile d’anticiper le regard d’une femme sur soi quand on ne connaît que celui des hommes.

  • 22 heures

SMS : « Quinze minutes de retard, mais j’arrive. » Je tressaille. Et si je partais ? J’ai tout à coup envie d’un dîner en tête à tête avec mon homme. Je me raisonne et commande une autre coupe.

  • 22h20

Elle arrive. Encore plus belle qu’hier soir. Talons hauts, jambes nues, une robe portefeuille couleur prune... Très femme, elle aussi. C’est la première fois de ma vie que je trouve une fille désirable au point... de vouloir coucher avec elle. Elsa s’installe à côté de moi. Elle est drôle et directe. Me raconte qu’elle est chorégraphe, originaire du Poitou, qu’elle a voté Ségo et que, parfois, elle s’ennuie à Paris. Moi je lui avoue que je suis journaliste, sans trop m’étendre sur la question.

  • 23 heures

Un peu de mal à me concentrer sur la conversation. En fait, j’ai la trouille. Plus Elsa navigue à l’aise, plus je me sens décalée. C’est juste une discussion entre filles, mais codée. Et je n’ai pas les clés. Une vraie débutante... pétrie de curiosité et de désir pour cette jolie fille qui me drague, mais aussi d’envie de prendre mes jambes à mon cou. Je reste.

  • 23h01

Nous sommes dans l’ascenseur très sombre, éclairé de quelques paillettes. Elsa s’approche, et vlan, sans un mot, m’embrasse. Ses lèvres sont douces. Comme c’est étrange, le contact de cette peau imberbe, cette façon si délicate de s’y prendre, et ce parfum de fille... J’ai le vertige.

Elsa doit ressentir mon trouble, elle recule, me regarde, là, plaquée contre la paroi, sourit, et m’embrasse à nouveau. Nous faisons la même taille, nos cuisses se frôlent, nos hanches... Pour la première fois, je sens des seins contre les miens. Le bas de mon ventre brûle. D’instinct, ma main se glisse à l’intérieur de sa cuisse. Du satin... Elsa passe la sienne sous mon chemisier, saisit la pointe de mes seins, tout mon corps frissonne. Comme si c’était la toute première fois. « Laisse-toi aller », me susurre Elsa à l’oreille, comme si elle sentait mes doutes, du bout de ses doigts. Sa douceur me tranquillise. Je prends confiance. Et j’avoue que ça m’effraie. Arrivées dans la chambre, on se jette sur le lit, en se marrant, comme aux meilleurs moments de l’adolescence. Et le plus naturellement du monde, nous nous embrassons.

Je prends goût à ces drôles de baisers, si doux, si sensuels... Je me sens prise dans un tourbillon. Entre un désir que je n’imaginais pas, et des pensées parasites : qu’est-ce que je fous là ? Est-ce que je vais aller jusqu’au bout ? Et c’est quoi, « au bout » ? Voilà même que surgit la tête de ma mère, avec sa mimique quand elle braillait : « Range ta chambre. » Et mon frère qui va tous les dimanches à la messe... Et mon mari, mon Dieu, je l’avais oublié...

Ma première nuit avec une nuit : J'en veux encore

Mais le courant est si fort qu’il m’entraîne. Nos lèvres ne s’effleurent plus, elles se dévorent. Nos corps ondulent, flottant sur la même vague. Tout ça me paraît si naturel, si évident... C’est fou comme sa peau est douce sous la robe, j’adore la cambrure de ses reins. J’ai envie d’elle, vraiment, comme je sens qu’elle a envie de moi. Rien à voir pourtant avec le désir pour un homme. C’est à la fois plus épidermique, plus tactile, mais tout aussi tripal. J’ai envie de me fondre en elle, sans la moindre appréhension. Il doit y avoir quelque chose de fœtal dans ce désir... Mais plus le temps de me poser des questions, je savoure. Ce corps jumeau contre le mien, le frôlement de sa robe contre mes bas, j’en ai la chair de poule. Un champ inconnu de sensations s’ouvre à moi. J’en veux encore.

  • "Lèche-moi"

Elsa a dû le sentir. Elle dégrafe ma jupe. Ses doigts remontent délicatement le long de ma cuisse. Sa main est chaude, elle m’effleure à peine, je retiens mon souffle. Quand je la sens, sûre d’elle, arrivée entre mes jambes, j’ouvre les yeux pour mieux mesurer la transgression. Elle aussi me regarde et me sourit. C’est cette créature délicate, qui me caresse et me fait cet effet-là... Je replonge. Elle s’occupe de moi en artiste. Pour le moment, je la laisse faire, entièrement offerte. Juste, je la déshabille. Très excitant, d’ailleurs, de me retrouver dans ce rôle. Déboutonner une robe, dégrafer un soutien-gorge... Ça doit être merveilleux d’être un homme. Entre-temps, Elsa a approfondi son exploration. Et ses doigts qui me pénètrent me donnent envie d’essayer moi aussi. Timidement, je la caresse. Je sens sa main qui saisit la mienne, et me guide. Décidément, elle lit en moi. Curieusement, je me sens soumise, ingénue, et pourtant, je sais qu’il n’y a pas d’emprise. Pas de rapport de force entre nous. Ses gestes sont doux. Experts. Elle me connaît mieux que moi-même, et moi, j’ai de plus en plus envie de plonger en elle, de l’explorer.

« Lèche-moi », m’ordonne-t-elle doucement. Je n’ai jamais vu de si près le sexe d’une femme. Il est épilé et sent bon. Entre ses cuisses, je m’installe. C’est doux, mes doigts cheminent entre ses lèvres et ma langue se glisse. Le goût est un peu salé, pas acide du tout. Et vlan ! ma conscience revient. Comme une bulle de bande dessinée qui crève à la surface : est-ce bien moi, là, entre les cuisses de cette inconnue ? Oui. Et ça ne me déplaît pas du tout. Elsa a encore dû sentir mes doutes. Elle se marre. « Tu aimes ? » Mais oui, c’est bien ce qui me surprend le plus. La sentir trempée sous mes doigts, frémir, durcir, se contracter sous ma langue... Ça me fait vraiment de l’effet.

  • Durant une heure

Nous faisons l’amour ainsi, l’une précédant l’autre puis la suivant, mêlant caresses, fous rires, petits mots doux, et tentatives acrobatiques pour réussir à coller nos deux sexes frissonnants l’un à l’autre. Moi, je mime tout ce qu’elle me fait, elle pousse mes doigts à l’intérieur d’elle. Elle me murmure : « Encore ! » « Viens ! » « Ose ! » et je fais tout ce qu’elle me dit. Jusqu’au moment où je sens qu’entre ses doigts, sa langue et ses lèvres si précises, je... jouis, aussi fort, peut-être plus, qu’entre les mains d’un homme, et l’idée que c’est grâce à cette fille, m’excite encore davantage. Elle me laisse reprendre mon souffle et recommence, malgré moi, tout doucement, et je repars... Puis je me blottis contre elle, sans plus aucune peur, ni retenue. Elle me sourit, et doucement guide ma tête de nouveau vers son sexe, où je me perds délicieusement, en essayant d’être aussi délicate qu’elle, aussi attentive. « Oui, comme ça » Elle m’aide de ses mots. Puis je la sens à son tour, se contracter tout entière, et de sa main elle m’intime d’arrêter. J’ai l’impression qu’elle ne respire plus, comme si elle était emportée loin de moi par une vague, je n’ose plus faire un geste. Puis elle revient à elle doucement, et moi je n’en reviens pas de cette violence. C’est étrange, une femme qui jouit...

  • Deux heures plus tard

Nos corps sont moites, nos têtes pendent dans le vide du lit défait, et j’éclate de rire. C’est plus fort que moi. Elsa me regarde, décontenancée, elle ne comprend pas que c’est de moi que je me moque. Ma douce Elsa, pas convaincue, propose un bain.
Plongées dans la pénombre et la mousse délicatement parfumée, nous sommes allongées comme des amantes. Et discutons comme des copines. Elle, son enfance, ses expériences désastreuses avec les mecs, les filles ensuite, et cette femme, régulière, depuis quelques mois... Moi, mon hétérosexualité de base, mon homme, la maternité... C’est doux, intime. Naturel... Nous n’abordons pas la question de demain. Pour moi, c’est l’histoire d’une nuit, une affaire entendue. Enfin, je préfère. J’aurais peur de l’inverse...

A la sortie du bain, Elsa se rhabille et me quitte, presque brutalement. « Il faut que j’aille chercher ma chérie au boulot ! » Moi, je suis vidée. Trop d’émotions. Elle, est toute guillerette : « On se revoit quand tu veux ! Et, la prochaine fois, on s’amusera avec des gadgets. » Elle m’embrasse. Un baiser tendre, une langue douce, une dernière fois, et elle disparaît. Moi, je reste là, allongée seule sur le lit de la chambre d’hôtel, bouleversée. La prochaine fois ? On verra...