La violence conjugale se pare de nombreuses facettes. Le plus tristement célèbre est celui de la violence physique. Celle qui abîme le corps - et l'esprit, celle qui bouscule, qui blesse, qui tue. Les nombreux féminicides sont la conséquence morbide de son existence.

Si la violence est largement associée aux coups, elle est pourtant plurielle. Dans un livre décryptage*, le psychologue Jacques Salomé et l'autrice Valeria Salomé ont posé des mots sur la violence verbale. Celle par laquelle souvent tout commence.

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Les mots, une autre forme de violence conjugale

L'ouvrage des deux experts, La violence conjugale, ce sont aussi des mots !, décrit dans ses premières pages les divers types de violences auxquels les couples peuvent se confronter :  la violence sexuelle à l'instar du viol conjugal, morale (comme le chantage), psychologique - qui porte atteinte à l'intégrité psychique, mentale.

Jacques et Valéria Salomé soulignent aussi l'existence de la violence affective, où la présence d'un tiers, comme de l'alcool, la drogue ou une autre personne s'impose. La violence relationnelle, qui exige, impose des choses, comme les choix de vie, les vêtements. Et même la violence économique, qui se traduit par un contrôle économique ou professionnel du partenaire. 

Toutes ces formes sont des violences conjugales. Et souvent, elles s'entremêlent, coexistent. 

Quand le partenaire devient un défouloir

Cette violence au sein des couples n'est pas rare. Elle touche toute catégorie sociale, économique, culturelle. Tout milieux. En France, comme rappelle l'ouvrage, les violences conjugales (déclarées) concernent 1 femme sur 7.

"Avant d'être conjugale, une violence sévit, depuis bien longtemps, à l'intérieur de celui qui va l'exprimer, qui va la déverser sur l'autre de façon occasionnelle, circonstancielle ou répétitive", expliquent les auteurs. 

C'est la façon dont les scénarios se répètent, s'imbriquent l'un dans l'autre, qui ouvre la porte à l'agressivité montante, celle de la violence

Pour eux, la violence conjugale est avant tout un processus. Et aussi un recours : "un langage dévoyé, parce qu'il n'y a pas de mots pour dire, pour tenter d'exprimer une problématique qui vient de loin, qui prend ses sources dès l'enfance". L'autre, le/la partenaire, devient un défouloir.

Cette violence est plus ou moins palpable, visible - elle n'est pas toujours aussi criante, ni identifiable qu'un coquard. Elle réside parfois seulement dans les mots, les attitudes, les paroles toxiques, qui, par leur aspect récurrent, croissant et durable, saboteront les relations, les personnes.  

Paroles toxiques, paroles destructrices

La violence commence souvent par une phrase, par certains propos. Ceux-là, pris à part, lâchés ponctuellement sont presque banals, sans grandes conséquences immédiates.

"C'est leur répétition, leur accumulation au long des jours qui, malgré l'amour, la tendresse ou le respect mutuel, en feront des obstacles suffisamment importants pour entraîner une détérioration, une usure de la relation de couple", témoignent les auteurs.

Et ajoute que la relation amoureuse devient souvent le lieu privilégié de subtiles violences. "C'est la façon dont les scénarios se répètent, s'imbriquent l'un dans l'autre, qui ouvre la porte à l'agressivité montante, celle de la violence".

Je te croyais plus intelligente, je ne pensais pas que tu te rabaisserais à ça


Parmi ces paroles, qui, répétées entrainent du conflit mais aussi, fatalement, de la violence conjugale, on retrouve certains "schémas". Comme la critique ironique, le rapport de force induit par le mépris, l'intrusion et la violation de l'intimité, les menaces, la dévalorisation, l'emprise par le chantage, la culpabilisation, les illusions de compromis, les jeux de sentiments ou encore la victimisation.

"De toute façon, tu ne comprends jamais rien - bien évidemment ce n'est pas de ta faute" : remarque sarcastique et méprisante, donnée en exemple par les auteurs du livre. "Aujourd'hui ce sont des verres. Demain c'est ton bras que je casserai", phrase qui quant à elle constitue une menace. Les auteurs illustrent également les tactiques d'intimidation, qui usent la résistance morale du/ de la partenaire : "Je te croyais plus intelligente, je ne pensais pas que tu te rabaisserais à ça".   

Cette liste, non-exhaustive, pointe quelques visages d'une violence verbale toxique. Qui peut se coupler, ou non, à de la brutalité physique. 

Victime ou témoin de violences, à qui m'adresser ? Le 3919 est numéro anonyme pour les femmes victimes de violence. Retrouvez ici notre article complet sur les numéros et associations qui peuvent apporter leur aide et écoute.

* La violence conjugale, ce sont aussi des mots ! de Jacques et Valeria Salomé, éd. Hugo New Life, 12,50 euros.