Mercredi 24 octobre 2018 : une petite foule se presse aux abords de l’espace de coworking WeWork Lafayette dans le 9ème arrondissement de Paris pour assister à la conférence Humanize Work, organisée en partenariat avec Workwell et Startup Inside. Durant toute une journée, des personnalités vont se succéder pour questionner le monde du travail d’aujourd’hui et inventer celui de demain. Vers midi, le débat se porte sur le décloisonnement des espaces et l’accompagnement des nouveaux modes de travail avec une question plus précise : les bureaux attitrés vont-ils bientôt disparaître ? Le flex-office va-t-il devenir la norme pour tous ?

Flex-office : s’adapter aux nouveaux modes de travail

Sur scène, trois hommes et une même vision : le temps des bureaux personnels et figés est révolu. Baptiste Broughton, cofondateur de Neo-nomade, Teoman Colakoglu, directeur de Airbnb For Work et Vincent Moreau, Global Real Estate Director de Capgemini sont tous les trois sur la même longueur d’onde : le flex-office sera la norme du futur. Voir d’un futur très très proche à les écouter. “Les nouvelles organisations du travail - déplacements, télétravail, etc - couplées aux nouvelles aspirations des salariés nous obligent à réfléchir à une nouvelle conception des immeubles et des bureaux”, explique alors Vincent Moreau. Baptiste Broughton surenchérit en expliquant que chaque entreprise de n’importe quel secteur, peut ainsi réfléchir à la forme de flex-office la plus adaptée à ses besoins et aux besoins de ses salariés.

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Parce que oui, le flex office est protéiforme : certaines entreprises optent pour des longues tablées d'ordinateurs fixes, non attitrés donc, comme dans certains espaces de coworking (ou comme un CDI au Lycée). D'autres préfèrent équiper leurs salariés d'ordinateurs portables et autres tablettes géolocalisées, et leur offrir des espaces divers, remplis de poufs ou de bureaux, voire parfois de tables hautes pour travailler debout. 

Sur le papier donc, pas de doute, les salariés d’aujourd’hui ne rêveraient que d’une seule chose : de ne plus avoir à s'asseoir sur la même chaise tous les jours. Teoman Colakoglu partage également cette idée et explique que d’ailleurs, on peut observer une recrudescence des demandes de locations d’espaces pour des réunions ou des boot camp, qui permettent à tous de "disrupter" leurs habitudes et donc de gagner en productivité et en créativité. De plus, les salariés d’aujourd’hui voudraient des espaces de travail “comme à la maison” et ouverts qui plus est, car cela facilite de toute évidence les échanges et les collaborations.

Les limites du flex-office

D’accord, d’accord. Mais qui sont ces salariés ? Quels sont leurs réseaux ? Parce que travaillant en open-space depuis maintenant plus de 4 ans, je peux vous assurer que j’en vois nettement les limites, sonores tout d’abord mais pas seulement. Pour l’aspect “comme à la maison”, je ne suis pas contre mais au-delà d’une bouilloire, je ne le comprends pas bien : personne ne va venir travailler en pilou-pilou et en plaid, si ? Et puis, qu’en est-il de celles et ceux qui aiment retrouver leur espace de travail, qui aiment pouvoir jouir d’un petit espace rien qu’à eux, qui doivent entreposer par exemple des livres, des documents, etc ? Pour les experts interrogés sur la scène installée à WeWork, ce n’est qu’une question de - mauvaises - habitudes et de routine - et d’organisation pour les employeurs. Que ce soit dans les espaces de coworking, chez Airbnb ou dans les nouveaux bureaux de Capgemini, tous s’habitueraient fort bien à ces changements. Il suffirait de les accompagner durant la transition et de répondre à leurs inquiétudes.

Certes, mais ça ne répond pas aux miennes d’inquiétudes. Du tout, même. Etant moi-même salariée, éligible de par ma profession à ces évolutions des modes de travail (merci mais non merci), je suis même angoissée. Comment être sûre que travailler dans un pouf ne va pas à long terme, nous tordre la colonne vertébrale ? Comment trouver du réconfort à son poste, si on ne peut plus rêvasser en regardant la photo de Javier Pastore ou le pot à crayon en pâte à sel offert à la fête des mères ? Comment être sûre d'avoir une place agréable pour travailler tous les jours ?  Plus sérieusement, qu'en est-il de la gestion du bruit ? Et encore, comment gérer les relations inter-professionnelles si on donne la possibilité à tous de choisir à coté de qui il veut travailler (et surtout à côté il ne veut pas) ? Autant de questions qui restent en suspens. 

Heureusement, même si cette prophétie de flex office finit par se produire vraiment, elle devrait s’accompagner de plus de télétravail, donc moins de temps dans l’entreprise même. L’enjeu sera alors de donner envie aux salariés de (re)venir au bureau, en leur proposant par exemple des espaces cosy où ils pourront travailler… Des bureaux attitrés ? Ne nous emballons pas.