Quoi de plus efficace qu'une réconfortante séance de cinéma pour conjurer le spleen de la rentrée ?

Parmi les œuvres présentées dans les salles obscures ce mois de septembre 2023, la rédaction de Marie Claire a été bouleversée par Toni, en famille, beau et tendre portrait sur la maternité hors-norme et le mitan d'une vie, réalisé par Nathan Ambrosioni, remuée par Acide de Just Philippot, fable familiale sur fond de fin du monde qui nous met sous tension, et enchantée par Le livre des solutions, plongée dans l'univers grondiesque, touchant et décalé. À votre pop-corn.

Vidéo du jour
1/5

"Toni, en famille", de Nathan Ambrosioni

Nathan Ambrosioni, réalisateur prodige qui vient de fêter ses 24 ans, admire depuis l'adolescence son actrice principale à la carrière désormais hollywoodienne. Devant sa caméra si juste, Camille Cottin incarne une mère célibataire de cinq adolescents. Ce rôle, glisse-t-elle à Marie Claire lors de notre rencontre, c'est un peu son Marvel à elle, son personnage de super-héroïne.

Toni, qu'elle incarne avec un naturel si convaincant, a connu la gloire éphémère : lauréate d'un télé-crochet il y a vingt ans, l'un de ses titres fut un véritable tube. Désormais, elle chante dans les bars, le soir, pour subvenir aux besoins de sa famille nombreuse. Et alors que ses deux aînés s'apprêtent à intégrer l'université, l'héroïne ressent puissamment qu'il est temps de faire évoluer son existence. Nathan Ambrosioni tenait à "interroger le mitan d'une vie, ce moment très spécial où l'on remet tout en cause". Pari largement réussi, avec une finesse bouleversante dans l'écriture comme dans les choix de réalisation.

Une chronique familiale drôle, touchante, intelligente, féministe... qui raconte tant de choses des premières fois de l'adolescence, du mal-être à ces âges-là, de la charge mentale des mères célibataires, des dynamiques dans les fratries, et des liens aussi solides que fragiles parents-adolescents.

"Toni, en famille", de Nathan Ambrosioni, avec Camille Cottin, Léa Lopez... En salle le 6 septembre

J.H

2/5

"Le livre des solutions", de Michel Gondry

C'est planqué dans la maison de sa tante, dans un petit village des Cévennes, que Michel Gondry a finalisé non sans mal le montage de L'écume des jours (2013). Dans ce même décor familial, il a filmé le drôlissime Pierre Niney, dans la peau d'un réalisateur souffrant de troubles mentaux, qui peine à achever le montage de son film... Sa peau.
 
Le film relate ce douloureux chapitre de la vie de Gondry, à l'époque du montage de son adaptation sur toile du classique de Boris Vian donc, et de la découverte de sa bipolarité. Le cinéaste le confie au public parisien venu applaudir - durant de longues minutes - Le livre des solutions en avant-première, lundi 4 septembre 2023. Le livre des solutions, c'est aussi le titre du recueil de pages blanches que Marc (Pierre Niney) retrouve dans un tiroir chez la tante Denise (Françoise Lebrun) et se met tout à coup à noircir de principes à tenir, qui pourraient régler les problèmes qu'ils rencontrent sur son tournage autant que les crises mondiales.
 
Une autofiction drôle, décalée, touchante, poétique... Et courageuse. "Je trouve ça bien de pouvoir faire la lumière sur [la santé mentale]. Je trouve ça courageux comme démarche", confiait en ce sens Pierre Niney à Marie Claire, lors du dernier Festival de Cannes.
 
Un puissant casting féminin porte l'acteur principal. Un trio de femmes à trois époques de leur vie, unies pour aider le réalisateur éparpillé et en souffrance tant qu'elles le peuvent. Dans le rôle de Sylvia, l'assistante qui le supporte dans toutes ses obsessions, le canalise, ou l'envoie paître, Frankie Wallach (Trop d'amourMarinette) rayonne de naturel. C'est en observant le maître Gondry en action, fascinant derrière sa caméra, que l'actrice, aussi réalisatrice, s'est lancée dans l'écriture de son second long-métrage. À suivre.

"Le livre des solutions", de Michel Gondry, avec Pierre Niney, Frankie Wallach, Blanche Gardin, Françoise Lebrun... En salle le 13 septembre

J.H

3/5

"Les feuilles mortes", d'Aki Kaurismäki

Deux êtres cabossés par le monde du travail, un humour pince-sans-rire : pas de doute, on est bien chez Aki Kaurismäki.
 
Entre spleen et insoutenable légèreté, le cinéaste finlandais narre ici les amours de ce couple lunaire perdu dans un réel cartoonesque et fantomatique.

Un nid douillet pour les fans comme pour celles et ceux qui ont encore la chance de découvrir son cinéma.

"Les feuilles mortes", d'Aki Kaurismäki, avec Alma Pöysti et Jussi Vatanen, en salle le 20 septembre

E.B

4/5

"Acide", de Just Philippot

Pour une fois, l’intrigue n’a rien à envier aux films d’action américains. Dans la campagne française, une pluie acide meurtrière dévaste la nature et menace l’humanité, déclenchant des exodes de populations paniquées. Course contre la montre, morts violentes, instinct de survie : du grand et beau spectacle biberonné au cinéma de Spielberg (La Guerre des mondes).

Acide prend à bras-le-corps les tourments de l’époque qui emplissent nos journaux télévisés : révoltes d’ouvrier·ères filmées avec des smartphones, société divisée entre pauvres et privilégié·es, réchauffement climatique...

En jouant la carte de la dystopie, le deuxième film de Just Philippot (révélé avec La Nuée en 2021) donne corps aux pires prédictions écologiques. Une manière efficace de tirer la sonnette d’alarme.

Dans les rôles-titres, Guillaume Canet, Laetitia Dosch et la jeune révélation Patience Munchenbach campent une famille fracturée, sommée de surmonter ses failles pour survivre. Mais la réunion familiale tourne court, au profit d’une cavale père-fille parsemée d’embûches et de témoignages d’amour. Œdipe quand tu nous tiens...

"Acide", de Just Philippot, avec Guillaume Canet, Laetitia Dosch et Patience Muchenbach, en salle le 20 septembre

E.B

5/5

"L’arbre aux papillons d’or", de Tien An Pham

Suite au décès de sa belle-sœur, Thien part à la recherche de son frère disparu, père de son neveu orphelin.

Derrière la trajectoire humaine, ce film vietnamien, lauréat de la Caméra d’or à Cannes, déroule des plans à la beauté stupéfiante, comme seul un Apichatpong Weerasethakul sait le faire. Visions hallucinatoires au cœur d’une nature divinisée, un voyage en soi ! Envoûtant.

"L’arbre aux papillons d’or", de Tien An Pham, en salle le 20 septembre

E.B

Ces trois dernières critiques ont initialement été publiées dans le magazine Marie Claire numéro 853.

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