Soutenue par les associations Fondation des Femmes et Collectif Féministe Contre le Viol, une sexagénaire a déposé le 5 mars 2021 un recours contre la France devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) pour "ingérence dans la vie privée" et "atteinte à l’intégrité physique", comme le dévoile un communiqué des deux associations, partagé sur Twitter le 17 mars 2021.

La femme de 66 ans s'insurge contre une condamnation archaïque et misogyne dont elle a été victime en 2019. En effet, la Cour d'appel de Versailles l'avait alors sanctionnée d'un divorce à ses torts exclusifs, car elle refusait d’avoir des relations sexuelles avec son mari, comme l'a révélé Médiapart

Le "devoir conjugal" aboli depuis 1990

Dans leur communiqué, les deux associations féministes précisent que depuis septembre 1990 : "la Chambre criminelle de la Cour de Cassation a aboli le devoir conjugal" mais pourtant "les juges civils continuent de l’imposer à travers une vision archaïque du mariage", évidemment au détriment des femmes. A noter que depuis le 22 novembre 1995, cette disposition passéiste est également proscrite par la Cour européenne. 

À Médiapart, la plaignante de 66 ans confie : "C’est une condamnation d’une autre époque. Elle me scandalise. Je la vis comme un déni de justice".

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Comme le souligne les deux associations, "le mariage n’est pas et ne doit pas être une servitude sexuelle." "Il est fondamental qu'en France, les Juges ne puissent plus imposer de manière directe ou indirecte aux femmes une obligation d'avoir des relations sexuelles. Laisser perdurer le "devoir conjugal" c'est maintenir un outil d'intimidation pour les agresseurs sexuels violeurs au sein du couple", ajoutent-elles. 

La question du consentement au sein du couple

Au-delà du caractère arriéré et sexiste du "devoir conjugal", cette décision de la Cour d'appel de Versailles va clairement à l'encontre de notion de consentement, primordiale et incontournable, et ce même au sein du couple.

Le communiqué de soutien précise que le "crime aggravé de viol conjugal" est bien inscrit dans le code pénal. Imposer à une femme d’avoir des relations sexuelles avec son mari, s’oppose à la notion de liberté sexuelle, c’est-à-dire "la liberté d’avoir des relations sexuelles entre adultes consentants… ainsi que celle de ne pas en avoir".

Le Collectif Féministe Contre le Viol et la Fondation des Femmes rappellent enfin que le combat de cette femme représente "un enjeu grave" puisque sur les "47% des 94 000 viols et tentatives de viol par an, l’agresseur est le conjoint ou l’ex-conjoint de la victime".

Les avocates de la plaignante, Lilia Mhissen et Delphine Zoughebi, ont confié à Mediapart, "nous devons en finir définitivement avec l’époque où l’homme disposait à sa guise du corps de son épouse. En 2021, le mariage ne peut plus être synonyme de servitude sexuelle."