Dans la vie, il y a des choses parfois que l’on ne voit pas venir : cet ex, spécialiste du ghosting, qui revient d’entre les morts après des années, cette hausse de loyer pour un appart qui vous coûte déjà un demi rein mensuel ou encore ce cheveu blanc qui a décidé de s’inviter le jour de nos 32 ans.

Or, en matière de mode et de tendances, il faut le savoir, c’est exactement pareil. Dernier exemple en date ? Celui du retour du string, et pas n’importe lequel : le string apparent, celui dont les ficelles dépassent ostensiblement du haut du pantalon et dont les quelques centimètres de tissu se muent en gage d’une sexualité active fièrement revendiquée.

Celui qui a régné sur la lingerie pendant deux décennies sous couvert d’empowerment érotisé, celui qui ponctuait sans subtilité le look provocant de nos pop-stars adorées ou celui, encore, que l’on achetait en cachette chez Jennyfer ou Pimkie, l'âge ingrat (enfin) venu.

Bref le string, le seul, l’unique qui, sur fond de retour de hype des années 2000, tente de s’inviter dans le dressing d’une génération 2.0 biberonnée aux réseaux sociaux.

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Le string apparent pour toutes ?

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Un simple scroll sur le profil des insta-girls et autres célébrités aux millions de followers suffit à se rendre compte que le string est le nouvel accessoire fétiche des expertes du style.

Alors qu’Hailey Bieber avait lancé les hostilités dès le Gala du Met 2019 avec une robe rose-bonbon Alexander Wang dotée d’un dos nu dévoilant sans détour un string ficelle assorti, le controversé dessous apparaît un mois plus tard sur les podiums de Versace mais aussi de marques plus confidentielles comme Heron Preston ou Matte Brand.

Coté ville, c’est Jennifer Lopez qui fait la une des tabloïds en déambulant dans son "pantastring" signé Natasha Zinko.

Même gimmick pour le top Bella Hadid qui laisse dépasser son string à chaque occasion venue ou, la hottie Emily Ratajkowski qui, même à 6 mois de grossesse, hèle son taxi dans une robe dos-nu laissant ostensiblement entrevoir son G-string rouge à qui de-droit.

2021, sur le tapis rouge des MTV VMA's, l'actrice Megan Fox enfile une robe Mugler transparente pour mettre en avant son string couleur chair.

Sur la toile, c’est le clan Kardashian qui tire principalement les ficelles de ce come-back, avec une Kylie adepte des strings bijoux ou encore une Kim Kardashian qui casse les internets avec une relique Gucci héritée de l’ère Tom Ford.

Comble de la tendance, même le prestigieux British Vogue se paie l’honneur d’immortaliser Beyoncé au détour d’un cliché sublimant sa chute de reins d’un string diamanté. De quoi inciter le monde entier à révéler la naissance de son postérieur. Ou pas.

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Pop-stars et porno-chic

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Car si le grand public a globalement embrassé le retour de flammes vestimentaire des années 2000, le string apparent continue de nous laisser vaguement hésitantes, voire complètement récalcitrantes.

Et pour cause, le grand public (vous, moi et globalement toute personne vestimentairement audacieuse née dans les années 80) n’a plus 15 ans, ni 20 ans, et a largement tiré les leçons des erreurs stylistiques de ses jeunes années.

Arme de séduction massive sur fond de vague porno-chic un brin patriarco-centré, le string jouissait en effet 30 ans plus tôt d’une popularité assumée, associant étroitement empowerment féminin et sexualité revendiquée.

C’est l’heure du girl power et des pop-stars aux chansons explicites, Britney Spears, Christina Aguilera et autres Spice Girls se livrant à des dégaines vestimentaires ultra-suggestives révélant autant que possible leur intimité.

Même combat sur le petit écran où des Paris Hilton et Loana connaissent alors leur heure de gloire à grand renfort de pantalons taille basse et de string apparent, mais aussi sur le tapis rouge, où des actrices dans l’air du temps comme Gillian Anderson et Halle Berry font faussement scandale en exhibant leurs controversées dessous. 

Autant de figures et de moments forts de la pop-culture qui contribuent, en ces insouciantes années, à faire du string apparent un objet de désir, y compris et surtout auprès des jeunes filles qui souhaitent plus que jamais imiter leurs idoles au mépris parfois de la désapprobation de leurs parents.

Et pour cause, associé à l’univers pornographique et à des starlettes en proie aux excès diverses, le bout de ficelle sera progressivement marqué du sceau de la vulgarité, accusé de contribuer à la sexualisation outrancière des adolescentes.

Nous sommes en 2008, à l’aune d’une crise économique mondiale, qui comme chaque récession, se trouvera marquée par un virage vestimentaire des plus pudiques. Des pièces de lingerie longtemps répudiées tirent alors leur épingle du jeu, à l’image des culottes tailles hautes, des shorty vintages ou encore des nuisettes rétro.

Exit le string qui saucissonne les fesses au nom du soi-disant plaisir visuel de ces messieurs, les femmes privilégient désormais confort et bien-être avec des dessous couvrants et délaissent dans le même temps les pantalons taille basse au profit des désormais vénérés mom jean.

Autant de paramètres stylistiques qui conduisent le string à être relégué au rang de pièce utilitaire, celle que l’on porte dans un pur souci d’invisibilité.

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Qui veut la peau du string ?

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En 2022, plus besoin en effet de fouler le bitume en soulignant son aine de deux bouts de ficelles pour obtenir l’approbation mode, sociétale ou sexuelle de ses paires, du moins lorsque l’on s’appelle Monsieur ou Madame Tout Le Monde.

Au contraire, 30 ans après l'âge d’or des Paris Hilton et autres icônes décadentes aujourd'hui largement moquées, difficile d’aborder le string apparent au premier degré et de sérieusement envisager se pointer au bureau, au restau ou à un simple rencard avec le haut des fesses ainsi dévoilé.

Devenu dans l’inconscient collectif synonyme de bimbo écervelée, figure marginalisée y compris dans la pensée féministe, le string est aujourd'hui une pièce politiquement incorrecte que ses irréductibles vont continuer toutefois de dévoiler dans un souci de provocation typiquement juvénile et/ou comme un outil de conquête de pouvoir transgressif et assumé.

Une forme de retournement de stigmate en somme, qui explique que le string apparent se voit aujourd'hui moins adopté par une conventionnelle Taylor Swift, que par une Kim Kardashian, star de la télé-réalité à la légitimité sans cesse contestée par la culture dominante.

À croire que, comme toute pièce sulfureuse du vestiaire, le string (aussi) peut s’offrir une caution politique, à défaut d’une véritable rehab stylistique.

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