"Des cancers récidivants considérés comme incurables il y a dix ans sont en train de voir leur pronostic changer ", se réjouit le Pr Frédérique Penault-Llorca, directrice du Centre de lutte contre le cancer Jean-Perrin de Clermont-Ferrand.

Le dernier congrès international sur le cancer (ASCO 2020), auquel elle a participé, a en effet confirmé la place croissante de la médecine personnalisée dans le traitement de plusieurs tumeurs féminines. Des résultats très encourageants ont aussi été présentés pour des cancers gynécologiques contre lesquels on ne disposait jusqu’à présent d’aucun véritable arsenal thérapeutique.

Tumeur trophoblastique gestationnelle : l’immunothérapie fait ses preuves

Ce cancer rare de l’utérus, qui se développe au niveau des cellules du placenta durant la grossesse, ne concerne que 200 femmes environ par an en France.

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Quand elle est détectée au stade précoce, un curetage de l’utérus associé à une chimiothérapie permet souvent d’en venir à bout. Mais ce traitement peut être toxique et compromettre les perspectives de grossesses ultérieures. Un essai clinique inédit, réalisé aux Hospices civils de Lyon, a montré que l’immunothérapie (avelumab, injecté toutes les deux semaines en intraveineuse) donne d’excellents résultats. Sur les 15 patientes traitées, huit ont été guéries sans chimiothérapie grâce à ce traitement qui booste le système immunitaire des malades. En outre, leur fertilité est totalement préservée.

À preuve : l’une d’elle est tombée enceinte juste un an après et a donné naissance à un petit garçon en très bonne santé. Une première après un traitement par immunothérapie, tous cancers confondus !

Cancer des ovaires : un taux de survie amélioré

Le pronostic de ce cancer, souvent découvert à un stade tardif, reste assez sombre : "3500 décès en France pour 5000 nouveaux cas par an", constate le Pr Penault-Llorca.

Près de 20% des patientes touchées présentent une mutation des gènes BRCA 1 ou 2. En cas de rechute, peu d’espoir était permis. Mais cette page semble désormais tournée suite à l’annonce des résultats de l’étude Solo 2 présentés à l’ASCO 2020. La nouvelle classe de molécule testée – l’olaparib – bloque une enzyme dans les cellules cancéreuses qui empêche la réparation de l’ADN. Après cinq ans de suivi, plus de 42 % des femmes traitées sont encore en vie, contre 33,2% des patientes n’ayant pas bénéficié de cette innovation.

Et pour les femmes non porteuses de ces gènes ? Une approche associant l’immunothérapie et la chimiothérapie pourrait voir le jour, ainsi qu’un médicament qui bloque la fabrication de nouveau vaisseaux sanguins autour de la tumeur. Non alimentée, celle-ci devrait régresser puis disparaître d’elle-même.

Cancers du sein : des thérapies de plus en plus personnalisées

Il n’y a pas UN cancer du sein, mais de multiples cancers susceptibles d’être localisés au niveau du sein. Chacun est caractérisé par des gènes et des marqueurs spécifiques que l’on peut détecter afin de mettre en place un traitement ciblé. Cette approche personnalisée a permis de réaliser d’immense progrès au cours des dernières années.

"Lorsque le cancer est diagnostiqué précocement, on obtient en effet aujourd’hui un taux de guérison de 90%, explique Nancy Abou-Zeid, directrice scientifique de la Fondation ARC pour la recherche sur le cancer. Mais certaines patientes, atteintes d’un cancer agressif, ne bénéficient toujours pas d’une prise en charge adaptée." Les tumeurs contre lesquelles on dispose le moins d’armes thérapeutiques sont celles dites "triple négatifs". Mais là aussi l’horizon semble s’éclaircir. "Une seconde immunothérapie est attendue pour ce cancer, observe le Pr Pinault-Llorca. Elle ne serait pas efficace seule mais en association avec une chimiothérapie car les deux traitement se potentialisent."

Une nouvelle combinaison de médicaments démontre aussi son efficacité en cas de cancer du sein métastatique présentant des récepteurs hormonaux et dont le cancer progresse malgré les traitements de routine déjà administrés. Ce duo de molécules – alpelisib et fulvestrant – se révèle prometteur.

Enfin, le choix de la meilleure stratégie thérapeutique va encore s’alléger. Au lieu de réaliser des biopsies de la tumeur, celle-ci peut désormais être caractérisée à partir d’un simple échantillon de sang dont on extrait du matériel génétique libéré par les cellules tumorales. L’étude Pada-1 coordonnée par l’Institut Curie vient de confirmer que cette option est pertinente pour évaluer l’agressivité d’une tumeur et sa sensibilité à l’hormonothérapie, ce qui permet d’éviter des traitements lourds et agressifs inutiles.