"Je ne me souviens pas", "Qui êtes-vous ?", "Je ne sais pas où je suis"... Répétitions, hésitations, pertes de mémoire : la maladie d'Alzheimer touche aujourd'hui environ 30 millions de personnes à travers le monde. Et parmi les 900 000 personnes souffrant de cette démence en France, 60% sont des femmes. Une étude inédite sur les différences entre les hommes et les femmes atteintes de la maladie a été publiée ce 9 juillet 2018 dans la revue Nature*. Les scientifiques du Women's Brain Project (WBP), à l'origine de ces recherches, ont déterminé plusieurs facteurs responsables du développement de la maladie.

Âge, dépression et grossesses compliquées à l'origine de la démence

L'âge serait la première raison pour laquelle les femmes sont davantage touchées par la démence. Étant donné que leur espérance de vie est supérieure d'en moyenne six ans par rapport aux hommes, elles ont plus de risque de contracter cette maladie qui touche majoritairement les personnes âgées.

La dépression, liée au développement de la maladie d'Alzheimer, serait également un facteur de risque pour les femmes. La gente féminine est plus sensible à cette maladie psychologique. En France, trois ou quatre femmes y sont confrontées pour deux hommes. Selon les chercheuses, les complications de grossesse peuvent aussi entraîner une démence à un âge avancé. 

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En plus de toucher majoritairement les femmes, la maladie d'Alzheimer évolue plus vite chez ces dernières. Cela pourrait s'expliquer par "la présence des œstrogènes chez les femmes dont l’effet serait 'protecteur' sur l’organisme et en particulier sur le cerveau. Dès lors, la chute des taux d’œstrogènes à la ménopause pourrait se traduire par la perte de ces effets protecteurs sur le cerveau et ainsi celui-ci se trouverait plus vulnérable que celui des hommes à cette maladie neurodégénérative qui affecte la cognition", a indiqué le Pr André Nieoullon, professeur de neurosciences à l'université d'Aix-Marseille sur Atlantico.fr. "Certaines données - parfois contestables et contestées - ont fait état d’effets 'bénéfiques' des traitements hormonaux substitutifs suite à la ménopause, y compris en termes de 'prévention' de la maladie d’Alzheimer, voire chez les femmes atteintes en ralentissant son évolution", a-t-il ajouté.

Des recherches scientifiques encore sexistes

La maladie d'Alzheimer reste aujourd'hui incurable. Pour les chercheuses du WBP, si les recherches de traitement n'évoluent pas, c'est par faute de moyens financiers mais également car les femmes ne participent pas assez aux expériences des laboratoires. "Comme les femmes sont plus touchées par la maladie, il faut enquêter sur les différences spécifiques entre les hommes et les femmes", explique Antonella Santuccione-Chadha, co-fondatrice de Women's Brain Project.

Si cette démence ne se soigne pas, les chiffres des nouveaux diagnostics reculent dans certains pays au fil des ans. Au Royaume-Uni, le nombre de nouveaux cas d'Alzheimer a chuté de 20% ces vingt dernières années, notamment chez les hommes de plus de 65 ans. Une diminution qui peut s'expliquer par la prise des conscience des méfaits du tabagisme et la prévention sur les maladies cardiaques, qui sont liés au déclenchement de la maladie d'Alzheimer.

* www.nature.com/articles/s41582-018-0032-9.epdf?