Odeurs intimes : quand faut-il s'inquiéter ?

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Les odeurs intimes peuvent être un véritable cauchemar pour celles qui les subissent au quotidien. Quelles sont leurs causes ? Comment s'en débarrasser ? Jean-Marc Bohbot, médecin infectiologue nous éclaire sur le sujet.

Tout notre corps dégage des odeurs, vagin inclus. Mais comment savoir si celles-ci sont normales ? 

Les réponses de Jean-Marc Bohbot, médecin infectiologue, Directeur Médical du Centre Alfred Fournier (Paris) et auteur du livre Microbiote vaginal : la révolution rose*, paru aux éditions Marabout.

Odeur intime : on apprend à faire la différence entre "bonne" et "mauvaise"

Avant tout, il faut savoir faire la différence entre une odeur physiologique et une odeur anormale. "Le vagin a naturellement une odeur, et elle est propre à chaque femme. Certaines peuvent être perturbées par celle-ci, mais il faut qu’elles soient conscientes que la zone génitale est pourvue de glandes particulières qui, effectivement, dégagent des odeurs", précise le Dr Bohbot.

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Elles évoluent au cours du cycle et donc en fonction de l’imprégnation hormonale : après l’ovulation, après la période des règles ou en période d’excitation sexuelle par exemple. Le vagin d’une femme de 20 ans ne dégage pas la même odeur qu’une femme ménopausée ou enceinte. 

"Dans notre société actuelle, on refuse de plus en plus les odeurs corporelles et nous avons trop tendance à avoir recours à des produits chimiques pour les masquer ou les éliminer", s'insurge l'expert. 

Une odeur de "poisson pourri" : la vaginose bactérienne et la trichomonase

Bien entendu, un manque d'hygiène flagrant peut être la première cause d'effluves nauséabondes. Mais si tout va bien de ce côté là, alors il s'agit sans doute d'une infection liée à un déséquilibre de la flore vaginale, causée dans la majorité des cas par la prise d’antibiotiques ou de mauvaises pratiques d’hygiène intime.

La plus malodorante d’entre elles ? La vaginose bactérienne. Pour mieux comprendre sa formation, il faut tout d'abord rappeler que le vagin possède son propre microbiote. Sa flore est colonisée par une multitude de bactéries : des "bonnes", que l’on appelle Lactobacilles et qui protègent le vagin des infections tout en maintenant son bon niveau d’acidité ; et des "mauvaises"

Problème : lorsque la flore se déséquilibre, le nombre de germes "méchants" se multiplie, diminuant au passage la quantité de "gentils". Et dans le cas de la vaginose bactérienne, qui on le précise n’est pas une infection sexuellement transmissible (IST), on retrouve généralement les bactéries Gardnerella vaginalis ou Atopobium vaginae sur le banc des accusées. 

Une nouvelle flore se forme et se met à produire des amines aromatiques, des substances pestilentielles aux noms très évocateurs : cadaverine et putrescine. Le vagin dégage alors une odeur extrêmement mauvaise, similaire à celle d’un poisson pourri. 

"Très incommodante et virulente au quotidien, elle l’est d’autant plus après un rapport sexuel, précise le Dr Bohbot. En effet, les amines aromatiques deviennent de plus en plus volatiles et malodorantes à mesure que l’acidité du vagin diminue. Et comme le sperme est justement très alcalin, dès qu’il y a éjaculation, cadavérine et putrescine se régalent." Pendant cette période, le port du préservatif est donc conseillé.

Attention, si la vaginose bactérienne est bénigne chez la femme non-enceinte, elle peut se révéler très dangereuse en cas de grossesse comme des infections fœtales, petits poids à la naissance ou même une prématurité.

Autre infection possible : la trichomonase. Cette infection sexuellement transmissible non virale, qui touche hommes et femmes, est causée par un parasite du nom de Trichomonas Vaginalis. Elle se manifeste, entre autres, par des pertes mousseuses de couleurs jaunâtres ou verdâtres assez épaisses, parfois accompagnées d'odeurs nauséabondes (mais tout de même moins "violentes" que celles d'une vaginose bactérienne, dixit notre expert). Très répandue, elle peut pourtant passer inaperçue chez 50% des femmes qui en sont atteintes.

Comment se débarrasser des mauvaises odeurs vaginales ?

Dans un premier temps, il est nécessaire de consulter un médecin pour savoir si l'on est touchée par l'une de ces deux pathologies. Celui-ci pourra ensuite prescrire des prélèvements afin d'établir un diagnostic précis. S'il s'agit bien d'une vaginose bactérienne ou de la trichomonase, celui-ci prescrira alors un traitement antibiotique.

Mais le Dr Bohbot nous met en garde : "On sait que les antibiotiques sont efficaces à 80% à plus ou moins court terme pour traiter une vaginose bactérienne, c’est à dire qu’en l’espace de quelques jours le problème est réglé. Mais on sait qu’il y a 30% de récidives à 3 mois et 66% à 1 an. Il est donc aussi primordial de rééquilibrer la flore vaginale à l’aide de probiotiques."

Pour la trichomonase, il est indispensable de traiter également le partenaire masculin.

Hygiène intime : on ne fait pas n’importe quoi ! 

Pour éviter au maximum les infections, il est nécessaire d'apprendre les bases d'une bonne hygiène intime (et de bannir toutes pratiques dangereuses ou contre-productives).

Douche vaginale, utilisation excessive de déodorants ou lingettes intimes, port permanent de protège-slips ou encore utilisation d'ingrédients tout droit sortis de nos placards (yaourt, citron...) sont autant de causes d'un déséquilibre de la flore vaginale et donc du développement d'infections (voire de surinfections).

"Tous ces gestes et produits chimiques risquent de fragiliser les muqueuses et de bloquer des sécrétions naturelles, explique notre expert. La vulve, dans la mesure où c’est un pli, doit nécessairement rester humide. Il y a une lubrification et une hydratation naturelle qui permet d’éviter bon nombre de désagréments. Les parfums sont allergisants et sur une peau fragile comme celle de la vulve, ils peuvent provoquer de graves irritations."

Et on préfère vous prévenir : se laver 15 fois par jour ne sert à rien non plus. On fait une toilette externe maximum deux fois par jour, toujours avec un produit lavant dédié car l'eau seule peut détruire le film hydrolipidique de la peau. On n'utilise surtout pas de produits antiseptiques, qui risquent de perturber la flore vaginale et d'augmenter le risque d’infection.

Enfin, on tire un trait sur la cigarette. "Les femmes qui fument sont davantage susceptibles de développer des infections. Le tabac diminue la quantité d’hormones dans le sang et dans le vagin ce qui limite la prolifération des lactobacilles", prévient le Dr Bohbot. 

*"Microbiote vaginal : la révolution rose", paru aux éditions Marabout en janvier 2018. 

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