"Je ne veux pas le voir" répété plusieurs fois, puis : "Je ne veux pas qu'il pose son sexe sur mon sexe." Dans une vidéo qui circule depuis mi-avril, d'abord sur Whatsapp puis sur Twitter, on entend les hurlements d'une fillette qui supplie le personnel médical de l'hôpital dans lequel elle se trouve de ne pas repartir avec son père, qu'elle accuse très explicitement d'attouchements sexuels. Elle s'appelle Lily-Rose, aurait 9 ans, et serait contrainte de rester avec son père après une décision de justice.

Après deux semaines de silence, ce dernier, basé à La Rochelle, s'est confié à Franceinfo ce jeudi 2 mai, dénonçant une "instrumentalisation" : "On a voulu me faire passer pour un monstre. Les gens y vont de l’émotion la plus primaire en prenant une image sortie de son contexte." 

Une vidéo glaçante, une affaire de famille complexe

La vidéo en question aurait été enregistrée par une femme ou un homme présents au sein d'un l'hôpital martiniquais où semble s'être déroulée la scène. Un message relayé sur la Toile mi-avril l'accompagne : "On lui a enlevé la perfusion aujourd'hui et son père a débarqué aussitôt à l'hôpital pour prendre l'avion ce soir. (...) Nous étions de plus en plus nombreux dans le hall de l'hôpital pour apporter notre soutien à Lily-Rose et à sa mère, un soutien plutôt silencieux car nous voulions simplement que Lily sache qu'elle n'était pas seule. Un médecin vient nous voir et nous dit que nous ne sommes pas dans un tribunal mais dans un hôpital, et il nous demande de quitter l'hôpital. Je lui réponds que cette enfant est ici pour être soignée, que je ne comprends pas que dans cet état on la fasse sortir entre des policiers pour la remettre à son père. Il s'en va, mais quelques instants plus tard, appelés en renfort, des policiers tous très musclés arrivent et nous regardent. (...) Lily est partie avec son père, encadrée de policiers. Elle nous a fait un petit signe de la main et j'ai juste eu le temps de lui dire : "Lily-Rose nous t'aimons, nous n'allons pas t'abandonner !" Sa mère était en larmes, tenant à la main deux sacs de peluches à sa fille, impuissante car elle vient d'être condamnée à 9 mois de prison ferme pour n'avoir pas envoyé sa fille chez un père dont elle dénonce les agissements depuis l'âge [de sa fille, NDR] de 4 ans et demi (elle en a 9 aujourd'hui).(...)"

Face à l'émotion suscitée par cette vidéo, Renaud Gaudeul, procureur de la République à Fort-de-France, a rapidement apporté des précisions sur l'affaire à RCI, la radio des Antilles, le 17 avril :

"Il y a eu effectivement une plainte déposée il y a plusieurs années pour des faits d'attouchements. Simplement ces faits ont été classés sans suite - classement sans suite qui n'a pas été contesté par qui que ce soit." Et de détailler : "Depuis juillet 2015, il y a une décision de juge des affaires familiales qui a décidé que l'enfant devait être placé chez la maman mais avec un droit de visite et d'hébergement classique chez le père. Depuis cette époque-là, ce droit n'est pas respecté, de sorte que la mère a été condamnée pour ce fait de non-représentation de l'enfant."

La petite fille placée au domicile du père sur décision du parquet

Quelques jours plus tard, après avoir auditionné la mère, le parquet de la Rochelle a estimé que Lily-Rose serait en danger auprès d'elle en Martinique, précise Franceinfo. La fillette devait rentrer auprès de sa maman le 24 avril, mais a été placée provisoirement au domicile du papa dans l'attente de la décision du juge aux affaires familiales. D'après les dires du père, Lily-Rose serait au cœur d'une bataille judiciaire entre les deux parents qui se disputent sa garde.

Ce dernier clame ne pas avoir vu sa fille depuis 6 ans : "Tous les jugements sont unanimes, les propos de Lily-Rose sont plaqués à ceux de sa mère. Lily-Rose a un papa, un papa qui l’aime. Je n’ai jamais pu souhaiter un anniversaire, un Noël, une fête des pères : je n’ai rien pu partager avec ma fille depuis sa naissance", assure-t-il. D'abord placée provisaoirement au domicile du père, 'enfant a repris l'école à la Rochelle et sa mère a fait appel de sa condamnation. Le 07 mai 2019, le juge aux affaires familiales, "au vu des éléments en sa possession" a finalement fixé la résidence de Lily-Rose chez son père, à La Rochelle, accordant un droit de visite à la mère pendant les vacances, a rapporté France-Antilles.

Vidéo du jour

Des internautes choqués

En quelques heures, la vidéo qui a mis l'affaire familiale en lumière est devenue virale. Les internautes, indignés, ont interpellé la police nationale laquelle a décidé d'ouvrir une enquête face à l'afflux des signalements.

La ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a réagi aux "cris glaçants" qu'elle souhaite "comprendre". 

Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de la protection de l'enfance auprès de la Ministre des Solidarités et de la Santé, a remercié à son tour les internautes pour leur "vigilance", et a qualifié la vidéo d'"insoutenable".