Les rayons printaniers réchauffent timidement le vert tendre de la campagne angevine, ses vignes en coteaux et la hauteur toute minérale du château de Brissac, le plus haut de France. Il serait presque écrasant s'il n'était bordé d'une merveille de parc paysager.

C'est, officieusement, le jardin de Landy Rakoto, son compagnon Max et de leur chienne Belle, qui nous entraîne dans une joyeuse balade après un café servi dans une tasse – très reconnaissable à sa rondeur et son toucher si doux – signée de la céramiste. Ils vivent dans une exquise maison dont la petite porte, côté cour, donne accès au parc du château.

Vidéo du jour
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Landy Rakoto et ses mille vies

Fred Lahache / Marie Claire

La promenade tient du rituel pour Landy, qui a choisi cette nature des bords de Loire, à la fois paisible et secrète, après quelques années d'effervescence berlinoise. "J'ai vécu en immersion dans la musique électro, je jouais du synthé, j'ai fait des lives, je passais des vinyles aussi. C'était après avoir travaillé à Londres, dans le marketing, chez Aesop."

En quelques minutes, on comprend qu'à 34 ans seulement, Landy Rakoto a vécu plusieurs vies, qu'elle s'intéresse à tout et qu'elle est trop modeste pour s'étendre. Avant cela, il y a eu des études brillantes, prépa puis Centrale et l'Imperial College de Londres. Elle admet : "J'adorais les maths, j'étais bonne en sciences, au lycée." Littéraire aussi, et un peu geek.

On note que notre ingénieure de formation est aussi passionnée de photo, sait développer ses tirages, qu'elle a joué du piano, du violon et du saxo. Que sa culture malgache lui a donné une grande ouverture au monde et que sa soif d'apprendre est inextinguible.

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L'accident de roller qui a tout changé

Fred Lahache / Marie Claire

"Pendant le confinement, à Berlin, j'ai profité de la pause forcée de la musique et des concerts pour expérimenter. J'ai fait du tricot et du roller, c'est d'ailleurs une chute à rollers qui m'a conduite à choisir une activité plus calme. J'ai donc pris des cours de céramique et la chance a fait qu'il y avait un atelier communautaire à cinq minutes de chez moi où je pouvais tourner et cuire ce que je réalisais."

Un désir dont la source remonte à l'enfance : "Mes parents m'ont offert un petit tour de potier. J'aimais beaucoup le contact avec la matière. Ce qui est drôle, c'est que ma sœur a reçu un mini-atelier de menuiserie et qu'elle est devenue ébéniste."

C'est une pratique plus quotidienne mais proche de la méditation.

Sa découverte de la céramique a tout d'une épiphanie créative : "À mes débuts, il y avait quelque chose de l'ordre de la transe, j'avais envie de ne faire que ça. Aujourd'hui, c'est une pratique plus quotidienne mais proche de la méditation qui me procure un bien-être aussi physique que moral."

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Ses inspirations plurielles

Fred Lahache / Marie Claire

On l'observe, assise devant son tour,au dernier étage de la maison, dans ce grenier aménagé en atelier, avec vue sur le parc et four attenant. Concentration, calme, joie. "J'aime les formes simples. L'esthétique qui est la mienne aujourd'hui était pour ainsi dire là depuis mes débuts. Le mug que je fais est presque le même depuis le premier." 

Au nombre de ses inspirations, Landy cite le mélange d'objets d'artisanat local de la maison moderniste "très en avance pour son époque" de ses grands-parents à Madagascar, les arts populaires, l'art des Cyclades, des influences d'Amérique précolombienne. "J'aime me dire que l'humanité pratique cet art depuis toujours."

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Les coulisses de la fabrication

Fred Lahache / Marie Claire

Si les formes organiques et sensuelles qu'elle aime composent une grammaire lisible et plaisante à l'œil comme au toucher, la surprise existe bien dans cette étape si poétique qu'est l'émaillage d'une pièce : "Je verse l'émail avec un pichet sur certaines assiettes, que je tourne en fonction de mon inspiration. Il s'exprime différemment selon l'épaisseur. Certaines pièces sont émaillées au pinceau. D'autres, enfin, sont trempées dans l'émail."

Des choix qui créent l'irrégularité, donc la singularité. Tout comme la palette des pigments, un nuancier de terre, crème, ocre, moutarde, vert sombre, pas de couleurs qui flashent, bien qu'elle commence à "considérer le jaune". Et le blanc. Qui répond d'une envie qu'elle a de travailler à la vaisselle d'un restaurant. Car les produits de la terre, la manière de les accorder avec justesse, bref, la cuisine d'instinct sont l'une des passions qu'elle pratique au quotidien.

Intarissable sur les artisans du coin, elle nous invite à sa table, et sans surprise, c'est un régal. 

Cet article a initialement été publié dans le magazine Marie Claire numéro 850, daté juillet 2023.

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