C’est l’une des cheffes star des États-Unis, une frenchie venue tout droit de Bretagne. Incarnant à la perfection la vibe décontractée californienne mais aussi une réussite au féminin, Dominique Crenn est la seule cheffe à avoir obtenu les trois étoiles Michelin aux USA. En brisant ainsi, avec son restaurant Atelier Crenn à San Francisco, un plafond de verre assez pesant. L'enseigne a également reçu la certification Zerofootprint, un label indépendant qui valide les pratiques zéro déchets et zéro plastique dans la restauration.

Ce sont ces mêmes valeurs que Dominique Crenn compte amener dans sa toute nouvelle adresse parisienne, Golden Poppy. En valorisant une cuisine qui cherche à limiter son impact sur l’environnement, la carte y est uniquement pescétarienne, les produits sont (bien-sûr) locaux et saisonniers, issus de pêche et cultures vertueuses et les herbes aromatiques poussent sur le roof-top et fertilisées avec les marcs de café et les feuilles de thé infusées.

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Dominique Crenn défie l'entre-soi de la haute gastronomie

Mais cette cheffe militante s’engage sur plusieurs fronts. Dans un post Instagram, elle rappelle que dans l’industrie de la restauration les femmes sont encore sous-représentées et que cela est aggravé "par l’écart salarial persistant qui fait que les femmes continuent de gagner moins que leurs homologues masculins pour un travail égal. Malgré ces obstacles, d’innombrables femmes persistent dans leurs activités culinaires, défiant les stéréotypes et se taillant leur place".

Cette dernière milite également en faveur du mouvement anti-raciste #BlackLivesMatters ou pour les droits de la communauté LGBTQIA+ mais aussi dans la sensibilisation à la lutte contre le cancer du sein. C’est pendant ce dernier pink october, l’octobre rose américain, qu'elle a imaginé un plat éphémère pour l’Hard Rock Café, dont les recettes ont été dévolues à la recherche.

Au printemps 2024, elle rejoindra également les prestigieuses cuisines de la saison 15 de Top Chef comme jury aux côtés de ses consoeurs Hélène Darroze et Stéphanie Le Quellec. Interview.

Marie Claire : Pouvez-vous nous décrire le concept derrière votre restaurant Golden Poppy à Paris ?

Dominique Crenn : Je voulais amener la cuisine californienne à Paris. Partager sa riche culture culinaire, qui en a façonné sa gastronomie, mais aussi montrer que la cuisine n’a pas forcément besoin d’être codifiée et qu’un moment et un lieu peuvent façonner de nouveaux horizons culinaires. Cette cuisine est remplie d'umami, de créativité et de plaisir, dans une ambiance plus décontractée. C'est peut-être plus facile grâce à la Crenn touch !

Vous évoquez des origines bretonnes par vos parents, diriez-vous que celles-ci ont influencées votre cuisine ?

Je dirais que mon éducation m'a appris l'importance de respecter la nature, la mer et de ne rien tenir pour acquis. Nous ne sommes que des invités sur cette planète et nous devons communier avec la nature pour être en harmonie. Mes grands-parents étaient tous agriculteurs, l'amour de la terre était impératif dans leur façon de "cultiver" leur vie.

Qu’est-ce que vous a donné envie de retourner en France après ces années d’absence ?

Paris est pour moi un voyage personnel et intime. J'ai été adoptée à l'âge de 18 mois et j'ai découvert que pendant mes six premiers mois j'avais vécu dans les rues de Paris avec ma mère biologique, qui était une femme sans abri. En 2021, avec ma famille, nous avons acheté un appartement au centre de Paris. Le projet du restaurant a suivi et cela m’a semblé l’enchaînement naturel.

La responsabilités des chefs dans l'industrie alimentaire

Vous êtes la première femme à avoir décrochée les trois étoiles Michelin aux États-Unis. Avez-vous eu l’impression de briser un plafond de verre dans le milieu très masculin de la haute cuisine ? 

Ah, j'ai la chance d'avoir une plateforme pour inspirer les jeunes femmes et les autres. La représentation féminine est importante et cette industrie en a besoin.

Sentez-vous une évolution des mentalités entre le début de votre carrière et aujourd’hui ?

Je pense plutôt à une sensibilisation sur la manière de cuisiner. Je dis toujours "réfléchissez avant de cuisiner", ce qui signifie que l’histoire ne débute pas avec le plat, elle commence dès le semis des graines, avec les agriculteurs, les éleveurs, les pêcheurs. Comment ces ingrédients ont été traités, etc... Je crois que de plus en plus de chefs sont conscients de la responsabilité qu'ils ont dans ce monde.

Et si vous deviez conseiller un plat au Golden Poppy ?

Le banana pancake, koji, caviar "Osciètre" fumé et sa sauce de poisson caramel. Un régal !

Vos 2 adresses parisiennes coups de coeur ?

Ça serait le restaurant Bouche dans la rue Jean-Pierre Timbaud et le restaurant Caché à la Villa Riberolle, dans le 20e !

Avez-vous des adresses fétiches en Bretagne ?

Le Bistrot du Bac à Sainte Marine-Combrit, l’Auberge des Glazick du chef Olivier Bellin à Plomodiern, la Crêperie Ty Coz à Locronan et la boulangerie Le Guillou à Locronan, qui propose les meilleurs Kouign Amann et gâteau breton du coin !