En théorie, les congés provoquent en nous un sentiment de bonheur, d’extase et d’impatience. Un cocktail coloré et savoureux qui ne manque toutefois pas d’être épicé par quelques ingrédients indésirables, comme la culpabilité.

Se retrouver dans un tel état durant une période aussi propice à la détente peut sembler étonnant, pourtant il est bien plus commun qu’on ne le pense. Comment en arrivons-nous là et comment éviter ce malaise intérieur, qui pourrait bien nous gâcher l’une des plus belles périodes de l’année ?

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En finir avec le mythe des vacances "parfaites"

S’il est étonnant d’associer vacances et culpabilité, un lien existe bien entre les deux. La faute souvent à un certain perfectionnisme. "Imprégner les vacances de l’idée de perfection est autodestructeur à bien des égards, car aucune vacance ne sera parfaite", annonce d’emblée la psychologue clinicienne Carla Marie Manly au site Well and Good. Une envie de vacances "parfaites" qui sont est aussi nourrie par les partages de nos amis et collègues sur les réseaux sociaux

Avant le grand départ, notre imagination se focalise sur une météo parfaite, des activités variées et multiples, des soirées mémorables ou encore une eau salée des plus agréables. Rien de plus normal pour une période aussi attendue et perçue comme un moment précieux.

Mais force est de constater que tous ces critères sont rarement remplis et que le scénario imaginé est loin de correspondre à la réalité.

Accepter les imperfections de l’expérience vécue

Alors, lorsque les vacances ne se sont pas déroulées comme on le voulait ou n’ont pas répondu à nos attentes vient la culpabilité.

"On se sent coupable d’avoir rêvé, de ne pas avoir été réaliste et de s’être laissé aller à l’idéalisation", analyse France Brécard, psychopraticienne spécialisée en analyse transactionnelle. "Et si ce n’est pas exactement comme on le voulait, on peut aussi être en colère".

L’experte confirme qu’il est plus courant de ressentir un tel sentiment lorsque l’on a une personnalité contrôlante ou que l’on est assez perfectionniste. "On a essayé de tout contrôler ou on n'a pas pu tout prévoir, donc cela ne fonctionne pas comme on le souhaite et cela se retourne contre nous", résume-t-elle.

Ici, il convient de comprendre que peu importe à quel point nos vacances sont planifiées, elles regorgent toujours de surprises : vols retardés, météo capricieuse, conflits avec nos proches, hôtel décevant…

Lorenzo Norris, professeur agrégé de psychiatrie et de sciences du comportement, indique à Well and Good que les personnes qui voyagent souhaitent généralement atteindre l’un des quatre objectifs suivants : la relaxation, la connexion avec autrui, la réflexion et l’aventure.

Mais la façon avec laquelle cela se produit a son importance. "Il se peut que l’on se concentre tellement sur la tâche à accomplir que l’on ne se soucie plus de l’expérience vécue. Parce que tout n’a pas été aussi bien qu’il aurait pu l’être, ou que vous l’aviez espéré, les vacances n’ont soudain plus aucune valeur", explique le docteur Norris.

Quid de la culpabilité de quitter temporairement son poste ?

En dehors de la culpabilité liée aux imprévus subsistent aussi celle causée par le travail. En quittant temporairement son bureau, les appréhensions se multiplient. Combien de temps me faudrait-il pour rattraper mes quelques jours de congés ? Ai-je laissé mes collègues dans l’embarras, obligés de prendre le relais ?

Ces questions sont suffisamment puissantes pour rendre parfois difficile la déconnexion totale. Pour preuve, une étude réalisée par la plateforme d’offre d’emploi Monster, et relayée par Les Echos, avance que 35% des Français acceptent de travailler durant leurs congés, un nombre en constante augmentation depuis dix ans. Un autre sondage relayé par le magazine Forbes indiquait également que 71% des Français répondaient aux emails ou appels professionnels durant leurs vacances.

Pourtant, il est important de "se rappeler que le repos est productif", souligne Emily Button-Lynham, coach professionnelle, au magazine Stylist UK. La société nous a conditionnés à être constamment occupé à faire quelque chose, au point d’en négliger nos besoins.

"Mais le repos est également important : il nous permet de stabiliser notre système nerveux et est bénéfique pour notre santé mentale, physique et spirituelle", ajoute la coach.

Alors, la clef est de prendre conscience de ce qu’il se passe réellement lorsque l’on prend des vacances. Y a-t-il eu des urgences qui n’auraient pas pu être gérées sans votre présence ? Si ce n’est pas le cas, cela devrait vous donner de l’assurance pour partir et réellement vous éloigner du travail.

Comment ne plus s'en vouloir quand nos vacances ne se passent pas comme prévu ?

Dans le cas où la culpabilité est liée à des vacances "décevantes", il peut être envisageable de fixer, à l’avenir, des attentes claires et réalistes sur cette période de congés. Il sera ainsi plus simple de déterminer ce que l’on veut et de planifier ses journées en fonction de cela.

"Si vous vous fixez des objectifs, vos attentes sont très claires et vous pouvez aborder les vacances avec un état d’esprit sain, prêt à gérer la nature naturellement imparfaite de toute vacances", déclare Carla Marie Manly à Well and Good.

Il faut aussi ressentir la culpabilité et l’accepter. C’est une émotion importante que ne devient un problème que si l’on s’y attarde. Là, France Brécard invite les personnes qui se sentent coupables à ne plus ressasser.

"On peut se dire que c’est terminé, car la période est passée", conseille notre experte. "La culpabilité est un sentiment normal qui fait grandir quand on a fait du mal à quelqu’un, mais se sentir coupable de ne pas avoir vécu les choses d’une façon précise est un peu névrotique", ajoute-t-elle.

Bien entendu, la culpabilité est un sentiment difficile à gérer. La société actuelle et les réseaux sociaux qui l’accompagnent ne sont pas non plus de véritables alliés. "D’une petite chose qui consiste à se dire que ces vacances n’étaient pas si bien, on en vient à regarder les photos de ses ami.e.s sur des plages idylliques dans des hôtels parfaits et on ne sent pas à la hauteur", met en garde la psychopraticienne.

Il peut être aussi libérateur de se focaliser sur la gratitude, car tout n’est pas tout blanc ou tout noir. Certains moments peu agréables durant ces congés ont été accompagnés d’autres moments plus joyeux et mémorables. Et n'oubliez pas que le but principal des vacances est de se reposer, pour de vrai.