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Le square René Le Gall, le 28 avril 2024.
ALIOCHA BOI POUR « LE MONDE »

C’est l’histoire d’une rue : Croulebarbe, du lit de la Bièvre au premier gratte-ciel d’habitation

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Publié le 03 mai 2024 à 16h00, modifié le 03 mai 2024 à 17h46

Temps de Lecture 5 min.

Et au milieu coulait la Bièvre : l’histoire de la rue Croulebarbe pourrait porter le titre d’un film américain. Le long de ses trottoirs, des plaques en bronze émaillent encore le bitume, faisant resurgir l’ancien lit de cette emblématique rivière parisienne qui traversait autrefois le 13e arrondissement de Paris. L’intriguant nom Croulebarbe vient, lui, de Jean de Croulebarbe, qui, au XIIIe siècle, possédait des moulins et des vignes à cet endroit.

C’est le « ruisseau des Gobelins », tel qu’est surnommée la Bièvre sur certaines vieilles cartes, qui va modeler la rue. Le long du cours d’eau, qui prend sa source dans les Yvelines, plusieurs biefs seront construits – dont un à Croulebarbe – pour augmenter son débit. L’homme modifie ainsi le cours de la Bièvre, la dédouble même pour obtenir un « bras mort » (lit d’origine) et un « bras vif » (cours artificiel). Et ce, afin d’alimenter les moulins à eau ainsi que les tanneries, les teintureries, les mégisseries, les lavandières qui envahissent les berges parisiennes.

Mais à trop contrarier la nature, l’histoire finit souvent mal. Pour l’écrivain parisien Joris-Karl Huysmans (1848-1907), « la Bièvre représente le plus parfait symbole de la misère féminine exploitée par une grande ville », écrit-il dès 1901, évoquant le sort des filles de la campagne venant travailler au bord de la rivière, avalées par la violence de la capitale. La section de la rivière rue Croulebarbe et rue Berbier-du-Mets vient alors tout juste d’être enterrée pour devenir un égout. Les rejets polluants ont peu à peu envahi le cours d’eau jusqu’à son asphyxie nauséabonde. Pour stopper ce désastre, on ensevelit la Bièvre dès la fin du XIXe siècle rue Croulebarbe et ailleurs dans Paris.

Marie-Noëlle Grimaud, dans son atelier de reliure au 51, rue Croulebarbe, le 28 avril 2024.

« Derrière les palissades de la rue Croulebarbe », comme le disent les écrits de l’époque, se joua aussi un autre drame. Le 25 mai 1827, Aimée Millot, dite « la bergère d’Ivry », meurt sous les coups de couteau d’un amoureux éconduit. Une petite place triangulaire qui se tient aujourd’hui à l’angle de la rue Corvisart est dédiée à cette bergère de 19 ans. Ce féminicide va révolter Paris, et le jeune assassin finira sur l’échafaud. Victor Hugo, qui venait jusqu’à Croulebarbe pour passer du bon temps au célèbre Cabaret de Madame Grégoire (au nᵒ 41), écrit dans la foulée un roman engagé contre la peine de mort (Le Dernier Jour d’un condamné, 1829). Depuis 2021, une autre petite place, malheureusement à peine visible, à la jointure avec la rue Berbier-de-Mets, rend aussi hommage aux femmes victimes de violence.

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