Impulsivité, addictions, comportements à risque et agressivité envers soi et les autres : le trouble de la personnalité limite se manifeste sous bien des formes, souvent toutes à la fois. On estime qu’il serait responsable de 2000 suicides par an, bien que le trouble soit encore mal diagnostiqué. Mais, contrairement à la bipolarité, avec laquelle il est souvent confondu, le trouble de la personnalité borderline se soigne. 

Pour le lancement de l’application “Borderlines Anonymes”, Pierre Nantas, psychothérapeute et fondateur de l’association Aforpel (Association pour la formation et la promotion de l’état limite) nous a explique ce que vivent les borderline au quotidien et comment les reconnaître.

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Être toujours à la limite

Sentiment de vide intérieur, addictions, accès de colère, agressivité (envers soi et les autres) et tendances suicidaires : lourd est le lot des borderlines. Neurologiquement parlant, les borderlines ont un déséquilibre de la sérotonine, hormone qui régule l’humeur, et de la dopamine, qui gère le plaisir et la récompense.

D’après Pierre Nantas, faute d’aide, beaucoup d’entre eux et elles finissent en hôpital psychiatrique ou en prison.

Confondu avec la bipolarité

Le trouble de la personnalité borderline limite est souvent confondue avec la bipolarité. Pourtant, ces deux maladies sont bien distinctes. 

Les bipolaires ont des épisodes psychotiques ponctuels, rythmant un état de dépression quasi constant. Les borderline, eux, peuvent passer d’un état à l’autre plusieurs fois au cours de la même journée. Attention également de ne pas le confondre avec de l’hyper-émotivité, qui n’est pas un trouble mais plutôt un trait de personnalité. 

Si une personne bipolaire l’est souvent de manière héréditaire, on “devient” borderline à la suite d’événements traumatisants. 

Un diagnostic compliqué

Le trouble de la personnalité limite souffre d’un problème majeur : le diagnostic. Il est à la fois sur et auto-diagnostiqué, via Internet et les réseaux sociaux, 

Pourtant, paradoxalement, le trouble est en réalité sous-diagnostiqué. En cause, le manque d’information et de formation des thérapeutes et psychiatres sur le sujet. En pratique, on oriente trop souvent les patients vers les troubles bipolaires. Un mauvais diagnostic peut alors s’avérer dangereux, car les médicaments lourds comme le lithium, prescrits aux bipolaires, ne sont pas adaptés aux borderlines.

De plus, on observe que les borderline n’ont tendance à aller consulter qu’en tout dernier recours, comme lorsqu’ils sont à l’hôpital, dans un état grave.

Comment devient-on borderline ?

Le TPL est un trouble de l’attachement qui se développe au cours de l’enfance, avant l’âge de huit ans. Il affecte la manière dont on interagit avec les autres : la peur de l’abandon et la demande d’affection sont ainsi souvent démesurées chez les borderline. 

D’après Pierre Nantas, le déclencheur est, dans presque tous les cas, un traumatisme. Le psychothérapeute observe ainsi que dans 90 % des cas, il s’agit d’abus sexuels. La population de personnes présentant un TPL est en hausse. Selon le psychothérapeute, l’utilisation des réseaux sociaux pourrait accentuer les symptômes, en nourrissant la mauvaise image d’eux-mêmes qu’ont les Borderlines.

Une maladie qui se soigne 

Malgré tout, ce trouble de la personnalité peut se soigner. Une prise de médicaments de deux mois maximum, accompagnée de six mois à deux ans de thérapie sont généralement indiquées. 

Un test préalable et un annuaire des thérapeutes compétents sur la question sont disponibles sur le site web de l'Aforpel. Celle-ci a également lancé la version bêta d’une application, “Borderlines anonymes”. Il s’agit d’une aide à la thérapie : le patient évalue ses émotions grâce à un questionnaire, plusieurs fois par jour, et tient un journal de son évolution. Il peut ainsi faire le bilan quotidiennement, par semaine ou par mois, et voir comment se répartissent au cours du temps les émotions principales : peur, joie, tristesse, colère. L'application est gratuite ; disponible sur Android et Apple. 

Néanmoins, en France, des études peinent à être réalisées, comme c’est le cas au Canada par exemple, et retardent la prise en charge des patients par la Sécurité sociale.