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"François Duprat, l'homme qui inventa le Front national", de Nicolas Lebourg et Joseph Beauregard : FN, le fondateur oublié

L'historien et le documentariste se sont attelés à la tâche ardue de reconstituer l'itinéraire politique et personnel d'un homme qui n'a cessé de cloisonner ses vies et qui ne rechignait pas à les inventer quand cela lui semblait nécessaire.

Par Abel Mestre et Caroline Monnot

Publié le 20 février 2012 à 14h10, modifié le 20 février 2012 à 14h10

Temps de Lecture 2 min.

Couverture de l'ouvrage de Nicolas Lebourg et Joseph Beauregard,

Qui était François Duprat ? Personnage mystérieux et fondamental de l'extrême droite française, sa mort mystérieuse dans un attentat à la voiture piégée, le 18 mars 1978, la veille du premier tour des élections législatives, lui a laissé une image de martyr de la "cause nationale" dans sa famille politique.

L'historien Nicolas Lebourg et le documentariste Joseph Beauregard se sont attelés à la tâche ardue de reconstituer l'itinéraire politique et personnel d'un homme qui n'a cessé de cloisonner ses vies et qui ne rechignait pas à les inventer quand cela lui semblait nécessaire. Tout lui fut prêté : flic, indic, homme du KGB, du Mossad, de la CIA, des Syriens, payé par Kadhafi, Arafat et autres suppositions encore.

Cette biographie contient foule de détails et d'analyses politiques passionnantes. Les auteurs ont retrouvé tous les témoins essentiels, que cela soit la famille de Duprat, ses camarades de combat, ses adversaires, ses ennemis. Car, s'il a été oublié du grand public, Duprat eut un rôle fondamental dans la naissance et l'ascension finale du Front national.

Duprat s'engagea d'abord, lors de la guerre d'Algérie, à Jeune Nation, groupe d'extrême droite violent créé par Pierre Sidos, faisant partie de la galaxie OAS. Duprat fera par la suite partie de toutes les aventures d'extrême droite, d'Occident au FN, donc, en passant par la Fédération des étudiants nationalistes et Ordre nouveau. Souvent, il s'en fera exclure. A chaque fois, il imprimera son influence théorique sur ces groupuscules, jusqu'à devenir le véritable intellectuel organique de l'extrême droite.

Mais Duprat n'était pas qu'un simple activiste parisien. Fasciné par les services de renseignement et les doubles (voire triples) jeux, il émargeait aux Renseignements généraux, où il informait son officier traitant des vicissitudes de sa famille politique. Il ira aussi au Nigeria et au Congo, en pleine décolonisation, pour aider le camp anticommuniste. Car cet enfant de résistant, issu d'une famille de gauche, était d'un anticommunisme total. Et d'un antisémitisme profond. Il fut ainsi le premier à diffuser des ouvrages négationnistes en France. Et à revitaliser l'antisémitisme en combinant négationnisme et antisionisme.

Au début de l'aventure FN, il est, avec ses Groupes nationalistes révolutionnaires (GNR), l'aile radicale. Mais cela ne l'empêche pas d'influer fortement la ligne et le discours du parti. C'est lui par exemple qui souffle à Jean-Marie Le Pen une expression devenue une des marques du parti d'extrême droite : le fameux "Un million de chômeurs, c'est un million d'immigrés en trop".

Le legs de Duprat, le FN ne l'assume plus. Trop sulfureux. Pourtant, il est bel et bien toujours présent. Et particulièrement aujourd'hui. Le positionnement économique et social défendu par Duprat au FN et le prétendu "nouveau" discours de Marine Le Pen présentent des similitudes frappantes.

L'assassinat de Duprat est méthodiquement étudié. Les auteurs décrivent avec force détails les circonstances de sa mort. Ils passent en revue toutes les hypothèses quant aux responsables de celle-ci. Au fil des pages se dessine le portrait d'une époque où la politique était l'affaire d'une vie, et où l'on ne renonçait à aucun moyen, violence et meurtres compris, pour arriver à ses fins.


FRANÇOIS DUPRAT, L'HOMME QUI INVENTA LE FRONT NATIONAL de Nicolas Lebourg et Joseph Beauregard. Denoël, collection Impacts, 382 p., 23,50 €.

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