Le Conseil constitutionnel doit rendre, vendredi 14 avril, deux de ses décisions les plus attendues de la période récente. L’une est relative à la loi de financement rectificative de la sécurité sociale, laquelle fixe à 64 ans l’âge d’ouverture du droit à la retraite ; l’autre a trait à une proposition de loi en vue d’un référendum d’initiative partagée (RIP), laquelle entend que cet âge soit fixé à 62 ans au maximum.
Lorsque au moins 185 parlementaires ont déposé une proposition de loi RIP, le Conseil constitutionnel doit en vérifier la conformité avec la Constitution, en prenant en compte les données de fait et de droit, à la date où il a été saisi – le 20 mars. S’il n’est pas contesté que le RIP « retraite à 62 ans » remplit d’évidence la quasi-totalité des prescriptions constitutionnelles, la première ministre a déposé des observations demandant au Conseil constitutionnel de rejeter cette proposition de loi référendaire, au motif qu’elle ne véhiculerait pas une « réforme » de politique sociale de la nation au sens de l’article 11.1 de la Constitution, dès lors qu’au 20 mars l’âge de départ à la retraite est déjà établi par la loi à 62 ans.
Le Conseil constitutionnel a auditionné, le 4 avril, une partie des parlementaires. Les membres de l’institution leur ont posé une seule question sur le RIP : ce dernier peut-il être analysé comme une « réforme » ? Ce terme a été introduit à l’article 11 de la Constitution par une loi du 4 août 1995 signée par Alain Juppé, alors premier ministre et désormais conseiller constitutionnel, auquel le président Laurent Fabius a confié le soin d’être rapporteur sur le sort à réserver à la proposition de loi RIP. L’interrogation quant à sa portée est décisive, car elle conditionne la suite à donner au RIP, en premier lieu l’ouverture pour neuf mois de la phase de recueil d’au moins 4,8 millions de soutiens préalables à un éventuel référendum.
Une portée propre
Le Conseil constitutionnel pourrait, à première vue, avoir un argument en faveur du rejet pour inconstitutionnalité de la proposition de loi RIP, puisque, dans le langage courant, une « réforme » implique un changement majeur par rapport à l’existant. Une telle position aurait le mérite politique de correspondre aux intérêts du gouvernement, dont plusieurs des membres du Conseil constitutionnel ont été proches, de par leurs parcours. Mais, d’une part, la proposition de loi RIP contient une « réforme » au sens classique de ce terme. La législation actuelle comporte en effet un plancher, puisqu’elle prévoit l’ouverture du droit à pension « à partir de l’âge » fixé par différents textes. La proposition de loi RIP comporte un plafond, car elle vise à inscrire un maximum en matière d’âge légal de départ à la retraite, lequel « ne peut être fixé au-delà de 62 ans », ce qui milite en faveur d’une tendance à la réduction de cet âge légal.
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