Aller au contenu

Mansur al-Hallaj

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Mansur al-Hallaj
La pendaison d'al-Hallaj en 922, anonyme (1602),
Ashmolean Museum, Oxford, Angleterre.
Biographie
Naissance
Décès
Nom dans la langue maternelle
الحسين بن منصور الحلاجVoir et modifier les données sur Wikidata
Activités
Autres informations
Maîtres
Condamné pour

Mansur al-Hallaj (nom complet : Abū `Abd Allah al-Ḥuṣayn Manṣūr al-Ḥallāj ; arabe : منصور الحلاج ; persan : منصور حلاج, Mansūr-e Ḥallāj), né vers 858 (244 de l'Hégire) et mort le (309 de l'Hégire) à Bagdad, est un mystique persan[1] soufi d'obédience sunnite[2],[3]. Il est l'auteur d'une œuvre abondante visant à renouer avec la pure origine du Coran et son essence orale et littéraire.

C'est à Louis Massignon, spécialiste de la mystique islamique et qui fut son premier traducteur dans une langue européenne, que le lecteur occidental doit la redécouverte des textes d'al-Hallaj[4].

Mansur al-Hallaj est probablement né en 244 de l'Hégire (vers 858 du calendrier grégorien) dans la province du Fars en Iran. Selon la tradition, son grand-père était un zoroastrien et descendait de Abu Ayub, un compagnon de Mahomet[réf. nécessaire]. Son père vint travailler dans la ville de Wasit et se lança dans le commerce de la laine. Son nom, al-Hallaj, signifie : le cardeur de laine.

Peu satisfait par l'enseignement traditionnel du Coran et attiré par une vie ascétique, al-Hallaj fréquenta des maîtres du soufisme comme Sahl ibn ‘Abd Allāh al-Tustārī (qui fut son premier maître), 'Amr ibn 'Uthman al-Makki, Ibn 'Aṭâ al-Adamî, et Abu al-Qasim al-Junayd, alors hautement respectés.

Al-Hallaj épousa la fille du maître soufi Abu Ya'qub al-Aqta' avec qui il eut trois fils.

Al-Hallaj voyagea beaucoup et fut prédicateur en Iran, puis en Inde et jusqu’aux frontières de la Chine. Rentré à Bagdad, il est suspecté aussi bien par les sunnites que par les chiites pour ses idées mystiques (recherche de l'amour divin et de l'union de l'âme et de Dieu) et son influence sur les foules. Il est — faussement — accusé d'avoir participé à la révolte des Zanj.

Emprisonnement et condamnation

[modifier | modifier le code]

Sa condamnation proprement dite est due à certaines formules qu'il énonce en public et qui scandalisent les juristes (faqîh) sunnites, et dont la plus célèbre est « Ana al haqq » (« Je suis la Vérité [c'est-à-dire Dieu] »)[5]. Cela fut considéré comme une hérésie, aussi bien dans le sunnisme que dans le chiisme.

Accusé aussi de pratiquer de faux miracles et d'être mêlé à des intrigues politiques, il est arrêté et reste en prison durant neuf ans. Finalement, il est jugé et, à l'issue du procès, condamné à mort, et ce malgré le soutien de hauts dignitaires de la cour. Il est crucifié à Bagdad le [5],[6].

Il restera un des plus célèbres condamnés soufis et son supplice sera mentionné de nombreuses fois, par exemple dans les écrits de Rûmî.

Descendance

[modifier | modifier le code]

Les disciples de Hallaj iront chercher refuge en divers endroit, principalement en Iran où ils trouveront un appui auprès des dynasties turques récemment implantées et converties. C'est ainsi que leurs apports développeront le soufisme, et que la mystique musulmane va trouver sa forme confrérique qui se répandra dans tout l'Islam[5].

Ana al-haqq

[modifier | modifier le code]

La recherche d'une relation directe avec Dieu est perçue par l'islam officiel comme une rupture intolérable de la charia[7]. Cependant, cette affirmation (« je suis la Vérité »), si elle ne doit, en principe, pas être publique, n'est pas incongrue dans le milieu soufi où ce genre de propos est considéré comme émanant d'un homme qui, « fondu » dans l'« océan de la divinité », possède un rang spirituel très élevé. Les traductions de Louis Massignon viennent appuyer cette thèse, la plupart des versets du Diwan de Hallaj traitant de la « science de l'Unité » (panthéisme).

La poésie de Hallaj est continuellement traversée par la notion d'union mystique[8].

« Informe la gazelle, ô brise, dans ta course,

Que ma soif est accrue quand je puise à sa source !

Et cette Bien-aimée, dans mes boyaux soustraite,

Si Elle le voulait, courrait sur mes pommettes !

Son esprit est le mien et le mien est le Sien,

Ce qu’Elle veut je veux et mon vœu Lui convient ! [9]. »

« Quelle terre est vide de Toi pour qu'on s'élance à Te chercher au ciel ? Tu les vois qui Te regardent au grand jour mais aveugles ils ne Te voient pas. »

— Poèmes Mystiques traduits par Sami-Ali (Albin Michel, 1998).

« Par orgueil je refusais le bonheur de l'amour. Et je subis le châtiment de l'orgueil. »

— Poèmes Mystiques traduits par Sami-Ali (Albin Michel, 1998).

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. (en) John Arthur Garraty, Peter Gay, The Columbia History of the World, Harper & Row, 1981 (ISBN 0-88029-004-8), p. 288.
  2. (en) Gavin D'Costa, Vatican II: Catholic Doctrines on Jews and Muslims, Oxford University Press (lire en ligne), p. 186 : « ...focused on the Sunni mystic al-Hallaj... ».
  3. (en) N. Hanif, Biographical Encyclopaedia of Sufis: Central Asia and Middle East, Sarup & Sons (lire en ligne), p. 188 : « Al Hallaj, in fact, remained always a Sunni, with a strong leaning towards hard asceticism in observing the Ramadan fasts... ».
  4. Pierre Lory (compte-rendu), « Stéphane Ruspoli, Le message de Hallâj l’Expatrié – Recueil du Dîwân, Hymnes et prières, Sentences prophétiques et philosophiques », Revue de l’histoire des religions, no 4,‎ , p. 496–498 (ISSN 0035-1423, lire en ligne, consulté le )
  5. a b et c Jacqueline CHabbi, « Martyre de al-Ḥallādj », sur universalis.f (consulté le )
  6. Cyrille Aillet, Emmanuelle Tixier, Eric Vallet, Gouverner en Islam, Xe – XVe siècles, Atlande, , 500 p. (ISBN 978-2-350-30273-7)
  7. Entretien avec Marie-Thérèse Urvoy, « L'islam dans sa réalité », La Nouvelle Revue d'histoire, n°89 de mars-avril 2017, p. 6-9
  8. (ar) Kâmil Mustafâ Al-Shaybî Sharh dîwân Al-Hallâj (« Explications du Diwân d'al-Hallâj »), Éd. Al-Kamal, 2007
  9. Cf. L'amour universel, un cheminement soufi, Idrîs de Vos, Al-bouraq, 2013, p.193.

Bibliographie

[modifier | modifier le code]

Traductions en français

[modifier | modifier le code]
  • Diwan, poèmes traduits et présentés par Louis Massignon, Paris, Seuil, 1955.
  • Akhbar al-Hallaj. Recueil d'oraisons et d'exhortations du martyr mystique de l'islam Husayn Ibn Mansur Hallaj, Trad. et annotation par Louis Massignon et Paul Kraus, Paris, Vrin, coll. « Études musulmanes », 1975 [1957]. Edition bilingue.
  • Poèmes mystiques traduits et présentés par Mahmoud Sami-Ali, Paris, Albin Michel, 1998.

Études (par année de publication)

[modifier | modifier le code]

Liens externes

[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :