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Campylobacter

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Campylobacter (du grec καμπύλος, courbe) est un genre de bactéries Gram négatif, micro aérophiles, oxydase positive, non sporulantes provoquant des intoxications alimentaires. Elles sont présentes dans l'intestin de nombreux animaux, d'élevage notamment.

Ils sont considérés comme source de zoonose dans les élevages, et comme étant la principale cause bactérienne de gastro-entérites humaine dans le monde, avec une incidence croissante dans les pays développés, qui pourrait notamment être due à la concentration du bétail[1].

Description

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Exigeantes, ces bactéries peuvent se présenter sous forme de bacilles légèrement incurvés voire spiralés (cultures jeunes) ou coccobacillaires (cultures âgées). Ils sont cultivés sur gélose Columbia au sang en microaérophilie.

Le genre Campylobacter contient 17 espèces dont les principales sont C. jejuni, C. coli responsables d'entérites et C. fetus responsable de septicémies chez l'immunodéprimé.

Épidémiologie

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Le Centre national de référence Campylobacter et Helicobacter est situé à Bordeaux (Pr Mégraud)[2]. La proximité d'animaux d'élevages ou l'ingestion de fruits et légumes non lavés sont des facteurs de risque[3]

La campylobactériose est actuellement la zoonose la plus fréquemment signalée dans l'Union européenne. Un récent rapport indique que de 50 % à 80 % des cas de campylobactériose humaine pourrait être attribuée au poulet (espèce réservoir[4])[5]. On a récemment montré en Norvège que certains facteurs augmentent le risque de zoonose dans un élevage de poulet de chair

  • Température quotidienne moyenne supérieure à 6 °C au cours de la période d'élevage (alors qu'une température inférieure à zéro réduit le risque)[4] ;
  • l'approvisionnement privé en eau[4] ,
  • présence d'autres élevages dans un rayon de 2 km[4],
  • présence d'autres élevages dans un rayon de 4 km, positifs aux Campylobacter spp. dans les 30 jours avant l'abattage[4],
  • forte pluviométrie 11-30 jours avant l'abattage[4].

L'environnement agricole est facteur de risque, le ruissellement et les mouches étant susceptibles de transporter le microbe (l'activité des mouches augmente avec la température)[4]

Les bactéries du genre Campylobacter (C. jejuni, C. coli surtout) sont à l'origine de manifestations cliniques variées, où les entérites dominent largement : diarrhée, accompagnée de fièvre et de douleurs abdominales, après une période d'incubation de deux à cinq jours. Plus rarement, des complications post-infectieuses peuvent se produire : arthrite réactionnelle, syndrome de Guillain-Barréetc.

Campylobacter fetus donne quant à lui rarement des entérites, il provoque le plus souvent des syndromes fébriles prolongés compliqués d'atteintes focales touchant surtout l'endothélium vasculaire (endocardites, anévrismes de l'aorte, thrombophlébites). Ces infections surviennent dans la grande majorité des cas chez des malades souffrant d'une pathologie sous-jacente (cirrhose, cancer, diabète, immunodéficience). La survenue d'une infection à C. fetus durant la grossesse est toujours favorable pour la mère, alors que la mortalité fœtale est élevée.

Les autres espèces de Campylobacter donnent les infections suivantes :

  • Campylobacter upsaliensis : à rapprocher de C. fetus. Il peut donner des entérites chez les patients immunocompétents, accompagnées de bactériémies chez les immunodéprimés ;
  • Campylobacter lari : diarrhées aiguës chez l'enfant, septicémies chez l'immunodéprimé ;
  • Campylobacter hyointestinalis : diarrhées hydriques chez l'enfant ;
  • Campylobacter consisus, C. curvus, C. rectus, C. gracilis, C. showae : associés à des parodontopathies.

Le diagnostic est le plus souvent direct (coproculture) et repose sur l’isolement de la souche dans les selles, sur milieux sélectifs, incubés en microaérophilie (atmosphère appauvrie en oxygène). L'adjonction de 5 % de dioxyde de carbone à l'atmosphère d'incubation ne peut être que bénéfique à la primo-culture.

Le réservoir est surtout animal : les Campylobacter sont des bactéries commensales du tube digestif de nombreux oiseaux et mammifères (poulets, mouettes…, humains, bovins, ovins, porcins, chats, chiens, mammifères marins, hamsters). Les oiseaux, le poulet en particulier, peuvent être considérés comme réservoirs naturels de Campylobacter jejuni. Cette bactérie vit au niveau du cloaque des oiseaux où elle est présente à de fortes concentrations. Cette colonisation n'a aucune conséquence pathologique pour les oiseaux.

Dans les abattoirs européens, 87.5% des poulets entiers sont porteurs à la dose moyenne de 2.4 log10 UFC/g de peau de cou. 15.4% des poulets dépassent 1000 UFC/g (enquête de 2008 dans 58 sites)[6]

La transmission est majoritairement alimentaire après consommation d’aliments contaminés, consommés pas ou insuffisamment cuits (poulet surtout, porc, lait, etc.) ou d’eau. La transmission peut aussi être directe, interhumaine ou par contact avec des animaux infectés. Selon l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA), 20 à 30% des cas de campylobactériose humaine sont dus à la consommation de viande de poulet mal cuite ou après contamination croisée à la maison. "Il s'agit là de faits isolés. Dans le cas d'une épidémie, les sources principales sont le lait cru et l'eau du robinet contaminée à la suite d'un problème de traitement des eaux".

Le contamination pourrait également se produire lors de rapports sexuels, notamment homosexuels[7].

La maladie apparaît de manière sporadique le plus souvent, mais peut aussi à l'origine de TIAC (toxi-infections alimentaires collectives) plus spectaculaires car épidémiques et doit dans ce cas être déclarée comme telle aux autorités sanitaires (maladie à déclaration obligatoire, DO).

Milieux de culture

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Enrichissement des Campylobacter sur des milieux nutritifs : Preston 1/10 ou Park et Sanders 1/10.

Dans un second temps, isolement sur milieux gélosés sélectifs type Skirrow ou Karmali, incubés 48 heures en microaérophilie, à 25 °C, 37 °C ou 42 °C selon les espèces.

Finalement, identification à l'aide des caractères biochimiques (catalase, oxydase, hydrolyse de l'hippurate, résistance à l'acide nalidixique, résistance à la céfalotine) et d'une galerie biochimique.

Prévalence

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  • En France, les Campylobacter sont responsables d'environ 493 000 infections par an (21 cas pour 100 000 habitants par an), dont une quinzaine de décès (0,02 pour 100 000 hab.)[8].
  • Le rapport de l'InVS de 2010 indique 145 cas confirmés pour 2010, et aucun décès[9].


Le traitement de référence est l'azythromycine, ou l'érythomycine[10]

Selon une étude menée par des chercheurs de la Washington State University[11], l'ail serait cent fois plus efficace que certains antibiotiques pour venir à bout des biofilms des Campylobacter jejuni.

Références

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  1. (en) Graham B. McBride et Steven C. Chaprab, « New hydroepidemiological models of indicator organisms and zoonotic pathogens in agricultural watersheds », Ecological Modelling, vol. 222, no 13,‎ , p. 2093–2102 (DOI 10.1016/j.ecolmodel.2011.04.008)
  2. * [1] Centre national de référence Campylobacter et Helicobacter, Pr Mégraud, Université Victor-Segalen Bordeaux 2, 146 rue Léo-Sagnat, BP 76, 33076 Bordeaux Cedex.
  3. (en) L. Verhoeff-Bakkenes, H.A.P.M. Jansen, P.H. in 't Veld, R.R. Beumer, M.H. Zwietering et F.M. van Leusden, « Consumption of raw vegetables and fruits: A risk factor for Campylobacter infections », International Journal of Food Microbiology, vol. 144, no 3,‎ , p. 406-412 (DOI 10.1016/j.ijfoodmicro.2010.10.027)
  4. a b c d e f et g (en) ME. Jonsson, M. Chriél, M. Norström et M. Hofshagen, « Effect of climate and farm environment on Campylobacter spp. colonisation in Norwegian broiler flocks », Preventive Veterinary Medicine,‎ (PMID 22673580)
  5. (en) SW McDowell, FD Menzies, SH McBride, AN Oza, JP McKenna, AW Gordon et SD Neill, « Campylobacter spp. in conventional broiler flocks in Northern Ireland: epidemiology and risk factors », Preventive Veterinary Medicine, vol. 84, nos 3-4,‎ , p. 261-76 (DOI 10.1016/j.prevetmed.2007.12.010)
  6. Article Campylobacter dans RIA n°795 décembre 2017
  7. Katrin Gaardbo Kuhn, Anne Kathrine Hvass, Annette Hartvig Christiansen et Steen Ethelberg, « Sexual Contact as Risk Factor for Campylobacter Infection, Denmark », Emerging Infectious Diseases, vol. 27, no 4,‎ , p. 1133–1140 (ISSN 1080-6040 et 1080-6059, DOI 10.3201/eid2704.202337, lire en ligne, consulté le )
  8. « Campylobacter », sur www.santepubliquefrance.fr (consulté le )
  9. Rapport de l'INVS sur les TIAC, 2010
  10. Agence de la santé publique du Canada - Fiche Technique sur le Campylobacter
  11. (en) Michael E Konkel, « Antimicrobial effect of diallyl sulphide on Campylobacter jejuni biofilms - PubMed », The Journal of antimicrobial chemotherapy, vol. 67, no 8,‎ , p. 1915–1926 (ISSN 1460-2091, PMID 22550133, DOI 10.1093/jac/dks138, lire en ligne, consulté le ).

Bibliographie

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Liens externes

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