Allocution du Dr Shin Young-soo, Directeur régional de l’OMS pour le Pacifique occidental, à l’intention du Comité régional du Pacifique occidental

9 October 2017

Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Représentants des États Membres et des organisations partenaires,
Chers collègues, Mesdames et Messieurs :

Bonjour et bienvenue à la soixante-huitième session du Comité régional de l'Organisation mondiale de la santé pour le Pacifique occidental.

Permettez-moi tout d’abord de remercier avec gratitude, en notre nom à tous, le Gouvernement australien, qui nous accueille ici, dans cette belle ville de Brisbane. La cérémonie d'ouverture de ce matin a été organisée à la perfection.

Nous avons une semaine entière devant nous pour réfléchir à des décisions importantes sur certains des enjeux de santé les plus pressants de la Région, ceux que vous, nos États membres, souhaitez voir traités en priorité.

Vous aurez également l'occasion dans le courant de la semaine de rencontrer le nouveau Directeur général de l'OMS, Dr Tedros, et de connaître les grandes orientations qu’il entend donner à l'Organisation. Je vous encourage à partager vos vues avec lui directement.

Habituellement, je saisis l’occasion de cette rencontre annuelle pour appeler l’attention sur les activités que nous avons menées au cours de l’année écoulée. Mais cette année, je préfère me concentrer sur la situation d’ensemble.

Il s’agit d’un moment crucial pour l'OMS et pour la santé à l’échelle mondiale.

La santé occupe désormais une place centrale dans le programme de développement. La bonne santé et le bien-être sont certes le thème de l'objectif de développement durable n° 3, mais ils jouent également un rôle essentiel dans la réalisation de plusieurs des autres objectifs. La santé est finalement reconnue comme un moteur du développement et du progrès humain.

C’est une bonne nouvelle, mais cela donne une nouvelle dimension à la mission qui nous incombe dans le domaine de la santé publique.

Nous devons nous atteler à la question des déterminants de la santé, dont beaucoup trouvent leur origine bien au-delà du secteur de la santé. Pour y faire face, nous devons intervenir dans tous les secteurs et dans tous les milieux. Nous devons porter la collaboration et la coopération à de nouveaux sommets moyennant des partenariats qui aident les États Membres à respecter la promesse d'une couverture sanitaire universelle, qui servira de socle à la réalisation de tous les objectifs de développement durable liés à la santé.

Ensemble, nous devons créer des systèmes de santé efficaces et rationnels dotés de capacités viables qui pourront offrir des services universels de haute qualité. Il est inacceptable que 4 personnes sur 10 dans le monde ne puissent se faire soigner sans subir de difficultés financières.

D’ailleurs, la devise des objectifs de développement durable qui est de ne laisser personne de côté, est plus qu'une nouvelle façon de penser. Pour nous dans la Région du Pacifique occidental, c'est une nouvelle façon de travailler.

À cet égard, je tiens à mettre en lumière ces trois nouvelles orientations qui sous-tendent notre nouvelle méthode de travail :
• Premièrement, les efforts que nous consacrons à la mise en place de mécanismes reliant les divers secteurs et sociétés concernés, dans l’optique d’agir sur les déterminants de la santé ;
• Deuxièmement, l’attention accrue que nous portons aux partenariats qui obtiennent des résultats mesurables à l’échelle des pays ;
• Enfin, les mesures concrètes que nous prenons pour que les États membres collaborent ensemble à la sauvegarde de la sécurité sanitaire mondiale.

En ce qui concerne le premier point, à savoir l’action transversale que nous menons pour faire face aux déterminants de la santé, la neuvième Conférence mondiale sur la promotion de la santé, qui s’est tenue en novembre à Shanghai, en est une parfaite illustration.

L'OMS et le Gouvernement chinois ont organisé la conférence à laquelle ont assisté plus d’un millier de décideurs, parmi lesquels quelque 40 ministres de la santé - dont beaucoup d'entre vous - et plus d’une centaine de maires du monde entier, ainsi que les responsables de plusieurs organismes des Nations Unies.

Ils ont pris des engagements fermes pour renforcer la coopération multisectorielle, comme en témoignent la Déclaration de Shanghai sur la promotion de la santé et le Consensus sur les Villes-santé.

Nos efforts doivent se porter sur les villes. Plus de la moitié de la population mondiale vit en milieu urbain aujourd’hui, et plus des deux tiers d’ici à 2050.

Une telle croissance s’accompagne d’un lot infini de problèmes de santé, dont beaucoup ont une origine extérieure au secteur de la santé. C'est la raison pour laquelle nous avons élaboré le Cadre régional pour la santé urbaine dans le Pacifique occidental, qui vise la création de villes saines et résilientes, ainsi qu’une panoplie d’instruments sur les villes-santé. Les dirigeants municipaux disposent désormais d’un guide sur les lignes de conduite et la planification qu’ils pourront mettre en œuvre afin de promouvoir des modes de vie plus sains.

À l’instar du concept des îles-santé dans le Pacifique, l’initiative des villes-santé entend éliminer la cause de quelque 80% des décès qui surviennent dans la Région, à savoir les maladies non transmissibles. Celles-ci sont en très grande partie imputables à des modes de vie néfastes comme une mauvaise alimentation, l’usage du tabac ou l’inactivité physique. Ces facteurs de risque procèdent généralement d'environnements malsains.

Au moyen d’approches faisant intervenir l'ensemble des acteurs publics et la société tout entière, nous agissons en étroite collaboration avec les ministères de la santé et d’autres secteurs extérieurs à la santé, en particulier les mairies, pour promouvoir la santé et éliminer les facteurs de l’épidémie des maladies non transmissibles.

Parallèlement, l'OMS noue des partenariats avec les dirigeants qui influent sur l'élaboration des politiques au plus haut niveau.

En novembre dernier, nous avons appuyé l'Assemblée nationale de la République de Corée dans l’organisation de la deuxième réunion annuelle du Forum parlementaire Asie-Pacifique sur la santé mondiale. Des législateurs de 17 pays des Régions OMS du Pacifique occidental et de l'Asie du Sud-Est ont fait valoir le rôle du Gouvernement et celui des approches impliquant les acteurs publics dans la promotion de la santé au titre des objectifs de développement durable.

La dernière réunion du Forum parlementaire, qui s’est tenue en août, a été d’une envergure encore plus grande : 55 parlementaires de 22 pays y ont assisté. Face à l'influence croissante de ce Forum, je place beaucoup d'espoir dans le rôle qu’il occupera à l'avenir.

En octobre 2016, les ministres de la santé et de l'environnement de 14 pays d'Asie et du Pacifique se sont réunis à Manille. Ils se sont engagés à redoubler d'efforts pour s'attaquer conjointement aux problèmes pressants que posent les changements climatiques, la pollution atmosphérique, l'eau potable, l'assainissement et les produits chimiques dangereux.

Dans l’optique des objectifs de développement durable, nous nous nous employons à renforcer les mesures collaboratives qui amènent tous les acteurs, dont beaucoup en dehors du secteur de la santé, à se pencher ensemble sur les problèmes de santé.

Cette année, le rôle de la promotion de la santé dans les ODD est un point de l’ordre du jour. Il met en lumière le rôle que joue l’éducation sanitaire, s’agissant d’évaluer les effets que l’enseignement, l'environnement, les transports, l'énergie, le travail et d'autres secteurs ont sur la santé publique.

En effet, le partenariat et la collaboration seront essentiels à notre réussite, d’autant plus que de nombreux États membres sont touchés par la forte baisse de l’aide financière internationale destinée à la lutte contre les maladies. Les services de santé doivent devenir plus efficaces, corrélés et durables afin de pouvoir profiter à tous ceux qui en ont besoin.

Cela m'amène à mon deuxième thème : de nouvelles méthodes de travail à l’échelle des pays, en vue de produire des résultats mesurables.

Deux points inscrits à l'ordre du jour de cette année – l’élimination de la rougeole et de la rubéole, et la triple élimination de la transmission mère-enfant du VIH, de l'hépatite B et de la syphilis - montrent comment on peut s’ingénier à accroître la couverture et à augmenter la capacité de sauver des vies au moyen des programmes mis en œuvre.

En renforçant les systèmes de santé, nous œuvrons avec les États membres pour combler les lacunes en matière de vaccination sur tous les fronts. Il est inacceptable qu'en 2017, 400 000 personnes meurent encore chaque année dans la Région de maladies évitables par la vaccination.

Ces initiatives procèdent de cette nouvelle façon de travailler dans la Région du Pacifique occidental. Elles aideront plus efficacement les États Membres à assurer à davantage d’individus des services de santé élémentaires plus nombreux, de meilleure qualité et meilleur marché.

N’oublions pas que près de 70 ans avant que les pays ne soient priés, au titre des ODD, de ne plus laisser personne de côté, la Constitution de l'OMS avait établi que la possession du meilleur état de santé possible constituait, je cite : « l'un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale ».

L'anglais a beau ne pas être pas ma langue maternelle, je sais qu’il faut entendre par là que PERSONNE ne doit être laissé de côté.

Lorsque l'OMS a été fondée en 1948, les maladies transmissibles étaient la principale source de préoccupation. Nous continuons à réaliser de grandes avancées dans notre lutte contre ces maladies mortelles.

Au cours de l’année écoulée, les Tonga et les Îles Marshall ont éliminé le problème de santé publique que constituait la filariose lymphatique, puis le Cambodge et la République démocratique populaire lao ont fait de même avec le trachome.

Disposant enfin d’un remède contre l'hépatite C, nous œuvrons aux côtés des pays pour qu’il soit accessible, à un prix abordable, à tous ceux qui en ont besoin.

Le test de diagnostic rapide de la tuberculose approuvé par l'OMS - qui a réduit le temps d'attente des résultats à quelques heures - est désormais disponible dans tous les pays les plus touchés. Nous devons nous assurer qu'il est accessible à tous ceux qui en ont besoin.

La tuberculose multirésistante - ainsi que l'augmentation générale des agents pathogènes résistant aux antimicrobiens à l’échelle mondiale - est l'une des menaces pour la santé les plus effrayantes au monde.

Cela m'amène à mon troisième et dernier point de cette nouvelle méthode de travail - les mesures que l’OMS prend pour que les États membres collaborent ensemble à la sauvegarde de la sécurité sanitaire mondiale.

L'Organisation a récemment créé le Programme de gestion des situations d’urgence sanitaire. Sa mission est claire : protéger la santé et sauver des vies pendant les épidémies et les urgences.

Le Pacifique occidental abrite 7 des 10 pays les plus exposés aux catastrophes dans le monde. Nous avons l’habitude des situations d'urgence et des menaces pour la sécurité de la santé.

Grâce à ce nouveau programme, nous continuons d'aider les pays à renforcer leur aptitude à faire face aux épidémies et aux urgences. En même temps, l'expérience et la réussite considérables de notre Région dans l'amélioration de la sécurité sanitaire contribuent à rendre le monde plus sûr.

Ce Comité régional a approuvé l’an dernier la Stratégie Asie-Pacifique pour la maîtrise des maladies émergentes et la gestion des urgences de santé publique, ou SMEAP III. Celle-ci découle d’un travail de fond mené de longue haleine dans notre Région.

Les urgences sanitaires peuvent mettre à l’épreuve même les systèmes de santé les plus à la pointe ainsi que les meilleurs plans de préparation et d'intervention. C'est pourquoi la SMEAP III tient certes compte des enseignements tirés des événements qui se sont produits, mais anticipe aussi les besoins futurs.

Les mécanismes de suivi et d'évaluation prévus par la SMEAP III ont contribué à l’élaboration d'un cadre mondial de suivi et d'évaluation. Ces mécanismes comprennent l’établissement de rapports annuels, une analyse après action, des exercices de simulation et des évaluations externes conjointes.

Les évaluations externes conjointes sont réalisées par des experts indépendants chargés d’évaluer les capacités principales et l’état de préparation des États membres. Elles aideront ces derniers à mieux appréhender les enjeux sanitaires de demain, quels qu'ils soient.

À ce jour, 56 évaluations externes conjointes ont été réalisées à l’échelle mondiale. Je rends hommage aux cinq pays de la Région qui ont mené à bien leurs évaluations au cours de l’année écoulée, à savoir le Cambodge, la République démocratique populaire lao, la Mongolie, la République de Corée et le Viet Nam.

Je salue également les huit pays de la Région qui ont des évaluations prévues ou en cours, soit l'Australie, le Japon, la Malaisie, les États fédérés de Micronésie, la Nouvelle-Zélande, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les Philippines et Singapour.

Ces évaluations ainsi que d'autres mécanismes novateurs sont d’une importance capitale pour maintenir l’impulsion donnée à la politique de sécurité sanitaire – et ce dans tous les pays. Ils constituent également d’excellents exemples de notre nouvelle approche et des efforts inlassables que nous consentons pour nous améliorer.

Ces neuf dernières années, grâce à vos conseils et à votre appui, j'ai eu le privilège de suivre de près la « réinvention » de l'OMS dans la Région du Pacifique occidental.

Nos efforts ont été guidés par la claire ambition de Maintenir les pays au centre de l’action. Nous planifions notre action en fonction de ce que vous, nos États membres, nous dites sur vos besoins et vos priorités nationales.

Depuis que nous avons lancé ces réformes en 2009, nous nous concentrons sur l’obtention de résultats à l’échelle des pays.

Bien que nous ayons réalisé beaucoup de choses ensemble, notre attention doit se porter sur ce qui nous guette : la prochaine épidémie, la prochaine urgence, la prochaine crise de financement, la prochaine grande menace pour la santé.

Nous pouvons néanmoins nous réjouir du fait qu’ensemble, nous nous sommes assurés les gages d’un avenir prometteur. Ce Comité régional, le Bureau régional et les États Membres ont pris l'initiative de réformes régionales et mondiales - des réformes qui ont contribué à rendre l'organisation plus rationnelle, plus efficace et plus à l’écoute des États membres.

S’il est vrai que nous avons fait de grands progrès, il nous reste encore beaucoup à faire. Ce fut un honneur pour moi d’être votre Directeur régional pendant toutes ces années que nous avons partagées.

Au cours des 18 derniers mois de mon mandat, mon personnel et moi-même, soucieux de ne laisser personne de côté, ne relâcherons pas nos efforts pour améliorer la santé et le bien-être de tous les habitants de la Région du Pacifique occidental, soit près de 1,9 milliard de personnes.

Je vous remercie.