Allocution de M. Eddie Baza Calvo, Gouverneur de Guam, à la soixante-sixième session du Comité régional pour le Pacifique occidental

12 October 2015

Hafa Adai Todus Hamyu et bienvenue à Guam, Mesdames et Messieurs.

Cette conférence régionale se tient de nouveau à Guam, 42 ans après la cinquième session en 1972.

C’est un honneur d’accueillir ici, à Guam, les Membres de la Région OMS du Pacifique occidental pour la soixante-sixième session du Comité régional.

C’est avec fierté que Guam souhaite la bienvenue aux plus de 300 personnes représentant les 37 pays de la Région.

Nous espérons que tout en travaillant sur les questions de santé de la Région du Pacifique occidental, vous aurez aussi l’occasion de faire connaissance avec l’île, d’apprécier la culture Chamorro, ainsi que la diversité des cultures présentes qui font que chaque année des milliers de personnes sont attirées sur nos rivages.

Nous espérons que vous pourrez aussi en apprendre davantage sur les défis auxquels nous sommes confrontés ici à Guam. Nous attendons avec impatience les solutions qui nous permettront d’améliorer la qualité de vie de nos citoyens comme des visiteurs.

Depuis sa création en 1948, l’Organisation mondiale de la Santé a contribué à porter de nombreuses questions à l’attention des leaders mondiaux.

Vous avez pris la direction de la réponse apportée au niveau régional aux problèmes de santé publique posés sur divers fronts – médical, socio économique, culturel et éducatif – dans le but d’amener tous les pays membres au niveau de santé le plus élevé possible.

Les efforts déployés par l’Organisation mondiale de la Santé ont permis des avancées remarquables telles que l’éradication de la variole – une maladie qui tuait plus de 2 millions de personnes chaque année. Grâce à votre travail, d’innombrables vies ont été sauvées.

Mais il reste encore beaucoup à faire, et c’est pourquoi nous sommes réunis ici aujourd’hui.

Il est juste que Guam accueille cette session. Guam est située au milieu du Pacifique. Nous sommes un point de passage entre la Micronésie et les autres Îles du Pacifique, l’Asie et les États-Unis d’Amérique.

Nous sommes un territoire américain à quelques heures à peine de l’Australie, de l’Indonésie, des Philippines, du Japon, de la Corée du Sud et d’autres pays dans une région qui abrite plus de 1,8 million de personnes.

Bon nombre des citoyens de nos pays voisins migrent vers Guam pour les nouvelles possibilités économiques et éducatives offertes ici. Et nous voyons aussi davantage de migrants du fait du changement climatique et de ses effets, notamment les sécheresses plus longues, les cyclones plus fréquents et la hausse du niveau des mers.

Malheureusement, être la destination ou le point de passage de nombreuses populations venant de régions si différentes nous rend aussi vulnérables.

Notre relatif isolement, qui nous aide à construire une réputation de destination de vacances de rêve pour les touristes, peut se révéler une épée à double tranchant. Guam est une destination dotée d’infrastructures suffisantes pour soutenir un important trafic, mais attire aussi de nombreuses personnes à la recherche de nouvelles perspectives économiques ou possibilités d’éducation.

En tant que centre d’échange, et point de transit pour de nombreuses personnes se rendant d’Asie aux Îles Mariannes ou en Micronésie – et vice versa –, nous avons une connexion directe avec d’autres centres d’échange, une situation qui accroît le risque de transmission de maladies.

Ce relatif isolement, combiné à un trafic élevé, crée des conditions favorables à un bouillon de culture. C’est pourquoi nous mettons tant de soins à protéger nos frontières.

Un exemple concret est celui de la tuberculose que l’OMS s’efforce d’éradiquer.

Le traitement existe sur l’Île de Guam et dans de nombreuses autres communautés, mais il n’est pas disponible pour tout le monde dans le Pacifique occidental. Vu que l’île est le pôle éducatif de la Région, on détecte, quasiment à chaque rentrée scolaire, un ou deux cas de tuberculose active.

Nous disposons d’un solide système de santé qui nous permet d’identifier et de circonscrire un cas de tuberculose active. Mais il faut des milliers de dollars pour effectuer le dépistage de centaines d’étudiants, d’enseignants et de personnels du système éducatif, en coordination avec des professionnels de la santé publique et de l’enseignement, et assurer la protection de la santé de nos étudiants, du personnel et de leurs familles.

À l’ordre du jour cette semaine, figurent plusieurs questions qui revêtent une importance essentielle dans la Région, notamment Guam.

Alors que les membres de ce Comité s’emploient à rendre universel le traitement contre l’hépatite, je voudrais vous demander de penser à Guam.

Nos statistiques reflètent le nombre quelque peu disproportionné de cas d’hépatite C dans la Région du Pacifique occidental. L’hépatite est responsable d’un plus grand nombre de décès que le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme réunis.

Efficaces pour traiter les infections chroniques par les virus des hépatites B et C et prévenir le cancer du foie, les nouveaux antiviraux demeurent inabordables et inaccessibles pour la plupart des sujets atteints ici à Guam et dans l’ensemble du Pacifique occidental.

La couverture sanitaire universelle est un autre sujet qui présente un très grand intérêt dans cette partie du Pacifique, où les coûts élevés, entre autres facteurs, continuent d’entraver l’accès à la santé.

Les programmes du gouvernement fédéral tels que Medicare et Medicaid ne profitent pas à tous les habitants de Guam, notamment nos frères et sœurs des « États associés ». Bon nombre de ceux qui viennent à Guam se heurtent à un accès très restreint aux soins de santé.

Beaucoup d’entre eux recourent au Programme médical destiné aux démunis, financés à l’échelle locale, mais celui-ci - entre l’augmentation du nombre de migrants et celle du coût des soins de santé - devient une lourde charge financière. Nous risquons bientôt de nous trouver dans une situation où les contribuables de Guam ne seront plus à même financièrement d’assurer la prise en charge de nouveaux patients.

En qualité de Gouverneur de Guam, je collabore avec le Département américain de l’intérieur et celui de la santé et des services humains au titre des efforts consentis pour aider tous les habitants de Guam.

Au nombre des difficultés auxquelles nous nous heurtons, figurent les effets non souhaités de certaines décisions fédérales qui n’accordent pas le droit aux citoyens des États associés de bénéficier des régimes fédéraux de soins de santé, tels que Medicare et Medicaid. Ce qui fait que moins de personnes ont accès à des soins préventifs, notamment des bilans de santé annuels.

Et parce qu’ils n’ont pas les moyens de se rendre dans un centre de soins, ils finissent au service des urgences de l’Hôpital Memorial de Guam. À ce stade, leurs problèmes de santé se sont aggravés et peuvent mettre leur vie en danger.

Alors que la Région de l’OMS pour le Pacifique occidental s’efforce de veiller à ce que tous les pays instaurent une couverture sanitaire universelle, j’espère que d’autres pays, en butte à des problèmes semblables, pourront partager avec Guam et notre région de Micronésie les solutions qu’ils auront adoptées.

La violence familiale est un autre sujet de préoccupation, tant pour Guam que pour le Pacifique occidental.

Octobre a été désigné Mois national de sensibilisation à la violence familiale pour les États-Unis et ses territoires.

Il y a tout juste deux semaines, Guam s’est joint à la nation, réaffirmant son attachement à la création d’une communauté où nul n’aurait à subir les blessures et les souffrances induites par la violence familiale - et nous nous engageons de nouveau à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour défendre le droit humain fondamental d’être protégé contre la violence et la maltraitance.

Je suis fier d’annoncer que les efforts que nous menons à Guam à cet égard sont liés à de solides partenariats avec nos organisations à but non lucratif et bénéficient de l’appui de nos entreprises privées. Il s’agit d'un véritable effort collectif de la communauté visant à sensibiliser l’opinion à l’importance que revêt la vie de chaque être humain.

Mais comme je l’ai dit plutôt, il y a beaucoup à faire à Guam et dans la Région.

Pour les seules années 2011, 2012 et 2013, on compte au total 1611 arrestations au motif de violence familiale. D’après le Community Outreach-Federal Programs Office (Bureau fédéral des programmes de sensibilisation communautaire), 3170 victimes de violence familiale ou conjugale ont été prises en charge au cours de la même période.

Compte tenu du fait que la culture de Guam est profondément ancrée dans les valeurs de la famille, les actes de violence familiale, notamment à l’encontre des femmes et des enfants, sont inquiétants.

Même s’il nous faut porter notre attention sur les mesures à prendre pour punir les auteurs de violence d’avoir détruit la vie de leurs victimes, il importe plus encore de chercher à savoir ce que nous pouvons faire pour empêcher ces actes de violence.

La recherche montre que la violence est un cycle qui se perpétue dans les familles et qui est lié aux disparités économiques.

Les facteurs sociaux que l’on observe dans d’autres parties du monde sont semblables à Guam. Les actes de violence sont bien souvent liés à l'usage de drogues, à l’abus d’alcool, au manque de débouchés économiques, à l’absence de noyau familial et à l’échec scolaire.

Il s’agit d’un cercle vicieux qui peut être brisé en offrant aux hommes et aux femmes des possibilités qui leur sont accessibles. Les membres des communautés défavorisées ne peuvent pas toujours compter sur l’appui de leur famille pour saisir toute l’importance qu’il faut attacher à l’éducation.

Profitons de l’occasion d’être réunis aujourd’hui pour chercher des moyens de promouvoir une meilleure qualité de vie dans notre économie mondiale qui ne cesse de se développer ; souvenons-nous que les difficultés que nous rencontrons dans nos propres communautés ne sont pas uniquement les nôtres.

La technologie et les progrès accomplis dans les transports et les télécommunications ont fait surgir des problèmes que nous n’avions pas prévus.

J’espère que la conférence régionale de cette année contribuera à apporter une réponse à ces problèmes - qu’il s’agisse du mode de vie sédentaire qui conduit à l’obésité et du nombre croissant de maladies non transmissibles, ou de la multiplication des risques de propagation des maladies transmissibles et de l’aggravation des disparités dans la répartition des richesses, privant une partie de nos citoyens de l’accès aux soins, à l’éducation et à d’autres perspectives – dans un monde où les distances ne cessent de s’amenuiser.

Je vous remercie tous d’être venus à Guam, d’avoir choisi Guam comme point de départ pour la recherche de solutions et d’idées nouvelles.

Et Si Yu’os Ma’ase.