Marine Tondelier en une de Libération ce mercredi. Marine Tondelier, la veille, invitée du JT de 20 heures de TF1. Marine Tondelier en boucle sur TikTok et Instagram. En quelques jours, la secrétaire nationale des Ecologistes, 37 ans, s'est imposée comme une pièce-maîtresse de l’union de la gauche. Une voix prépondérante dans cet entre-deux tours à gauche, jusque-là quasiment inconnue du grand public.
Elle est sortie de l'ombre ce dimanche. À l'issue du premier tour des législatives anticipées, le Rassemblement National entrevoit la majorité absolue à l'Assemblée en l'absence de désistement de candidats Renaissance ou du Nouveau Front Populaire (NFP). Que faire ? Le camp présidentiel joue l'ambiguïté sur l'ampleur des « désistements républicains ». Reprenant la position du NFP, Marine Tondelier parle, elle, de désistement systématique. Dès 20h53 ce soir là, elle lance même le hashtag Nouveau Front républicain. Une position qu'elle va expliciter dans de nombreuses interventions médiatiques, se montrant percutante et sans concession.
Ce lundi matin, même combat. Ulcérée de voir un Bruno Le Maire rejoindre la ligne Ni-RN Ni-LFI, Marine Tondelier lui répond avec une pointe d'émotion dans la matinale de France Inter. La vidéo devient vite virale, près de 3 millions de vues sur Instagram.
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Si Marine Tondelier prend ainsi la lumière, c'est aussi qu'elle apparaît comme une figure rassembleuse, potentiel trait d'union entre les mouvements très disparates formant le NFP. Un contraste à un Jean-Luc Mélenchon, honni par beaucoup.
« Le RN et les femmes : CQFD »
Depuis le soir du premier tour, Marine Tondelier est aussi au coeur du psychodrame sur l'organisation d'un potentiel débat d'entre-deux-tours sur BFMTV. Il devait réunir Gabriel Attal, Jordan Bardella, et un représentant du NFP, ce mercredi. La cheffe des écolos était censée participer à celui-ci, après Manuel Bompard (LFI) et Olivier Faure (PS), représentant le cartel des gauches dans les précédents débats.
C'était sans compter le refus de Jordan Bardella. Lui acceptait bien l'idée d'un débat, mais seulement avec Jean-Luc Mélenchon, qu'il juge leader de la coalition de gauche. « C’est à mon tour de représenter notre coalition, lui répondait Marine Tondelier. Dois-je comprendre que vous n’osez pas débattre avec moi ? » Plus tard, elle écrit sur X : « Le RN et les femmes : CQFD ». Dans la foulée, une dizaine d’artistes (Juliette Binoche, Vanessa Springora, Camille Kouchner et Pénélope Bagieu…) signent une tribune dans Libération dans laquelle elles vilipendent le refus de Jordan Bardella d’affronter Marine Tondelier, « rare femme cheffe de parti invisibilisée et même silenciée ».
L'autre Marine
Qui aurait cru que Marine Tondelier allait se retrouver ainsi au centre du jeu politique ? Une position d'autant plus surprenante que les Verts se retrouvent dans une situation périlleuse. Avec seulement 5,5% aux européennes, les écolos sont passés très près de n'envoyer aucun député à Bruxelles, très loin des 15% de 2019. Ce mauvaise score, à l'issue d'une campagne où leur tête de liste, Marie Toussaint, aura été inaudible, a fragilisé la position Marine Tondelier. Mais pour quelques jours seulement. Coup du sort, la décision d'Emmanuel Macron de dissoudre l'Assemblée nationale, l'urgence politique, a fait de la cheffe des Verts la cheville ouvrière de l'union a gauche et a conforté sa place.
Marine Tondelier profite aussi de son histoire personnelle. Si elle apparaît en première ligne face à l'extrême-droite, c'est aussi parce que cette native d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), combat Marine Le Pen sur sa terre d'élection depuis des années. Aux législatives, la cheffe des Écologistes était la suppléante d’une candidate socialiste éliminée au premier tour face à la dirigeante frontiste. Elle avait également porté le fer contre la triple candidate à l'élection présidentielle à l'occasion des législatives de 2022. Là encore, sans succès.
Celle qui a remplacé Julien Bayou à la tête des Verts en 2022 cultive son image de femme de terrain. Elle vit encore à Hénin-Beaumont, comme ses parents et ses grands-parents. En 2017 déjà, elle a publié Nouvelles du Front, sous-titré La vie sous le Front national, une élue de l'opposition raconte, ouvrage dans lequel elle explique sa vie d'élue d'opposition dans une commune dirigée par le RN.
Mais désormais, la cheffe des écolos - qui ne s'affiche plus qu'avec une veste verte qui dispose même de son compte X (parodique) - va être confronté à une question vertigineuse, potentiellement dévastatrice : en cas de blocage institutionnel, le camp présidentiel pourrait proposer une large alliance allant de la droite LR ou de ce qu'il en reste, aux communistes. Faut-il y participer ou non ? Marine Tondelier, ce mardi sur TF1, ne ferme pas la porte. « Il faudra sûrement faire des choses que personne n'a jamais faites auparavant dans ce pays », a-t-elle prévenu, balayant tout de même l'idée d'avaliser un premier ministre issu des rang macroniste. L'hypothèse d'une participation à un gouvernement d'union nationale a pourtant déjà été refusée par Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise. La question, si elle se pose, risque de secouer une gauche dont l'union ne tient qu'à un fil et pourrait faire de Marine Tondelier une figure bien moins consensuelle qu'elle ne l'est aujourd'hui. En politique, la hype ne dure jamais très longtemps.
La décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale a surpris tout le monde. Tout le monde sauf une poignée de conseillers, proches parmi les proches.
