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The Book of Negroes (​Aminata)

Le « Livre des Nègres » est un registre naval britannique de loyalistes noirs qui ont trouvé refuge au Canada lors de la Révolution américaine. Il s’agit aussi du titre du troisième roman de Lawrence Hill, publié en 2007 en anglais sous le titre The Book of Negroes au Canada et Someone Knows My Name aux États-Unis, en Australie et en Nouvelle-Zélande, puis traduit vers le français et publié en 2011 sous le titre Aminata. Cette œuvre de fiction à caractère historique raconte l’histoire d’Aminata Diallo, qui est enlevée en Afrique par des trafiquants d’esclaves, puis déportée en Amérique. L’histoire d’Aminata illustre les violations physiques, sexuelles, émotionnelles, psychologiques, religieuses et économiques générées par la traite transatlantique des esclaves. Le roman a été traduit dans plus de huit langues et s’est vendu à plus de 800 000 exemplaires aux quatre coins du monde. Il a valu à son auteur le prix Rogers Writers’ Trust Fiction, le prix des écrivains du Commonwealth et le prix du Commonwealth du meilleur livre. Il s’agit du premier ouvrage à remporter à la fois le concours Canada Reads de la CBC Radio et le Combat des livres de Radio Canada.

Le livre des nègres

Le « Le livre des nègres » au American Revolution Museum à Yorktown, en Virginie, en 2019.

Synopsis

Le lecteur suit le récit d’une esclave nommée Aminata Diallo, de son point de vue, depuis son enlèvement dans son enfance jusqu’à sa mort à un âge avancé. L’histoire commence en 1745 en Afrique occidentale où Aminata, 11 ans, est enlevée à Bayo, sa ville natale. On la mène jusqu’à la côte, enchaînée à d’autres esclaves. Elle monte à bord d’un navire avec des milliers d’autres esclaves africains en direction des Amériques. La traversée d’Aminata, qui dure plusieurs mois, met en lumière les conditions horribles qui prévalent à bord des navires négriers.

Vendue comme esclave à son arrivée en Amérique, Aminata aboutit dans une plantation d’indigotiers en Caroline du Sud. Durant son asservissement, elle se démarque pour ses compétences de sage-femme qui lui ont été transmises par sa mère pendant son enfance. (Voir aussi Méthodes d’accouchement.) En cachette, un ami esclave lui apprend à lire. Son alphabétisation jouera plus tard un rôle clé dans sa quête de la liberté. Après qu’on ait vendu son bébé, Aminata refuse de travailler. Elle est alors vendue aux Lindos, un couple juif, qui lui enseignent l’arithmétique.

En retour pour sa loyauté envers la Couronne britannique pendant la Révolution américaine, Aminata se voit octroyer sa liberté. Elle est aussi engagée pour écrire le nom des autres esclaves libérés dans un registre naval nommé le « Livre des Nègres » avant le voyage qui les mènera de New York au Canada par bateau. Désormais libre, Aminata est toutefois victime de discrimination et son chemin est parsemé d’embûches en Nouvelle-Écosse, où elle participe à la fondation de la communauté noire de Birchtown. (Voir aussiAfricville.)

Lorsqu’on offre aux « Noirs libres » d’aller s’installer à la Sierra Leone, Aminata réalise son rêve de retourner sur ses terres natales. Elle est accompagnée de 1 200 autres esclaves libérés dans son odyssée qui la ramène en Afrique. À la Sierra Leone, elle part à la recherche de sa ville natale et participe à l’établissement de Freetown, une nouvelle colonie. Toutefois, son désir d’aider ses pairs africains à recouvrer la liberté pousse Aminata à traverser à nouveau l’océan, cette fois-ci en direction de l’Angleterre. C’est là que le récit de sa vie, qu’elle écrit pendant ses dernières années de vie au tournant du 19e siècle, inspire le mouvement abolitionniste mené par les Blancs.


Thèmes principaux

Le titre anglais du roman, The Book of Negroes, fait référence à l’une des nombreuses expériences migratoires vécues au cours du récit. Par ailleurs, le thème de la migration, tant volontaire que forcée, domine le récit et unifie l’histoire. Aminata répète à maintes reprises que les Noirs sont des voyageurs. Le roman retrace son périple qui la mène de l’Afrique intérieure à la Caroline du Sud, en passant par New York, la Nouvelle-Écosse, la Sierra Leone, pour finir en Angleterre.

Aminata doit sans cesse s’adapter aux différentes conditions géographiques, culturelles, familiales et intellectuelles. À maintes reprises, elle est témoin de l’inhumanité profonde de l’esclavage. Elle explore aussi la dégradation morale et spirituelle de la traite négrière du point de vue des esclaves, des négriers et de ceux qui sont témoins d’une façon ou d’une autre de la traite.

Aminata perçoit l’hypocrisie qui entoure l’esclavage. Elle constate comment celle-ci réduit la capacité de vivre de façon éthique de tous. À maintes reprises, Aminata est témoin de promesses et de proclamations qui semblent bien intentionnées, mais à tout coup elle voit ces engagements être abandonnés, renversés ou échouer, car les tentations politiques et matérielles de l’esclavage ont le dessus sur les intentions éthiques.

Style

Le roman de Lawrence Hill s’inscrit dans la tradition des récits d’esclaves, son écriture ayant recours à la langue et aux tropes du genre. Par exemple, la narratrice, désormais éduquée et libre, raconte son histoire et contribue ainsi à la cause abolitionniste. En tant qu’œuvre de fiction historique, Aminata combine des personnes et des événements réels à une intrigue et à des personnages fictifs. L’histoire d’Aminata est racontée pour raconter une histoire et pour explorer des événements historiques de façon littéraire. En d’autres mots, l’intention d’Aminata est de donner un sens et un but à sa vie. Elle donne aussi une voix à ceux qui, autour d’elle, sont incapables d’écrire leur propre histoire. Le roman porte sur un aspect de l’histoire passé inaperçu ou passé sous silence dans les écrits historiques comme dans la culture contemporaine.

Controverse à propos du titre

Le titre du roman fait référence au registre militaire britannique intitulé « Livre des Nègres ». Celui-ci recense environ 3 000 loyalistes noirs qui se sont vus octroyer un passage de New York à la Nouvelle-Écosse en 1783. Dans le récit, le nom d’Aminata est inscrit dans le « Livre ».

Le roman porte le titre original canadien dans la plupart des pays anglophones. Au départ, l’édition étatsunienne devait être publiée sous ce titre. Toutefois, l’éditeur estimait que le livre ne serait pas bien reçu en raison des susceptibilités entourant l’usage du mot « Nègre » aux États-Unis. Le titre est changé pour Someone Knows My Name juste avant de mettre la page couverture sous presse. Le livre a aussi été publié sous le titre Someone Knows My Name en Australie et en Nouvelle-Zélande. Le livre traduit est vendu sous le titre original, Someone Knows My Name et Aminata.

Au départ, l’idée de changer le titre du roman déplaît à Lawrence Hill, mais dans un éditorial publié en 2008, il explique pourquoi il a changé d’avis :

« Dans mon pays, peu se sont plaints du titre auprès de moi et personne ne s’en offusque après que je leur aie expliqué son origine historique. Je crois que c’est en partie parce que le mot “Nègre” n’a pas la même connotation au Canada. Si vous l’utilisez à Toronto ou à Montréal, vous ne faites que démontrer en public que vous êtes dépassé dans votre façon de vous exprimer. Mais si vous l’utilisez à Brooklyn ou à Boston, il s’agit d’une invitation à vous faire casser le nez. Quand je suis parti en tournée de promotion du roman dans certaines grandes villes des États-Unis, des Afro-Américains du monde littéraire venaient sans cesse me voir pour me dire qu’il avait été judicieux de changer le titre du roman, car ils ne l’auraient jamais lu s’il avait porté son titre canadien. »

Malgré la portée historique du titre original, certains manifestent leur opposition à celui-ci. À la suite de la publication de la version néerlandaise de The Book of Negroes sous le titre Het Negerboek, le Néerlandais Roy Groenberg envoie une lettre à Lawrence Hill pour critiquer son utilisation du mot « Nègre » dans le titre du livre. Il l’informe aussi qu’il compte marquer l’anniversaire de l’émancipation de ses ancêtres de l’esclavage aux Pays-Bas en brûlant son livre.

Lawrence Hill lui répond dans une lettre d’opinion publiée dans le Toronto Star. Il exprime son horreur quant à la notion de brûler des livres et lui offre d’amorcer un dialogue à propos du mot et du titre. En juin 2011, Roy Groenberg et sa « Fondation visant à honorer et à rétablir les paiements aux victimes de l’esclavage au Suriname » brûlent la couverture du livre pour protester contre son titre. Plus tard, Lawrence Hill pond un essai sur les événements intitulé « Dear Sir, I Intend to Burn Your Book » dans lequel il relate sa propre expérience ainsi que des exemples historiques où des livres ont été brûlés ou censurés.

Traductions, éditions et ventes

The Book of Negroes est traduit en espagnol, en hongrois, en turc, en français, en arabe, en hébreu, en allemand, en néerlandais et en norvégien. Il continue d’être publié dans de nouvelles langues et dans de nouveaux marchés aux quatre coins du monde. En 2011, les Éditions de la Pleine Lune publient la version française du roman sous le titre Aminata. Elle se vend à plus de 12 000 exemplaires, un succès retentissant au Québec.

HarperCollins a publié six éditions distinctes de l’œuvre au Canada : livre relié, livre de poche, livre de poche HarperPerennial, livre de poche destiné au marché de masse, ainsi que des éditions illustrées en format relié et de poche comprenant plus de 150 images. Le livre à succès s’est vendu à environ 600 000 exemplaires au Canada et à plus de 200 000 exemplaires à l’échelle internationale.

 

Prix et honneurs

L’œuvre remporte le prix Rogers Writers' Trust Fiction en 2007 et le prix des écrivains du Commonwealth en 2008. Il s’agit du premier livre à remporter à la fois le concours Canada Reads de la CBC Radio (en 2009, sous sa version originale) et le Combat des livres de Radio-Canada (en 2013, sous sa version traduite Aminata). Il remporte aussi le prix du Commonwealth du meilleur livre, pour lequel Lawrence Hill a droit à une audience privée avec la reine Elizabeth II.

Minisérie

Avec le cinéaste Clement Virgo, Lawrence Hill adapte son roman en une minisérie de six émissions. L’ambitieuse production de 10 millions de dollars est tournée au Canada et en Afrique du Sud avec une distribution de 120 acteurs et une équipe de 400 personnes. Elle met en vedette Shailyn Pierre‑Dixon et Aunjanue Ellis qui jouent le rôle d’Amanita dans son enfance et dans sa vie adulte respectivement. On voit aussi à l’affiche Allan Hawco dans le rôle de Solomon Lindo, Lyrig Bent, Ben Chaplin et les oscarisés Louis Gossett Jr. et Cuba Gooding Jr.

La première de la minisérie est télédiffusée par la CBC le 7 janvier 2015 et est regardée par 1,7 million de téléspectateurs, ce qui en fait le programme numéro un de son créneau horaire. La minisérie est aussi télédiffusée aux États‑Unis par BET (Black Entertainment Television) en février 2015. Elle reçoit diverses critiques, généralement positives, et est acclamée unanimement pour la performance d’Aunjanue Ellis.

En mars 2016, The Book of Negroes décroche dix prix Écrans canadiens, dont meilleure minisérie, meilleur scénario d’une minisérie (Lawrence Hill et Clement Virgo), meilleur directeur d’une minisérie (Clement Virgo) et meilleure interprétation féminine d’un rôle principal dans une minisérie (Aunjanue Ellis). La minisérie remporte aussi le prix spécial du jury au Festival international de la télévision de Banff de 2015, le prix du Writers Guild of Canada pour la meilleure minisérie et cinq prix du Directors Guild of Canada, dont le prix pour la meilleure minisérie télévisée.

Voir aussi : Esclavage des Noirs au Canada; Éditorial : L’arrivée des loyalistes noirs en Nouvelle-Écosse; Chloe Cooley et la loi visant à restreindre l’esclavage dans le Haut-Canada; Abolition de l’esclavage, loi de 1833; Loi des esclaves fugitifs de 1850; Société anti-esclavagiste du Canada; Chemin de fer clandestin; Noires et militantes pour la liberté.

Les oeuvres sélectionnées de
The Book of Negroes (​Aminata)