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Énigmes de l'histoire canadienne

Tout le monde aime les énigmes. L’histoire du Canada est riche de secrets bien gardés, de crimes non élucidés et d’événements qui défient l’entendement. Voici cinq énigmes de l’histoire canadienne, drapées dans des circonstances mystérieuses, et dont l’issue demeure irrésolue.

1. L’énigme du lac Angikuni

Le 12 novembre 1930, un trappeur, Joe Labelle, arrive dans une petite communauté inuite du Nunavut, dans la région de Kivalliq, au bord du lac Angikuni. (Voir aussi Traite des fourrures au Canada.) Il y trouve des kayaks échoués sur la plage, des habitations remplies de vêtements, de fusils et de repas non terminés, mais aucun être humain. À peu près 25 personnes semblent avoir disparu. Joe Labelle rapporte sa découverte à la GRC, qui entreprend une enquête. Le sergent J. Nelson se rend sur les lieux. La GRC interroge ensuite le trappeur Armand Laurent, qui soutient avoir vu un gros objet cylindrique dans le ciel près du village abandonné.

Cette énigme revient au devant de la scène en 1959, après la publication du livre Stranger Than Science de Frank Edwards. Dans le monde entier, des comptes rendus paraissent dans des journaux, des revues et des livres, présentant l’affaire comme un enlèvement par des extra-terrestres. En 1988, un groupe appelé Australian Skeptics contacte l’historien S.W. Horrall, spécialiste de la GRC. Celui-ci déclare qu’il n’y avait aucune source écrite sur la disparition des habitants, le rapport de Joe Labelle à la police et l’enquête policière.

2. Le fantôme de la rivière Mackenzie

En 1853, Augustus Richard Peers, 33 ans, travaille comme négociant en fourrure et facteur pour la Compagnie de la Baie d’Hudson à Fort McPherson, dans les Territoires du Nord-Ouest. Il tombe malade. Sentant la fin venir, il demande à ne pas être enterré à Fort McPherson. Toutefois, ce n’est que six ans plus tard que ses restes sont transportés plus au sud, à Fort Simpson.

Avec l’aide d’un compagnon, un dénommé Roderick MacFarlane charge le cercueil contenant la dépouille de Richard Peers sur un traîneau à chiens et entreprend un voyage de 1 290 km vers le sud, le long de la rivière Mackenzie. Plus tard, Roderick MacFarlane rapporte qu’à plusieurs reprises, durant le voyage, des animaux sauvages ont approché le traîneau d’une manière menaçante. À chaque fois, lui et son compagnon ont entendu crier une voix forte et mystérieuse, ordonnant aux chiens de foncer. Quand ils sont arrivés à Fort Simpson, les deux ont affirmé avoir senti la « présence fantomatique » de feu Augustus Richard Peers.

En 1955, R.S. Lambert raconte l’histoire dans son livre Exploring the Supernatural: The Weird in Canadian Folklore.

3. L’énigme de Tom Thomson

Tom Thomson

Tom Thomson était un artiste canadien très connu et un canoéiste expert qui aimait partir en expédition solitaire dans le parc Algonquin, en Ontario, pour pêcher, camper et peindre. Le 8 juillet 1917, l’homme de 39 ans traverse le lac Canoe, dans le parc. Quelques heures plus tard, son canoë est retrouvé, flottant près du quai d’où il est parti. Son corps est retrouvé huit jours plus tard. Il a une contusion sur la tête et une ligne à pêche est enroulée autour d’une de ses chevilles. Un médecin conclut qu’il s’est noyé. Une journée après sa découverte, le corps de Tom Thomson est enterré dans le petit cimetière Mowat, près du lac Canoe.

Beaucoup se sont interrogés sur le fait qu’un canoéiste aussi expérimenté soit décédé dans des circonstances aussi mystérieuses : pourquoi la police n’a-t-elle pas enquêté davantage, et pourquoi, après deux jours, son corps a-t-il été exhumé et enterré à nouveau dans le terrain de sa famille à Leith, en Ontario? En 1956, un crâne est déterré près du lac Canoe. Certains soutiennent qu’il s’agit de celui de Tom Thomson.

En 1970, William T. Little rédige The Tom Thomson Mystery, un ouvrage qui relève les incohérences entre les différentes versions de la mort de Tom Thomson. En 1977, Roy MacGregor écrit dans un article du Toronto Star que Tom Thomson a été assassiné par le propriétaire du gîte Mowat, Shannon Fraser. MacGregor reprend cette allégation dans un livre de 2010, Northern Light: The Enduring Mystery of Tom Thomson and the Woman Who Loved Him. Il soutient que la femme de Shannon Fraser a dit à des amis que son mari avait tué le célèbre peintre. L’énigme fait à nouveau parler d’elle en 2016 avec la sortie du livre de Gregory Klages The Many Deaths of Tom Thomson: Separating Fact from Fiction.

4. L’énigme du gisement perdu de Frank Lemon

En 1870, le prospecteur Frank Lemon et son associé, Blackjack, découvrent un gisement d’or en Colombie-Britannique, dans la rivière Elk, au nord de Crowsnest Pass. Pendant la nuit, après une dispute au sujet de l’or, Frank Lemon assassine Blackjack d’un coup de hache à la tête. Accablé par le remords, Frank Lemon allume un gros feu. Plus tard, il affirme avoir entendu des gémissements provenant des flammes. Le lendemain matin, il marche jusqu’au village le plus proche, Tobacco Plains, et confie au père Jean l’histoire de la découverte de l’or et du meurtre.

Deux hommes autochtones ont entendu Frank Lemon et Blackjack se disputer et ont assisté au meurtre. Ils rapportent la chose à leur chef, Joseph Bearspaw. Celui-ci, craignant que la nouvelle de la découverte de l’or attire des gens dans la région, décide que personne ne parlera ni du meurtre ni de l’or.

Pendant ce temps, le père L’Heureux charge le trappeur John McDougall d’aller enterrer Blackjack. Il trouve l’endroit, enterre Blackjack et érige un modeste cairn. Toutefois, celui-ci est détruit par des Autochtones, qui dissimulent aussi les traces de sa présence. John McDougall tente d’amener d’autres personnes sur les lieux, mais en cours de route, il s’enivre à mort. Le prêtre organise une expédition pour trouver l’or, mais entre-temps le sentier a été détruit par un feu de forêt. Frank Lemon essaie à plusieurs reprises de conduire des prospecteurs au lieu de sa découverte, mais il est incapable de surmonter une terreur paralysante. Finalement, il perd la raison.

Le prospecteur américain Lafayette French, bâilleur de fonds de l’expédition originale de Frank Lemon, essaie de trouver l’or à son tour, mais il doit renoncer à son voyage après avoir contracté une maladie dégénérative. Plus tard, il retrouve William Bendow, un des hommes qui ont assisté au meurtre de Blackjack. William Bendow promet à Lafayette French de le conduire sur les lieux de l’événement, mais il meurt subitement d’un mal inconnu. Après 30 ans de recherches, Lafayette French écrit à un ami pour lui annoncer qu’il a enfin trouvé l’or de Frank Lemon. La nuit suivante, sa cabane est détruite par le feu et il meurt avant d’avoir eu le temps de révéler son secret.

Dan Riley, Tom Primrose et Hugh Dempsey, dans The Lost Lemon Mine: The Greatest Mystery of the Canadian Rockies (1958), ainsi que Ron Stewart, dans The Lost Lemon Mine: An Unsolved Mystery of the Old West (2011), ont essayé de résoudre le mystère, mais beaucoup de questions demeurent sans réponse.

5. L’explosion de la voie ferrée de Kettle Valley

Parmi les milliers de personnes qui s’établissent dans l’Ouest canadien dans les années 1890, on retrouve les Doukhobors, une secte pacifiste originaire de Russie. Peter Vasilievich Verigin, 65 ans, est le leader des Doukhobors. Beaucoup de ses fidèles croient qu’il est d’essence semi divine. (Voir aussi Communauté russe au Canada.)

Le 29 octobre 1924, Peter Verigin voyage dans une voiture du chemin de fer Canadien Pacifique, dans la vallée Kettle, en Colombie-Britannique, lorsque le train est détruit par une explosion. Le leader des Doukhobors est tué, ainsi que tous les autres passagers sauf deux. La GRC enquête mais est incapable de déterminer s’il s’agit d’un accident ou d’un assassinat.

Le fils de Peter Verigin, Peter Petrovich, a menacé de tuer son père durant sa visite au Canada en 1905. Les soupçons se tournent vers lui lorsqu’il prend la direction de la secte des Doukhobor au Canada en 1927. Certains groupes de la communauté Doukhobor sont aussi considérés comme suspects. Les Doukhobors indépendants rêvent de s’enrichir, tandis que les Fils de la liberté veulent maintenir leur mode de vie traditionnel. Ces deux groupes considèrent que Peter Vasilievich Verigin ne représente pas leurs objectifs.

Certains soupçonnent aussi le gouvernement russe, car après la Révolution russe, des représentants de la Russie ont demandé aux Doukhobors de revenir au pays, mais Peter Verigin a refusé. D’autre part, à l’époque, la culture, la langue et l’insularité des Doukhobors suscitent la méfiance de beaucoup de Canadiens de l’Ouest. Il se pourrait que Peter Verigin ait été tué par une personne motivée par cette peur nativiste. L’affaire demeure non résolue.