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Hector Fabre

Louis-Roch-Hector Fabre, journaliste, propriétaire de journaux, sénateur et diplomate (né le 9 août 1834 à Montréal, Bas-Canada; décédé le 2 septembre 1910 à Paris, France). La nomination d’Hector Fabre comme agent général du Québec à Paris à l’hiver 1882 marque un des premiers jalons dans l’histoire de la représentation du Québec à l’étranger. Hector Fabre, qui représente également le gouvernement fédéral à partir de juillet 1882, contribue à l’établissement de relations diplomatiques et économiques avec la France et d’autres pays européens, ainsi qu’à l’amorce d’une représentation permanente canadienne à l’étranger.
Hector Fabre

Études et premières années

Hector Fabre est le fils aîné de Luce Perrault et du libraire, patriote et maire de Montréal,Édouard-Raymond Fabre. Il fait ses études chez les Frères des écoles chrétiennes à Montréal, puis au Collège de l’Assomption et au Petit séminaire de Montréal.

\u00c9douard-Raymond Fabre

Dès son enfance, le jeune Hector est plongé dans la vie politique. Les Augustin-Norbert Morin, Louis-Hippolyte La Fontaine, Edmund Bailey O’Callaghan et Édouard-Étienne Rodier, pour n’en nommer que quelques-uns, ont pour habitude de fréquenter la librairie de son père et de s’y réunir pour discuter politique et actualité. Le libraire Fabre est aussi très proche du patriote Louis-Joseph Papineau. D’ailleurs, lors des rébellions du Bas-Canada de 1837-1838, c’est sur son conseil que ce dernier prend le chemin de l’exil. Après avoir été lui-même arrêté en novembre 1838, puis relâché, Édouard-Raymond Fabre va d’ailleurs tout mettre en œuvre afin de permettre aux Patriotes exilés de rentrer au pays.

Journalisme et politique

Compte tenu de son histoire familiale, il n’est guère étonnant de voir Hector Fabre s’engager dans la voie politique (au contraire de son frère Édouard-Charles, qui au grand dam de son père choisit la prêtrise, puis devint archevêque de Montréal). Ses relations avec certains des plus importants hommes politiques de l’époque, notamment son beau-frère George-Étienne Cartier (qui a épousé sa sœur Hortense en 1846) et Joseph-Adolphe Chapleau, lui permettent de se tailler une place de choix dans ce monde. Devenu avocat en 1856 après avoir fait sa cléricature chez son beau-frère Cartier, Hector Fabre choisit de se consacrer au journalisme.

Sir George-Étienne Cartier
Le Canadien
Première page du Le Canadien, 22 novembre 1806, vol. 1, no. 1. Le Canadien était un journal de langue française publié à Québec.

Initié dès son plus jeune âge au monde littéraire, il collabore à plusieurs journaux d’importance (L’Ordre, Le Canadien) avant de fonder, à l’âge de 33 ans, son propre journal L’Événement dont il est l’unique propriétaire de 1867 à 1883. Afin de financer son journal, il tente le terrain politique. Il participe aux élections municipales de Québec en 1869, puis cherche en 1873 à joindre les rangs des députés fédéraux lors d’une élection partielle à Québec. Candidat malheureux, il est nommé au Sénat canadien en 1875 grâce à l’intervention d’Adolphe Chapleau. Il confie dès lors les rênes de son journal au journaliste et musicien Nazaire Le Vasseur.

Agent général du Québec et du Canada à Paris

Dans les années qui suivent, Hector Fabre multiplie les voyages en Europe (Angleterre, Suisse et France). Il joue peut-être un rôle dans les négociations entourant l’installation au Québec du Crédit foncier franco-canadien en 1880, une société hypothécaire modelée sur le Crédit de France. À la recherche de capitaux étrangers pour investir dans le développement agricole et minier de la province et compléter la section québécoise du chemin de fer de la rive nord, Adolphe Chapleau, alors premier ministre du Québec (1879-1882), se rend en Europe à l’été 1881. Il en revient convaincu de l’importance d’y avoir un représentant permanent en raison du rôle accru que sont appelés à jouer les capitaux européens dans le développement du Québec, mais aussi dans les projets de colonisation qui concernent des cultivateurs français, belges et flamands.

Le 4 mars 1882, le lieutenant-gouverneur du Québec approuve la décision du Conseil exécutif arrêtée le 28 février de nommer Hector Fabre à titre d’agent général du Québec à Paris (voir Représentation diplomatique et consulaire). Chapleau lui confie un mandat économique faisant de lui le « représentant attitré du gouvernement de Québec pour toutes les négociations qui ressortent des attributions de la province ». Dans les mois qui suivent, Chapleau effectue un surprenant retour sur la scène fédérale comme secrétaire d’État du gouvernement de John A. Macdonald. Afin de couvrir les frais du bureau à Paris, il convainc le gouvernement fédéral d’utiliser les services du nouveau représentant. Ainsi, à partir de l’été 1882, Hector Fabre, qui a dû renoncer en échange à sa fonction de sénateur, représente le gouvernement canadien à Paris. Il conserve ce double mandat jusqu’à sa mort en 1910.

Promouvoir les occasions d’investissements et l’immigration

Avec cette nomination, l’homme de lettres peut affirmer d’autant plus son talent journalistique. En 1884 débute la publication de Paris-Canada, revue qui paraît plus ou moins régulièrement jusqu’en 1909. Non seulement cette publication fait-elle la promotion du Canada auprès des investisseurs et des immigrants, mais elle sert aussi de canal de diffusion pour les Canadiens qui séjournent en Europe. Hector Fabre fait plusieurs tournées de conférences partout en France et contribue à créer des liens forts avec le milieu politique français.

Un aspect plus discret du travail d’Hector Fabre est sans aucun doute le volet immigration de son mandat. Depuis le milieu du XIXe siècle, le Québec connaît une émigration massive de sa population au profit des États-Unis et des provinces de l’Ouest canadien (voir Franco-Américains). Pour contrer ces effets, les élites nationalistes suggèrent de stimuler l’immigration en provenance des pays de l’Europe francophone. Depuis 1870, le gouvernement québécois diffuse largement une brochureintitulée La Province de Québec et l’émigration européenne (elle est tirée à 80 000 exemplaires et rééditée à plusieurs reprises) afin d’attirer de nouveaux immigrants. Répondant à ces efforts, Hector Fabre travaille activement à faire connaître le Québec et le Canada; il parcourt les routes de France et s’attache à gagner l’appui des membres du clergé catholique français. Néanmoins, comme les lois françaises interdisent toute propagande en faveur de l’émigration (la France connaît alors une importante décroissance démographique), il doit se montrer prudent dans son travail. Malgré tout, ses efforts portent fruit et près de 2 000 immigrants français sont accueillis au Canada en 1910.

Hector Fabre et la diffusion des arts et de la culture du Canada

Outre son rôle en matière d’information et de promotion économique, Hector Fabre favorise les rencontres culturelles entre les milieux français et canadien. En 1887, il instaure la tradition consistant à fêter la Saint-Jean-Baptiste dans la Ville Lumière et en octobre 1893, il fonde La Boucane, une société destinée à divertir les Canadiens vivant à Paris.

Son fils Paul est aussi appelé à tenir un rôle non négligeable dans les activités culturelles de la première représentation permanente du Québec et du Canada à Paris. Secrétaire, puis directeur de la rédaction de Paris-Canada, il fonde le cercle théâtral et artistique Le Gardenia, transformant les « salons du commissariat en un véritable centre culturel qui rayonne dans tout le milieu artistique parisien ». Artistes, hommes d’affaires, étudiants et politiciens défilent donc dans ce qui est bientôt présenté comme le commissariat du Canada. Hector Fabre y reçoit régulièrement la visite d’hommes politiques canadiens d’importance tels que les premiers ministres Honoré Mercier en 1888 et 1891 et sir Wilfrid Laurier en 1897 et en 1902.

Héritage

Au cours de sa carrière, Hector Fabre remporte différents honneurs. Membre de la Société royale du Canada à partir de 1882, il est fait compagnon de l’Ordre de Saint-Michel et Saint-Georges (1886) et chevalier de la Légion d’honneur (1887).

Son décès à Paris, le 2 septembre 1910, marque la fin de la représentation du Québec en France pour une cinquantaine d’années. Le docteur Philippe Roy qui lui succède en 1912 n’agit en fait qu’à titre de commissaire général du Canada. De plus, bien que le Québec aura des représentants officiels à Londres (1911-1936) et à Bruxelles (1914-1933) pendant une vingtaine d’années, ce n’est que dans la foulée de la Révolution tranquille que la province établira son réseau de délégations générales à l’étranger. La première est celle de Paris (1961), suivie par celle de Londres (1962) et d’un bureau économique du Québec à Milan (1965).

En 2017, le Québec compte sept délégations générales (Bruxelles, Londres, Mexico, Munich, New York, Paris et Tokyo) qui offrent des services dans les secteurs de l’économie, de l’éducation, de la culture, de l’immigration et des affaires publiques. La province possède également plusieurs délégations (5), bureaux (8), antennes (6) et représentations en affaires multilatérales (2). Le Canada possède des bureaux diplomatiques et consulaires dans quelque 150 pays (plus de 260 villes).