Article

John Bernard Croak

John Bernard Croak, CV, mineur de charbon, soldat (né le 18 mai 1892 à Little Bay, à Terre-Neuve-et-Labrador; décédé le 8 août 1918 près d’Amiens, en France). John Croak a été récipiendaire de la Croix de Victoria (CV) à titre posthume en reconnaissance de ses gestes héroïques pendant la bataille d’Amiens, lors de la Première Guerre mondiale

John Croak

Le soldat John Bernard Croak voit le jour à Terre-Neuve-et-Labrador, mais déménage avec sa famille au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, alors qu’il n’a que quatre ans.
(avec la permission du ministère de la Défense nationale)


Jeunesse

John Croak est le fils de James et Cecelia Croak. Alors qu’il a quatre ans, sa famille quitte Terre-Neuve-et-Labrador et s’installe à New Aberdeen, une communauté de la future ville de Glace Bay, en Nouvelle-Écosse. À 14 ans, après plusieurs années à fréquenter l’école locale, il décroche un emploi à la mine de charbon Dominion No. 2 Colliery (mine no2 du Dominion), à Glace Bay.

Début 1914, John Croak se rend dans l’ouest du Canada, où il s’adonne au trappage. Le 7 août de l’année suivante alors qu’il retourne au Cap-Breton pour une visite, il s’arrête au camp Sussex, au Nouveau-Brunswick, et s’enrôle dans le 55Bataillon (Nouveau-Brunswick et Île-du-Prince-Édouard) du Corps expéditionnaire canadien (CEC). Quelques jours plus tard, il rejoint le bataillon à Valcartier, au Québec, où il termine son entraînement de base.

Service de guerre

John Croak et son unité quittent Montréal le 30 octobre 1915 à bord du navire à vapeur Corsican et arrivent en Grande-Bretagne le 9 novembre. Les soldats du bataillon, envoyés dans les camps militaires canadiens du sud de l’Angleterre, reçoivent alors un entraînement supplémentaire avant d’être envoyés au front de l’Ouest.

John Croak peine à se conformer à la discipline militaire. Il conteste l’autorité à maintes reprises, notamment en se rendant ivre (l’infraction la plus courante des soldats canadiens).

Front de l’Ouest

Le 55bataillon n’effectue aucun service pour le front de l’Ouest : comme la majorité des bataillons du CEC, il est dissous en Angleterre afin d’augmenter les rangs d’autres unités. John Croak est ainsi transféré au célèbre 13bataillon (Royal Highlanders), connu sous le nom de Black Watch (Garde noire), qui combat alors sur le front de l’Ouest en tant que membre de la 3brigade de la 1re Division du Corps canadien. John Croak arrive au Dépôt de la base canadienne, en France, le 16 avril. Il y suit une formation supplémentaire pour se préparer à affronter les rigueurs de la guerre de tranchées et, le 12 juin, rejoint la Black Watch au front.

Étant l’une des premières unités à se rendre au combat, la Black Watch est expérimentée et aguerrie lorsque John Croak intègre ses rangs. Avec elle, il se bat sur la Somme, sur la crête de Vimy et à Passchendaele. Le Corps canadien passe ensuite les sept premiers mois de 1918 à préparer la prochaine grande offensive alliée.

Pendant ce temps, les problèmes de discipline de John Croak se multiplient. Puisque ses infractions sont commises au front, elles ont lieu « lors d’un service actif » et sont donc punies plus sévèrement.

Malgré ses faux pas disciplinaires, ses habiletés au combat lui valent le respect de ses compagnons d’armes. Charlie « Bubbles » Hughes, un jeune homme qui, à 19 ans, a fait son service avec lui dans la compagnie A raconte:

Johnny Croak, c’était un homme incroyable. Il était fidèle à lui-même et n’avait peur de rien. Il portait toujours un revolver sur sa hanche rondelette et je ne pense pas qu’il aurait hésité une seconde à le décharger sur quiconque aurait osé le contrarier. Ceux qui partaient en patrouille ou en groupe de travail avec lui en revenaient.

Johnny Croak n’était donc pas de ceux qui font semblant; c’était un vrai combattant. Le soldat démontrera notamment ses habiletés militaires lors de la prochaine bataille d’importance pour les Canadiens.

Tranchées de la Première Guerre mondiale

Tranchées de première ligne près du village de Hangard, à partir duquel les Canadiens, y compris le bataillon de John Croak, se sont « lancés » le 8 août 1918. (Photo prise en avril ou en mai 1919) 
(avec la permission du ministère de la Défense nationale/Bibliothèque et Archives Canada)


Bataille d’Amiens

Les « cent jours du Canada » débutent avec la bataille d’Amiens, le 8 août 1918, et se terminent lorsque l’armistice est conclu, le 11 novembre. Pendant cette période, le Corps canadien réussit à mener les alliés d’Amiens, en France, jusqu’à Mons, en Belgique. Les batailles des cent jours du Canada sont probablement les réussites militaires les plus importantes de l’histoire de l’Armée canadienne.

L’historien militaire britannique J.F.C. Fuller décrit la bataille d’Amiens comme « la plus déterminante de la Première Guerre mondiale ». Les Allemands lui donnent quant à eux un autre nom : « le jour noir de l’armée allemande ».

Le 8 août, à 4h 20, les Canadiens avancent à l’est d’Amiens dans un épais brouillard sur un front large de 7,8 km. Ils sont accompagnés de bombardements d’artillerie importants et suivis par des chars d’assaut. En peu de temps, les soldats canadiens se battent contre les Allemands ayant survécu au premier barrage d’artillerie.

Croix de Victoria

Croix de Victoria décernée à titre posthume à John Croak.
(avec la permission du musée de l’Armée de la Citadelle d’Halifax)


Héroïsme au bois de Hangard

Le bois de Hangard est le premier obstacle auquel est confronté le 13bataillon. La citation de la Croix de Victoria de John Croak décrit les événements qui s’y déroulent:

[…] après avoir été séparé de sa section, il tombe sur un nid de mitrailleuses, qu’il réduit au silence à l’aide de grenades, faisant prisonnier le détachement de la mitrailleuse et s’emparant de celle-ci. Peu de temps après, il est grièvement blessé, mais il refuse d’abandonner son poste. Il rejoint son peloton et la troupe se trouve bientôt devant une forte position ennemie, équipée de plusieurs mitrailleuses. Saisissant une occasion, le soldat Croak s’élance tout seul, presque immédiatement suivi par le reste du peloton, qui charge avec bravoure. Il arrive le premier aux tranchées. Il y prend la tête de ses hommes, s’empare de trois mitrailleuses et passe à la baïonnette ou fait prisonniers tous les hommes de la garnison. La persévérance et le courage de ce brave soldat, qui fut de nouveau grièvement blessé (et succomba plus tard à ses blessures), ont été pour tous une source d’inspiration.

Peu avant sa mort, John Croak aurait dit à un ami : « Souhaites-tu exprimer ta gratitude ? Agenouille-toi et prie pour mon âme. » Bien qu’il semble peu probable que le jeune soldat de tempérament sanguin ait prononcé de telles paroles, celles-ci sont inscrites sur sa pierre tombale, située au cimetière britannique du bois de Hangard, près de l’endroit où il a connu la mort.


Pierre tombale de John Bernard Croak

Pierre tombale de John Bernard Croak, dans le cimetière britannique du bois de Hangard.   
(avec la permission de John Boileau)


Commémoration

La mère de John Croak reçoit la Croix de Victoria de son fils à titre posthume. Elle lui est remise par le lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse le 23 novembre 1918, à la maison du gouvernement de la province. La croix est conservée par la famille pendant plusieurs décennies, puis acquise par le Musée canadien de la guerre en 1976. Elle est aujourd’hui exposée au musée de l’Armée de la Citadelle d’Halifax.

Plusieurs hommages à JohnCroak se trouvent au Cap-Breton. Une école, un parc et une filiale de la Légion royale canadienne (aujourd’hui fermée) ont été nommés en son honneur.