Élections : la Seine-et-Marne, exemple d'une "terre de conquête" pour le RN

Les panneaux électoraux de Crécy-la-Chapelle, où plus de 40% des suffrages exprimés vont au RN. ©Radio France - Diane Berger
Les panneaux électoraux de Crécy-la-Chapelle, où plus de 40% des suffrages exprimés vont au RN. ©Radio France - Diane Berger
Les panneaux électoraux de Crécy-la-Chapelle, où plus de 40% des suffrages exprimés vont au RN. ©Radio France - Diane Berger
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Le Rassemblement national s'est imposé dimanche dernier dans de nombreux départements français. Exemple en Seine-et-Marne, où le parti d'extrême droite a engrangé lors des élections européennes un peu plus de 33 % des voix, soit 9 points de plus qu'en 2019.

La liste menée par Jordan Bardella a remporté lors du vote des européennes 33,41 % des suffrages en Seine-et-Marne, loin devant celle de la France insoumise (14,31 %), celle du camp présidentiel (12,27 %) et l'attelage PS-Place Publique conduit par Raphaël Glucksmann (11,32 %). Un succès électoral pour le Rassemblement national dans ce département, acquis plutôt à la droite traditionnelle - la liste Les Républicains, menée par François-Xavier Bellamy s'est d'ailleurs retrouvée largement distancée, en cinquième position. Et sur place, cette adhésion au Rassemblement national se ressent.

Sur un banc de Crécy-la-Chapelle, commune paisible de moins de 5 000 habitants, près de Meaux, Jérémy s'affaire sur un ticket de jeu à gratter. Ce jardinier ne le cache pas, son soutien va au RN : "Les Français en ont marre de payer pour les autres." Dans la liste des choses qui l'agacent, il cite notamment le retrait des crèches dans les mairies, en période des fêtes de fin d'années. "On a été construit sur des bases sur lesquelles on crache aujourd'hui, je ne suis pas contre avoir une vie cosmopolite et multi-religions, mais j'ai l'impression que les valeurs de la France ont été effacées pour faire une nouvelle France."

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Le score obtenu par Jordan Bardella le réjouit, donc, d'autant plus à l'approche des prochaines législatives. Quelques mètres plus loin, on croise deux retraités qui restent évasifs sur le bulletin qu'ils ont glissé dans l'urne dimanche dernier, mais ils finissent par reconnaître, dans un large sourire, "que ce vote a pu provoquer la dissolution de l'Assemblée nationale", visiblement satisfaits de la tournure des évènements.

Sentiment d'insécurité et défaillances de la droite traditionnelle

Dans la commune, plus de 40 % des suffrages exprimés sont allés au Rassemblement national. Pour la maire Christine Autenzio (sans étiquette), c'est loin d'être une surprise : "Les électeurs sur Crécy-la-Chapelle, de ce que j'entends, ont besoin de sécurité, de valeurs qui ont été perdues, et c'est aussi un vote sanction." La sécurité qui n'est pourtant pas un problème majeur au quotidien dans la commune, reconnaît l'édile : "En termes de cambriolage, les chiffres s'équilibrent d'une année sur l'autre. Mais c'est une question de contexte général qui génère de l'inquiétude."

Le ressenti d'insécurité est devenu un moteur qui fait gonfler le score du RN d'élection en élection dans ce département. Le parti de Marine Le Pen y compte même d'un sénateur, depuis 2023, l'un des trois dont dispose le parti : Aymerix Durox. "On est historiquement sur un territoire qui était depuis une trentaine d'années était celui d'une droite conservatrice classique qui a beaucoup déçu", explique l'élu, avant d'ajouter : "On a observé depuis le début des années 2010 un glissement de leurs électeurs vers nous."

Et il se réjouit à l'approche des législatives, les 30 juin et 7 juillet prochain. D'après ses calculs, quatre à six circonscriptions du département pourraient être gagnées par le Rassemblement national, qui n'en contrôle qu'une seule pour l'instant. "La Seine-et-Marne est une terre de conquête pour nous, on s'y adonne lentement, mais sûrement."

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La moitié des électeurs s'est abstenue

Reste à savoir ce que feront les abstentionnistes dans le département, où un habitant sur deux n'a pas voté, dimanche dernier. Certains résidents croisés dans les rues ne cachent par leur désintérêt pour le scrutin passé comme pour celui à venir.

Mais ce n'est pas le cas d'Audrey, jeune employée d'une animalerie. Si elle ne s'est pas rendue dans un bureau de vote dimanche dernier, la dissolution de l'Assemblée nationale et le score du RN aux européennes lui ont fait l'effet d'un électrochoc : "Le pourcentage est énorme, ce n'est pas juste un ou deux points. Et ce n'est pas une bonne chose, pour les femmes, pour les homosexuels comme moi… Mais je ne sais pas si on va réussir à rattraper ça."

Car est-ce que les autres abstentionnistes du département se mobiliseront comme elle, et pour qui ? Il est trop tôt pour le déterminer. Audrey elle-même le reconnaît : elle ne sait pas encore vers quel parti elle va se tourner.

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