Tout a commencé par un tweet du CFDA, le conseil des designers américains, quelques jours avant le coup d’envoi de la Fashion Week new-yorkaise. L’institution de la mode y révélait l’axe majeur de cette saison : la diversité. Nous sommes alors le 28 janvier 2019 et tous les directeurs de casting et les designers sont appelés à laisser une plus grande place à la diversité qu’elle soit physique, d’âge, de genre ou ethnique. Une première.

Un premier pas vers la diversité

 « La diversité et l'inclusion ne sont pas une tendance, mais la façon dont nous devrions tous fonctionner à l'avenir. En tant qu’organe directeur de la mode américaine, le CFDA s’engage à tracer la voie d’un secteur plus diversifié, équitable et inclusif », exprime alors dans un communiqué Steven Kolb, le président de l’organisme. Avant d’ajouter : « Lorsque vous présenterez vos défilés à la Fashion week de New York, n’oubliez pas de promouvoir la diversité et l’inclusion, sur et hors des podiums. La mode américaine peut ouvrir la voie ». 

Et pour prouver qu’il s’agit de plus que d'un appel du pied, le CFDA annonce dans la foulée les nouveaux designers intégrés à son calendrier : on y compte No Sesso, marque mixte de la créatrice trans Pierre Davis ; Billy Porter, l’acteur de l’excellente série Pose, a également été nommé ambassadeur de la Fashion Week masculine qui précédait les défilés femmes ; Et depuis le 1er février, le site met en avant, pour le Fashion Black Month, 28 personnalités noires qui ont une influence sur le milieu de la mode à l’instar de Michelle ObamaKerby Jean-Raymond ou encore Pat McGrath.

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New York, capitale de la mode diverse

Pourtant, ce n'est pas un sujet nouveau pour la mégalopole américaine. Le 11 octobre dernier, le site The Fashionspot publiait son rapport annuel sur la diversité, qui comptabilise les avancées de la mode en matière de diversité. Le titre de ce dernier rapport : « Les défilés pour le printemps ont été les plus divers jamais vus, mais l’Europe a toujours un problème majeur en terme de diversité de corps et d’âge ». 

On lit plus loin que « New York est généralement la plus diversifiée sur le plan racial des quatre principales semaines de la mode et le printemps 2019 respecte la tradition ». Après la Grosse Pomme, se positionnent dans l’ordre Londres, Paris et enfin Milan. Même son de cloche lorsque l’on aborde la question des mannequins « plus-size » puisque les designers américains sont ceux qui se saisissent le plus de la question à l’instar de Chromat, Michael Kors ou encore Savage x Fenty. 

Au total, ce sont douze labels new-yorkais qui contribuent alors à normaliser la présence de mannequins grandes tailles. Un chiffre loin d’être imposant, mais qui s’affirme face à trois labels italiens, puis une marque parisienne et enfin une marque londonienne.  

Et après ?

Si les scènes de mode européennes mettent moins en avant leur volonté de se montrer inclusives, cela ne signifie pas qu'elles ne font rien. Cette semaine, ce sont deux gros noms du luxe italien qui ont annoncé vouloir en donné la preuve. Le premier : Gucci, qui au travers de deux lettres ouvertes de son CEO Marco Bizzarri et d'Alessandro Michele, son directeur créatif, a indiqué vouloir combler le manque de diversité au sein de ses équipes. 

Lors d’un talk à la Parsons School de New York qui se tenait mercredi dernier, le CEO de la marque a affirmé sa volonté d'“améliorer et accélérer le processus d'inclusion et de diversité que nous avons lancé il y a quatre ans”, mettant en avant plusieurs initiatives du label de luxe, à l’instar d’un programme de bourse d’études lancées à New York, Pékin ou encore Nairobi de manière à engager des personnes avec des parcours plus éclectiques. 

Deuxième maison à s'engager pour plus de diversité : Prada. La griffe de luxe dirigée par Miuccia Prada a annoncé le lancement de son conseil de la diversité et de l’inclusion qui sera dirigé par la réalisatrice Ava DuVernay et l’artiste Theaster Gates. Son but ? « Élever les voix de personnes de couleur au sein de l'entreprise et de l'industrie de la mode en général. » Prada s'est ainsi engagé à cultiver, recruter et fidéliser la diversité des talents en son sein.

« Nous contribuerons à faire en sorte que le monde de la mode reflète le monde dans lequel nous vivons et nous sommes ravis de travailler avec des collaborateurs de longue date, Ava DuVernay et Theaster Gates, à cet importante initiative, a indiqué la marque. Nous sommes impatients de travailler avec le conseil consultatif sur la diversité et l'inclusion pour nous aider à nous développer non seulement en tant qu'entreprise, mais également en tant qu'individus ». À l'instar de Gucci, Prada et son nouveau conseil seront partenaires d'universités, de programmes de stages et de cursus d'apprentissage auprès de communautés habituellement éloignées de ce milieu. 

S'il ne s'agit que des premières initiatives annoncées publiquement par de grandes maisons de luxe, une question se pose : ont-elles le pouvoir de faire durablement bouger les lignes ?