Après le shooting, Antonio et Maria, cinquante-six ans de mariage, s'envolent vers Los Angeles pour voir leur fille aînée. Chez les Hidalgo, on a le sens de la famille (« Anne vient tous les étés en Espagne, et on s'appelle deux fois par semaine »), le sang chaud (« J'ai le même caractère que mon père, explosif ! ») et la passion de la politique (« J'ai toujours milité, notamment à la CGT. Très jeune, Anne m'a accompagné »). Le 31 mars prochain, lendemain du second tour des élections municipales, Antonio fêtera ses 85 ans à Paris. Il veut y voir un signe.
Marie Claire : Êtes-vous fièr(e) de lui/d'elle et pourquoi ?
Anne Hidalgo : Oui, parce qu'il a beaucoup de dignité. Il a toujours pris sa vie en main, il est autodidacte, intelligent.
Antonio Hidalgo : Bien sûr, mais c'est difficile de parler de mes filles, j'en ai deux. Je suis fier de son courage.
Quel est son pire défaut ?
Elle : Il a un sale caractère, et il est macho sur les bords.
Lui : Elle est têtue.
Sa plus belle qualité ?
Elle : La générosité. Il a émigré pour que ma sœur et moi puissions faire des études, ce que lui n'a pas pu faire.
Lui : L'honnêteté. J'habite en Espagne, où il y a beaucoup de corruption, alors je sais combien il est important de ne pas être corrompu par le pouvoir.
Avez-vous les mêmes convictions politiques ?
Elle : Oui ! Ma famille a subi le fascisme. Mon grand-père, condamné à mort sous Franco, a fait de la prison.
Lui : Ah oui. J'ai toujours été syndicaliste. Elle a vécu dans ce monde politisé.
Votre désaccord le plus fort ?
Elle : Adolescente, j'ai dû me battre pour ma liberté. Je suis devenue féministe grâce à lui.
Lui : On n'a jamais été en désaccord. Elle a toujours fait ce qu'elle a voulu. Les Espagnols, on est quand même machos, mais j'avais trois femmes à la maison...
Votre meilleur souvenir ensemble ?
Elle : Le dimanche soir, dans notre HLM de Lyon, je m'asseyais sur ses genoux pour écouter la radio en regardant la nuit tomber.
Lui : Quand j'ai assisté à son premier meeting politique. Là, j'ai compris...
Votre pire souvenir ensemble ?
Elle : Les engueulades pour conquérir ma liberté. Je lui disais « N'aie pas peur ! »
Lui : Aucun !
Lui dites-vous « Je t'aime » ?
Elle : Oui, je le lui dis en espagnol.
Lui : Non, je suis timide, même à ma femme, je ne dis pas « Yo te amo » !
La dernière chose que vous ayez faite ensemble ?
Elle : Chaque été, je loue une maison au bord de la mer à Cadix. On parle beaucoup de politique, il surveille les sondages de ma campagne...
Si son éducation était à refaire, vous changeriez quoi ?
Lui : Rien. J'étais très impliqué dans son éducation, j'avais de l'ambition pour elle.
S'il avait dû changer quelque chose dans votre éducation, ce serait quoi ?
Elle : Être moins inquiet. Mais cela m'a permis de me confronter à la réalité.