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Transidentité des mineurs : le Sénat adopte la proposition de loi des Républicains après des débats agités

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Sans grande surprise, la droite et le groupe Union centriste ont uni leur voix pour adopter ce texte, qui interdit désormais les transitions médicales avant l’âge de 18 ans. Le gouvernement a attendu la dernière minute pour se positionner contre, sans succès.
publié le 29 mai 2024 à 9h31

«L’une des lois les plus restrictives en Europe», ont dénoncé, ce mercredi 29 mai, les sénateurs de la gauche, juste avant l’adoption vers minuit et demi de la proposition de loi des Républicains visant à encadrer les transitions chez les mineurs en France. Alors même que le texte a peu de chances d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale et d’être promulgué, le message des sénateurs est clair : une restriction nette de l’accès aux soins pour les enfants transgenre. Les tentatives de la gauche d’ouvrir les yeux à la droite et aux quelques indécis auront été vaines. Sur les 316 voix exprimées, 180 ont voté pour, 136 contre.

Composés de quatre articles, cette loi entend interdire toute prescription hormonale et chirurgie de réassignation de genre avant l’âge de 18 ans. La réalisation de ces actes extrêmement rares et soumis à la décision des médecins, des parents ainsi que de l’enfant, pourrait selon le texte voté entraîner des sanctions pénales pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Pourtant, comme l’a rappelé Anne Souyris, sénatrice de Paris, «le cadre légal existe et est respecté». Le rapporteur Alain Milon (Les Républicains), concède lui aussi devant ses homologues : «Il ne va pas de soi que le législateur doive intervenir ainsi dans la pratique médicale», mais, d’après lui, la procédure est ici justifiée.

L’essentiel des discussions s’est donc concentré sur l’existence même de cette proposition de loi. Malgré l’horaire tardif de l’examen du texte, les débats ont été particulièrement animés. D’un côté comme de l’autre de l’hémicycle, les sénateurs se sont exclamés, voire offusqués, signe que le sujet est avant tout d’ordre idéologique. Les amendements des sénateurs de la gauche, qui souhaitaient supprimer un à un les articles composant le texte, ont tous été rejetés. «Ces pratiques médicales permettent à environ 300 jeunes de survivre», souligne Anne Souyris. La sénatrice LR Pascale Gruny, elle, résume assez bien les inquiétudes de la droite à ce sujet : «On parle de peu de mineurs, mais leur nombre progresse».

Frédéric Valletoux pas «convaincu» par les arguments de la droite

Durant l’entièreté des débats, le gouvernement, représenté ici par le ministre délégué chargé de la Santé, Frédéric Valletoux, demeurait flou sur sa prise de position par rapport à la loi. L’absence d’Aurore Bergé, ministre chargée de la lutte contre les discriminations, qui avait pourtant annoncé rejeter en force ce texte, brouillait d’autant plus les pistes. Mais alors que la loi était sur le point d’être adoptée et qu’on ne l’attendait plus, Frédéric Valletoux s’est levé et a déclaré : «Le gouvernement est contre l’adoption de cette PPL. Rien de ce que j’ai entendu ce soir ne m’a convaincu.» Et de dénoncer un texte à «l’approche dogmatique et subjective où les arguments médicaux et scientifiques n’avaient que peu d’importance». La gauche applaudit.

Hué par le camp de la droite, le sénateur communiste Ian Brossat a tenu à rappeler le passé conservateur des Républicains sur ces sujets : «Quand on se plonge 30 ou 40 ans en arrière, il y a eu des oppositions à la dépénalisation de l’homosexualité, et cela s’est fait. Il y a eu des oppositions au pacs, violentes et agressives, et cela s’est fait. Il y a eu des oppositions au mariage pour tous, et cela s’est fait.» Tout en déplorant l’adoption de cette proposition de loi, le sénateur se dit «convaincu que le jour viendra où les personnes trans seront traitées à égale dignité. Ce texte n’y contribue pas, mais ce temps viendra, et je souhaite qu’il vienne vite».

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